Menu
Search
Mardi 16 Avril 2024
S'abonner
close
Mardi 16 Avril 2024
Menu
Search
Accueil next L'humain au centre de l'action future

Nouveau dictionnaire encyclopédique arabe

Un événement éditorial ? Le 19 février dernier, le Conseil national de la culture et des arts koweïtien a fêté avec éclat l'achèvement d'un projet éditorial qui a débuté en 1965 : la publication, en 40 volumes, du dictionnaire encyclopédique Taj al ‘Arous

No Image
Pour répondre à cette question, remontons tout d'abord à l'origine du dictionnaire en question.
Au XIV e.s., l'égyptien Ibn Manzour (m.711 H.), composa Lissan al-‘arab. Ouvrage en 20 volumes, c'est le dictionnaire le plus volumineux de la langue arabe. Richesse de la matière linguistique, développements philosophiques et linguistiques étayés par de fréquents et vastes recours aux textes d'adab et à la poésie font de cet ouvrage, plus qu'un dictionnaire, une vaste encyclopédie de la langue et de la littérature arabes.
Du dictionnaire patrimonial...
Le 2e dictionnaire majeur, Al Qamous al mouhit, date du XV e.s. Son auteur, un Yéménite, Majd-eddine al Fairouz abadi (m. 816 h.), y a résumé et condensé, en 14 tomes, la majeure partie du lexique inventorié dans Lissan al ‘arab .
A partir de ce Qamouss al mouhit, un autre compatriote d'Al fairouz abadi, au XVIII e.s., visa à retrouver le caractère encyclopédique du dictionnaire original, le Lissan. Cet auteur, c'est Al mourtada az-zoubaidi, qui travailla et publia en 1760 au Caire : Taj al ‘arouss min jawami' al qamouss. Ce dictionnaire peut être considéré comme le dernier dictionnaire encyclopédique en date de la langue arabe. Et c'est cet ouvrage datant de plus de 240 ans dont on vient de fêter la réédition critique intégrale, établie par un collectif de linguistes arabes.
Le nom même de la collection où il a été édité, silsilat at-turat al ‘arabi, signale le caractère éminemment culturel et patrimonial de l'entreprise. Un caractère qu'exprime bien le linguiste marocain Abdallh Bounfour, quand il nous déclarait dans une interview : “Les dictionnaires sont la mémoire de la langue et, par conséquent, de la nôtre. Qui peut vivre humainement sans mémoire?”.
Mais d'un autre côté, c'est justement cette dimension mémorielle qui fixe les limites d'un dictionnaire tel Taj al ‘arouss. Conçu il y a plus de 240 ans, un tel dictionnaire répond-t-il aux besoins des arabophones d'aujourd'hui, sans parler des universitaires et des chercheurs dans les divers domaines du savoir? Il va de soi que la réponse est cette question est non.
… Au dictionnaire automatisé
Si l'ouvrage qui vient d'être édité s'inscrit dans une perspective patrimoniale et doit être salué comme tel, tout autre est le travail qui attend les lexicographes arabes contemporains. Plus que la dimension de “mémoire” du dictionnaire, c'est celle de “projet” qui est aujourd'hui la plus pertinente. En effet, sans une langue arabe modernisée et enrichie, capable d'embrasser toutes les branches du savoir, en premier celles de la science et de la technologie, tout espoir de développement autonome et créatif, demeurerait largement problématique. Dans l'aménagement de cette langue souhaitée, la lexicologie et la lexicographie, telles que les conçoit et les pratique la linguistique moderne, sont des disciplines qui seront amenées à jouer les premiers rôles. Les progrès rapides de la lexicologie, «étude scientifique du vocabulaire». ont en effet provoqué une révision complète des problèmes et des méthodes de la lexicographie, “technique de confection des dictionnaires et analyse linguistique de cette technique”.
Dans ce domaine, on peut affirmer que la recherché au Maroc est l'une des plus avancées dans le monde arabe. Dans l'IERA, Institut d'études et de recherches sur l'arabisation, l'un des trois axes fondamentaux de la recherché appliquée qu'on y mène, est la recherché linguistique automatique. Depuis 1996, des linguistes de l'Institut ont commencé à développer une base lexicale arabe baptisée GENFO (génération de formes) dont l'objectif est le stockage de tout le savoir linguistique arabe en matière de lexicologie. Dans la même optique, se situe leur projet GENTER (génération de termes) visant à créer une base technologique ambitionnant de couvrir le champ de toutes les sciences, aussi bien celles dites “dures” que les “sciences humaines”.
Ce projet d'élaboration d'un dictionnaire arabe automatisé et le plus exhaustif possible (en fait un ensembles de dictionnaires, généraux et spécialisés) est, on le devine, un projet de longue haleine qui ne concerne pas une seule équipe, ni même un seul pays. En fait, ce sont tous les pays arabes qui, dans le cadre de la Ligue arabe, sont interpellés pour la réalisation d'une entreprise dont dépendent le statut et l'avenir de la langue arabe.
Là encore, comme en tant d'autres domaines, s'imposera tôt ou tard, au niveau politique, un choix décisoire; pour utiliser un mot qu'affectionne Laroui : al hasm.
Lisez nos e-Papers