Fête du Trône 2004

L'Onu exige la destruction

● «Le Conseil de sécurité mérite enfin son nom», Laurent Fabius

Le Conseil de sécurité a adopté une résolution, sa première sur la Syrie depuis le début du conflit, qui contraint le régime d’Assad à détruire la totalité de ses armes chimiques en moins d'un an. (Photo : lci.tf1.fr)

28 Septembre 2013 À 08:41

Le Conseil de sécurité de l'Onu a adopté vendredi une résolution, sa première sur la Syrie depuis le début du conflit, qui contraint le régime de Bachar Al-Assad à détruire la totalité de ses armes chimiques en moins d'un an.

«Ce soir, la Communauté internationale a rempli sa mission», a commenté le secrétaire général de l'Onu, Ban Ki-moon, à l'issue du vote à l'unanimité de ce texte. «C'est le premier signe d'espoir en Syrie depuis longtemps», a-t-il ajouté, annonçant par ailleurs la tenue mi-novembre à Genève d'une conférence de paix sur la Syrie.

«Le Conseil de sécurité mérite enfin son nom», a affirmé le chef de la diplomatie française, Laurent Fabius.

Cette résolution fait suite à l'accord conclu à Genève mi-septembre afin d'éviter une intervention militaire en Syrie, une menace brandie par Washington et Paris en réponse à une attaque à l'arme chimique le 21 août. «La fermeté a payé», a estimé Fabius en rappelant cette menace. «La coopération de la Syrie devra être inconditionnelle, la transparence totale».

Le Président américain Barack Obama a qualifié vendredi «d'énorme victoire pour la communauté internationale» l'accord sur cette résolution obtenu jeudi, à l'issue d'âpres négociations, entre Washington et Moscou, fidèle allié de Damas.

Pour le secrétaire d'Etat américain John Kerry, c'est l'occasion d'«éliminer un des plus grands arsenaux chimiques du monde, dans une des régions les plus instables du monde». Mais il y aura des «conséquences» pour le pouvoir syrien s'il ne respecte ses engagements, a-t-il prévenu.

La résolution prévoit dans ce cas la possibilité pour le Conseil de prononcer des sanctions mais elles ne seront pas automatiques: il faudra une deuxième résolution, ce qui laisse à Moscou une possibilité de blocage.

Le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov a bien insisté: il faudra «prouver à 100 pour cent» que Damas ne joue pas le jeu et les sanctions devront être «proportionnelles» aux violations. Moscou avait bloqué trois résolutions précédentes pour protéger son allié syrien.

Ulcéré que la France ait organisé jeudi à l'Onu une réunion de soutien à l'opposition syrienne qui avait fait salle comble, l'ambassadeur syrien Bachar Jaafari a dénoncé «l'amateurisme» de la diplomatie française.

La révolte contre le régime Assad, qui a débuté en mars 2011 et s'est transformée au fil des mois en guerre civile, a fait plus de 100.000 morts.

Sur le terrain, au moins 30 personnes ont été tuées et des dizaines d'autres blessées vendredi dans un attentat à la voiture piégée à Rankous, à 30 km au nord de Damas, a annoncé l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH). Neuf rebelles, une femme et un enfant ont aussi été tués dans un raid aérien contre le village de Hadir, dans la province d'Alep, selon la même source.

Inspection la semaine prochaineBan a annoncé vendredi son intention d'organiser «mi novembre» une conférence de paix sur la Syrie dite de «Genève 2».

Des contacts vont être pris en octobre et le médiateur de l'ONU en Syrie, Lakhdar Brahimi, fera le point des préparatifs fin octobre.

«Genève 2» doit réunir mettre autour de la même table des délégations du pouvoir syrien et de l'opposition pour tenter de former d'un commun accord un gouvernement de transition, en prélude à des élections libres. Mais elle a déjà été reportée plusieurs fois pour des divergences sur ses objectifs et sur les participants. «Si on veut mettre fin au massacre, avait rappelé Fabius peu avant le vote, il n'y a pas d'autre solution que de relancer le processus politique».

