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L'Argentine et le FMI sur la voie du dégel

Après des années d'isolement, l'Argentine s'est engagée sur la voie d'une normalisation économique qui passe notamment par un rapprochement avec une institution encore honnie à Buenos Aires : le Fonds monétaire international.

L'Argentine et le FMI sur la voie du dégel
Buenos Aires a accompli un nouveau geste d'apaisement en s'engageant à accepter de nouveau les audits annuels du FMI.

En concluant lundi dernier un accord avec les fonds «Vautours», le nouveau président argentin Mauricio Macri a déjà offert un puissant gage de bonne volonté à la communauté financière, mais il doit maintenant ouvrir une nouvelle ère avec le Fonds monétaire international (FMI) après des décennies de relations acrimonieuses.«Se réengager auprès du FMI est capital pour en finir avec l'image de l'Argentine pays opaque qui ne publie aucune donnée économique crédible», affirme Monica De Bolle, une ancienne économiste du FMI spécialisée sur l'Amérique latine. Un retour en grâce auprès de l'institution permettrait ainsi de faire revenir des investisseurs, ajoute Ernesto Talvi, directeur du Brookings-Ceres Latin America Initiative.«Savoir que le Fonds sera présent en cas de besoin peut rassurer les investisseurs, spécialement à un moment où ils sont de plus en plus réticents à investir dans les marchés émergents», poursuit cet ancien expert de la banque inter-américaine de développement.

Carton rouge

Ce rapprochement ne va toutefois pas de soi en Argentine où certains continuent de tenir le FMI pour responsable du défaut de paiement en 2001, point culminant d'une crise dont le pays ne s'est pas encore relevé. L'ancien directeur général du Fonds, Dominique Strauss-Kahn, avait lui-même admis en 2007 que le FMI faisait parfois figure de «diable» en Argentine et qu'il y avait «des raisons à cela». Signe de l'hostilité ambiante, les gouvernements argentins ont, au cours des dernières années, réduit au minimum leurs relations avec le FMI, notamment sous la présidence de Cristina Kirchner (2007-2015).Depuis 2006, le pays refuse ainsi de se plier aux audits annuels que le FMI effectue traditionnellement sur ses 188 États membres en envoyant des équipes sur place et en consultant leurs comptes publics. Le fossé s'est encore creusé début 2013 quand le FMI a engagé contre l'Argentine une procédure de sanctions inédite pour dénoncer le manque de fiabilité de ses statistiques d'inflation et de croissance. La patronne du FMI Christine Lagarde avait alors menacé le pays d'un «carton rouge», s'attirant les foudres de Buenos Aires.

Stigmates

Arrivé au pouvoir en décembre dernier, Mauricio Macri veut désormais refermer ce chapitre en s'engageant à ouvrir son économie et en multipliant les gestes de bonne volonté, dont le remplacement du patron de l'institut argentin de statistiques. «Nous voulons redevenir un pays normal», martèle le dirigeant. Le changement de cap n'est pas passé inaperçu au FMI.

«Les mesures macro-économiques qui sont définies par les nouvelles autorités en Argentine sont très encourageantes», a déclaré Mme Lagarde début février, se félicitant notamment de l'engagement en faveur de «données économiques transparentes». Buenos Aires a accompli un nouveau geste d'apaisement en s'engageant à accepter de nouveau les audits annuels du FMI et en autorisant la publication lundi de rapports informels établis par l'institution sur son économie.L'Argentine, affaiblie comme d'autres pays émergents par la chute des cours des matières premières, «n'a pas d'autre option vu sa situation économique», assure Mark Jones, expert de l'Amérique latine au Baker Institute for Public Policy. Mais ce rapprochement servirait également les intérêts du FMI, en lui permettant d'affiner sa surveillance économique de la région et, à terme, de se débarrasser de l'image d'une institution «intransigeante et inhumaine», comme le disait Mme Lagarde en juin 2015. «Cela prendra du temps, mais si le Fonds vient en Argentine pour mener une assistance technique et aider le pays, ce serait un super coup de relations publiques pour le FMI», analyse Mme De Bolle, aujourd'hui experte au Peterson Institute. Une assistance financière qui est, elle, conditionnée à la mise en oeuvre de réformes économiques, semble en revanche exclue pour le moment et rappellerait trop de mauvais souvenirs dans le pays, selon les experts.

«Le problème est que le FMI continue de porter les stigmates du passé», assure M. Talvi, même si les circonstances peuvent tout chambouler. «Parfois ce qui est politiquement impossible devient politiquement inévitable», conclut-il. 

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