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La pénibilité, un facteur à prendre au sérieux

La pénibilité au travail se caractérise essentiellement par les risques professionnels auxquels peuvent être exposés les salariés. Veiller à offrir de meilleures conditions de travail devient de plus en plus une des priorités des dirigeants. Située au cœur de la stratégie sociale des entreprises, la pénibilité au travail est un facteur clé régi d'abord par la loi et qui doit être pris en compte par les managers. Quelles sont les raisons qui font que la pénibilité au travail persiste ? Et quelles solutions pour au moins assouplir les conditions de travail ? Le point avec Abderrahim Hajji, psychologue et coach consultant.

La pénibilité, un facteur à prendre au sérieux
Les travaux pénibles usent les ressources physiques et mentales de l’homme et consument les potentiels de la personne sur la durée.

Éco-Conseil : Quelles sont les raisons qui font que la pénibilité au travail persiste ?
Abderrahim Hajji : Dans l'environnement de l'entreprise, plusieurs raisons peuvent expliquer une certaine résistance aux facteurs de pénibilité au travail. J'en cite quelques-uns :
• Une conception managériale dominante et malheureusement courante qui dit que c’est normal que
le travail soit pénible et aliénant à des degrés divers, alors qu’il devrait être naturellement épanouissant.
• De nombreuses activités professionnelles qui sont intrinsèquement pénibles en liaison avec les spécificités du poste ou du métier et que l’homme n’arrive pas à remplacer totalement ou partiellement par la machine, la robotique ou l’intelligence artificielle.
• De nombreux propriétaires et dirigeants d’entreprise ne se préoccupent pas ou peu de la santé et de la protection de l’intégrité physique et mentale de leurs ressources humaines. Ce constat concerne tous les secteurs, public, privé, coopératives et ONG nationales et internationales. Il y a beaucoup de dirigeants qui gèrent leur entreprise sans se soucier des conditions de travail des salariés.
• Très peu d’entreprises disposent de médecins et encore moins de psychologues du travail ou d’ergonomes spécialisés et missionnés sur la gestion des risques psychosociaux et des
travaux nocifs.
• Les services publics directement concernés, comme les services d’inspection du travail ou les services d’hygiène, sont très peu dotés des ressources humaines et matérielles nécessaires pour accomplir convenablement leurs missions.
• Dans l’agenda des décideurs politiques et du législateur, la pénibilité ne figure pas parmi les priorités.
• L’influence des organisations directement concernées, comme les associations patronales, les syndicats et les associations professionnelles, n’est pas encore suffisante. Le développement de la responsabilité sociale des entreprises est encore au stade des balbutiements
au Maroc.

Quelles solutions pour au moins assouplir les conditions de travail ?
Chaque manager doit mettre en tête de ses priorités des stratégies pour revoir les conditions de travail pénibles de ses collaborateurs, il en va de la pérennité et de l'image de marque de l'entreprise. Ainsi, il faut qu’il y ait d’abord une prise de conscience chez les dirigeants concernés par ce problème que la productivité et le rendement sur les moyen et long termes sont tributaires des conditions de travail.
Les travaux pénibles usent les ressources physiques et mentales de l’homme et consument les potentiels de la personne sur la durée.
Par ailleurs, il est nécessaire de promouvoir les démarches préventives en procédant à des sondages, des évaluations et des diagnostics ergonomiques pour identifier les solutions techniques, organisationnelles et managériales qui peuvent réduire les nuisances et les risques professionnels au travail. Le manager doit également veiller à compenser équitablement les collaborateurs concernés : reconnaissance des dommages causés, salaires, primes, couvertures sociales, réduction du rythme et du temps de travail, retraite proportionnelle au degré de nuisance physique et mentale.

Que pensez-vous des idées qui prônent la robotisation comme remède efficace à la pénibilité ?
Oui, quand c’est possible. C’est la tendance dans l’évolution du travail, depuis la création de la machine à l’ère de la robotique et du développement de l’intelligence artificielle embarquée. Cette tendance est en plein essor dans beaucoup de secteurs. Cependant, il ne faut pas oublier que la robotisation quand elle se substitue au travail humain peut aussi engendrer la perte d’emploi de beaucoup de travailleurs. Les robots, pour des raisons de rentabilité, sont souvent produits pour remplacer les emplois massifs à forte charge sociale. Oui, la robotisation peut conforter le travail humain, mais elle peut aussi être source de stress, voire de déchéance, pour les travailleurs, s’il n’y a pas d’alternative de reconversion et de redéploiement des ressources humaines dans les organisations. Ce dilemme, in fine, relève aussi de la responsabilité sociale des entreprises.

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