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Portrait : Sifaw Said El Mehroug

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Dans une clinique tunisienne, et après des années de souffrance suite à un “accident” de la route, Saïd El Mahroug, dit Sifaw, s'est éteint en 1994. Ce poète, né à Jadou dans les montagnes de Nefousa (région berbérophone du Nord-Ouest libyen) en 1946, demeure la figure emblématique de l'amazighité en Libye. Dès sa prime enfance, il quitte sa montagne natale avec sa famille pour s'installer à Tripoli où il fait ses études primaires et secondaires.

Il poursuit ensuite des études de médecine en Égypte. Mais étant engagé dans la vie politique par des articles qu'il publie régulièrement, sa bourse d'étude est suspendue. Il revient alors à Tripoli et s'inscrit à la Faculté de droit en 1967, et après des études de droit aux États-Unis, Sifaw rentre au pays où il est embauché par une compagnie pétrolière.

L'arrivée des militaires au pouvoir en 1969 rend encore plus étouffante l'expression politique et intellectuelle en Libye. Prônant un social-nationalisme arabe intégral, le régime totalitaire de Kadhafi tente d'homogénéiser la pensée et la société en éliminant toutes les voix dissidentes. Sifaw, en tant qu'intellectuel engagé et amazighiste, doit doublement affronter l'idéologie dominante. Il ne baisse pas ses armes et mène son combat sur plusieurs fronts.

Sifaw rejoint l'Union des écrivains libyens où il fait valoir ses opinions politiques et intellectuelles. De même, il s'attelle à un travail de collecte de contes et de mythes anciens dans sa langue maternelle prohibée, l'amazigh. Il écrit dans cette langue qui le lie aux racines de sa vie et aux souvenirs de sa mère disparue. Dissident, il attire sur lui les foudres du pouvoir. Après de multiples harcèlements policiers, il est victime d'un grave “accident” de voiture. Paralysé, confronté à de nombreuses tracasseries administratives, sanitaires et judiciaires qui finissent par l'achever psychologiquement, Sifaw succombe le 28 juillet 1994.

Avant d'être cet intellectuel engagé, Sifaw est avant tout un poète. Il écrit en arabe et en amazigh. Sa poésie – dont uniquement une petite partie a été publiée et surtout en langue arabe – exprime la position inconfortable de l'être libyen en général et de l'Amazigh en particulier. Sifaw disait souvent qu'en Libye, faire de la poésie peut passer pour un crime. Et c'est ce crime qu'il a choisi de commettre.
La poésie de Sifaw témoigne de l'impossibilité d'écrire dans un pays où tout s'oublie: la langue, les noms, l'histoire…

Tant de gens
Ont oublié leurs noms
Après avoir oublié
Leur accent.
Paralysé, il ne lui reste que la possibilité d'explorer sa mémoire pour se ressourcer des mythes des anciens et refaire le monde :
Je vais faire ramener avec moi
Le Satan au paradis.

De tous ses écrits, seuls un recueil de contes traduits en arabe “Les voix de minuit” et un recueil de poésie “Poèmes silencieux” ont vu le jour. Le reste, en particulier toute sa littérature en amazigh – une transcription de contes anciens, des poèmes et une grammaire du parler de Nefousa – s
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