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L'ubérisation, un concept qui change notre rapport au travail

L'ubérisation du marché du travail est une réalité qui a pris de l’ampleur suite à la montée en puissance d’un management plus agile, flexible et collaboratif. Ce nouveau modèle est en train de redéfinir notre rapport au travail et plus particulièrement pour le salarié, premier concerné par cette évolution. Le point avec Ali Serhani, directeur associé Gesper Services.

L'ubérisation, un concept qui change notre rapport au travail
Le premier concerné par l'ubérisation reste le salarié.

Éco-Conseil : L’ubérisation du marché du travail, de quoi s'agit-il au juste ?
Ali Serhani : De prime abord, il faut dire qu’au Maroc une certaine forme d’ubérisation a toujours existé, mais dans le «noir», donc sans aucun cadre juridique. Une personne est pluriactive dans divers domaines, mais dans l’illégalité. La seule différence c’est qu’aujourd’hui de par le monde on associe à ce terme les technologies de l'information et de la communication (TIC), avec l’expansion du numérique, et les plateformes en ligne et que le tout est légal. Cependant, laissons de côté les TIC et prenons ce terme au sens large. L’ubérisation du travail consiste en l’exemple suivant : une personne donnée travaillera en free-lance pour le compte de plusieurs employeurs. Dès que le travail est fini, elle est payée et cela s’arrête là (pas de contrainte pour l’employeur) et tout le monde est content, sauf que cela présente des désavantages pour le salarié ou l’employé, car pas de prestations sociales, pas de retraite et malheur à lui s’il tombe malade. Aucun filet social. Quand on parle d’ubérisation, on pense aux TIC, à l’économie collaborative, au partage des compétences, au nomadisme dans l’emploi et enfin au mot magique : la flexibilité. Voici les mots qui reviennent souvent lorsqu’on utilise ce terme. Partage tout simplement parce que la personne fera beaucoup de travaux à droite et à gauche chez différents employeurs sans être reliée à aucun d’eux, avec les conséquences que cela peut avoir. Nous parlons donc d’un nouveau modèle économique. En deux mots ubérisation = fléxibilité.

Comment l'ubérisation révolutionne-t-elle le marché du travail ?
Au risque de me répéter, tout simplement en instaurant une flexibilité sans contrainte ni charges sociales pour l’employeur. Ce dernier n’a pas envie de se prendre la tête à payer des charges, car il considère qu’il ne sait pas de quoi demain sera fait. Et il y a toujours cette épée de Damoclès de la maîtrise des coûts et donc de l'optimisation, chère aux financiers et aux chefs d’entreprise.

Quelles conséquences l'ubérisation aura-t-elle sur l’emploi ?
Le premier concerné reste le salarié, car il n’a ni couverture sociale ni retraite, sauf si c’est une personne prévenante qui va éviter de travailler au noir, acquiert une patente, adhère à la CNSS, prévoit un plan de retraite avec une compagnie d’assurances.

Pensez-vous que l’ubérisation du marché du travail soit une réponse au chômage de masse ?
Oui en partie, car nous n’avons pas le choix. Pour moi, tout ce qui peut atténuer le chômage dans la légalité est le bienvenu.
Je ne me préoccupe pas de trop rentrer dans les détails, car, comme le dit si bien l’adage marocain, «Il vaut mieux voir flou qu’être aveugle». Regardez autour de vous, plusieurs milliers de diplômés (bac+4 et bac+5) sur le marché du travail et la majorité sont des chômeurs. Comment pouvez-vous expliquer que des ingénieurs de grandes écoles comme l’École Mohammadia des ingénieurs et d'autres puissent chômer pendant plus d’une année et parfois jusqu’à deux ans ? Cela est inconcevable.
Oui, pour ma part, l’ubérisation du marché du travail, si elle est bien gérée et cadrée, constitue une réponse au chômage. Pour moi, mieux vaut s’occuper que de se tourner les pouces. Prenons l’exemple actuel du système instauré par l’État dit de «l’auto entrepreneur», c’est un système extraordinaire, je vois autour de moi des personnes comme des informaticiens qui n’ont pas trouvé de boulot, mais qui se débrouillent très bien. Ils ont souscrit à ce régime et s'en sortent bien. Ils travaillent pour plusieurs employeurs, fournissent des factures et se portent bien.
Il est vrai qu’ils sont limités dans ce régime par un plafond de facturation, mais disons-le encore une fois, il vaut mieux voir flou qu’être aveugle. Donc tout ce qui peut atténuer le chômage est une bonne chose.
Devant cette précarité de l’emploi, aussi bien au Maroc qu’à l’international, c’est aux individus de savoir ce qu’ils veulent. Aide-toi et le ciel t’aidera !

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