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Ces «ferrachas» et commerçants subsahariens qui transforment les chaussées en véritable souk

Bab El Had, l'avenue Mohammed VI, Akkari ou encore l'avenue Fal Oul Oumeir à l'Agdal, les trottoirs de la ville de Rabat ont des allures de marché de tous les jours. Tissus, bijoux, vêtements, objets de toutes sortes s'étalent devant les «ferrachas» subsahariens, qui n'hésitent pas parfois à faire du commerce informel un métier bien formel.

Ces «ferrachas» et commerçants subsahariens  qui transforment les chaussées en véritable souk
Dépourvus de ressources financières, ces immigrés subsahariens ont opté pour le commerce ambulant, étalant des produits locaux. Ph. Seddik

Les trottoirs et les chaussées sont transformés en véritable souk. Venus de différents pays : Sénégal, Nigeria, Mali, Congo, Cameroun, Côte d’Ivoire…, nombreux sont les Africains subsahariens qui ont choisi de s’installer au Maroc, au lieu d’une éventuelle et hypothèque traversée vers l'Eldorado européen, en vue de s’engager dans différentes activités commerciales, à dessein de trouver un travail décent, garantissant une vie tout aussi digne que meilleure. Dépourvus de ressources financières, ces immigrés subsahariens ont opté pour le commerce ambulant, étalant des produits locaux, tels que des crèmes d’eczéma, des massages d’articulation, des savons bio, des objets sculptés ou des toiles.

Parallèlement, il y a d’autres jeunes s’adonnent à des activités différentes comme la cordonnerie, la vente de téléphones, de bijoux et accessoires, d'objets d’art, de lunettes et de montres. Ils exposent leurs produits tout au long des ruelles de l’ancienne médina de Rabat, dans certaines artères très passantes situées au cœur de la ville, ainsi que sur les places publiques. En somme, ces petites activités commerciales sont l’illustration éloquente du commerce africain, qui commence à avoir le vent en poupe dans un marché prometteur tel que le Maroc.

Armand, militant associatif et secrétaire général de l’Association lumière sur l’émigration clandestine au Maroc (Alecma), pointe les problèmes que connaît le secteur du commerce africain, citant, entre autres, le manque de structures d’accompagnement, de prise en charge, d’un cadre approprié pour exercer en toute quiétude. Ce militant, venu au Maroc en 2011 et qui a entamé son activité de commerçant ambulant depuis 2013, a émis le souhait de voir le commerce des Africains subsahariens contribuer à l’économie du Maroc. Si certains Subsahariens étalent leurs produits sur les trottoirs et les chaussées, d'autres, plus «chanceux», ont eu l'idée de créer des commerces dans certains quartiers périphériques et populaires plutôt qu'en plein centre-ville. Cette inscription de cette communauté africaine sur le marché du travail marocain contribue à dessiner une société urbaine de plus en plus cosmopolite, marquée par l’apparition de «lieux d’Afrique», comme des restaurants, des salons de coiffure et des ateliers de couture africains. Pour nombre de ressortissants d’Afrique subsaharienne abordés par la MAP, le fait d’entamer un petit projet au Maroc permet de générer des revenus et contribue ainsi activement et efficacement à l'activité économique et commerciale du pays. Rodrigue Olivier Ouantou, un Camerounais installé depuis 10 ans au Maroc et qui gère une petite boutique dans le quartier de l’Océan à Rabat, où il vend des produits alimentaires et cosmétiques, fait savoir qu’il a une clientèle africaine fidèle, qui veut garder le même goût culinaire de chez elle, en achetant des produits alimentaires provenant de son pays d’origine.

M. Ouantou met sur les étals de sa boutique des produits de différentes couleurs, natures et arômes, notamment les bananes plantains, la poudre et les grains de l’arbre «Baobab», les feuilles d’hibiscus et de manioc à forte valeur nutritionnelle, le couscous fermenté et la farine à base de manioc, ainsi que l’huile de palme, le riz sénégalais parfumé, des piments et des sauces... Quant aux produits cosmétiques, ils sont en provenance particulièrement du Sénégal, tels que les encens, les parfums, les mèches à cheveux, les crèmes «Afro» pour massage et soins de visage, souligne le commerçant. «Je loue ce magasin à 2.500 DH et je paie la patente, ainsi que les autres charges d’eau et d’électricité et d’internet», a-t-il confié, ajoutant qu’il mène bien son commerce et fait des épargnes. Pour sa part, Boutou Bangoura, ressortissante guinéenne, résidant depuis 8 ans au Maroc, a relevé qu’elle a commencé son activité commerciale depuis 2 ans. Elle propose des produits cosmétiques en provenance d’Afrique (savons bio, lait de beauté, beurre de karité, huile de coco...) en plus d’autres produits alimentaires, également importés d’Afrique. Récemment installées au Maroc (10 mois), Awa et Amina, deux sœurs sénégalaises diplômées d’une école de coiffure et âgées respectivement de 24 et 34, ont ouvert leur propre salon, dans un centre commercial à Rabat. «Les prix sont abordables et mes clientes sont satisfaites», témoigne Awa dans une déclaration à la MAP, précisant que les femmes marocaines s’adonnent de plus en plus à la coiffure «Afro», particulièrement les «Tresses», qui sont la référence en matière de coiffure africaine. Dans la même veine, Marie, couturière sénégalaise, possède un magasin de tissus africains et de couture dans le quartier populaire Youssoufia à Rabat, où elle embauche deux couturiers ivoiriens. «Nous faisons de la couture des tissus marocains et sénégalais et la majorité de nos clientes sont des Africaines», indique-t-elle.

Conscient de sa transformation en terre d’accueil, le Maroc a choisi de traiter la problématique de l’intégration socioprofessionnelle des immigrés subsahariens avec courage, responsabilité et humanisme, en adoptant, sous l’impulsion de S.M. le Roi, une nouvelle politique migratoire. Lancée en septembre 2013, cette politique se veut une opération exceptionnelle de régularisation des situations de milliers de ressortissants étrangers, notamment subsahariens. Un geste inédit dans un pays du Sud, salué par les agences humanitaires onusiennes et les ONG de défense des droits des migrants.

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