Le Conseil exécutif de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) avait validé vendredi dans la nuit à La Haye une feuille de route sur la destruction de l'arsenal chimique syrien. «Nous nous attendons à avoir une équipe sur le terrain en Syrie dès la semaine prochaine», a déclaré le porte-parole de l'OIAC, Michael Luhan.

Tous les sites répertoriés dans la liste remise par la Syrie le 19 septembre à l'OIAC devront avoir été inspectés au plus tard dans 30 jours. Si la Syrie ne respecte pas ce calendrier, qui prévoit la destruction complète de l'arsenal chimique d'ici à la mi-2014, l'OIAC pourra «soumettre le problème directement à l'attention» de l'Onu.

L'opposition syrienne s'est réjouie vendredi à New York de cette résolution. «Nous aurions aimé une résolution plus claire (...) nous en voulions un peu plus, mais nous pouvons nous en accommoder», a déclaré le président de la Coalition nationale syrienne Ahmad Jarba.

En ce qui concerne Genève 2, «nous voulons y être, mais le but de Genève doit être clair», a-t-il expliqué. «Il s'agit d'une transition vers la démocratie, cela ne doit pas être un dialogue sans fin avec le régime».

Téhéran souhaite participer à une conférence de paix et le fera «de manière active (..) pour le bien du peuple syrien», a déclaré son président Hassan Rohani au dernier jour de sa visite à New York.

Violente charge de l'ambassadeur syrien contre la France

L'ambassadeur syrien à l'Onu a dénoncé vendredi soir à New York l'amateurisme de la diplomatie française qui, selon lui, a commis «beaucoup d'erreurs» dans le dossier syrien.

L'ambassadeur Bachar Jaafari s'est montré particulièrement irrité par le fait que la France ait organisé jeudi, avec la participation du ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius, une réunion dans les bâtiments de l'Onu avec l'opposition syrienne, qui avait fait salle comble.

Le président de la Coalition nationale syrienne Ahmad Jarba s'y était notamment longuement exprimé, évoquant la situation humanitaire dans son pays.

Par cet événement, «la diplomatie française agit de façon plus amatrice que professionnelle», a déclaré l'ambassadeur après le vote, par le Conseil de sécurité, d'une résolution encadrant la destruction de l'arsenal chimique syrien. «Je conseille aussi au ministre français des Affaires étrangères de lire la résolution avec attention», a poursuivi l'ambassadeur syrien.

«En lisant la résolution, le ministre conclura qu'à partir de maintenant, ni lui ni son pays ne seront autorisés à violer la provision de cette résolution. Cette résolution interdit au gouvernement français d'inciter au terrorisme, d'inciter à la violence en Syrie. Elle interdit à Paris et au ministre des Affaires étrangères de contribuer à aggraver la situation militaire en Syrie en procurant des armes et un soutien politique» à l'opposition, a-t-il ajouté.

«La diplomatie française a commis beaucoup d'erreurs», a martelé l'ambassadeur. «Fabius au conseil de sécurité, il lisait son texte, il semble qu'il ne comprenait pas le sens de cette résolution», a-t-il ajouté, s'adressant aux journalistes après la réunion du Conseil de sécurité. Fabius lui a succédé quelques minutes plus tard.

«Le Conseil de sécurité mérite enfin son nom», a affirmé le ministre, commentant l'adoption de la résolution.

Cette résolution, la première passée par le Conseil depuis le début de la crise syrienne, «ne sauvera pas à elle seule la Syrie», a-t-il cependant ajouté en demandant une relance du processus politique par le biais de la conférence de paix de Genève 2 ,dont la tenue est prévue mi-novembre.

Projet de résolution

Voici les principaux points de la résolution sur les armes chimiques syriennes adoptée vendredi soir par le Conseil de sécurité de l'Onu (traduction non officielle).

 Le Conseil- «décrète que l'utilisation d'armes chimiques où que ce soit représente une menace pour la paix et la sécurité internationales».

- «condamne de la manière la plus ferme toute utilisation d'armes chimiques en Syrie, en particulier l'attaque du 21 août 2013, commise en violation des lois internationales».

● Plan de désarmement

Le Conseil- «avalise la décision du Conseil exécutif de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC), qui contient des procédures spécifiques pour la prompte destruction du programme d'armes chimiques de la République arabe syrienne (RAS) et la stricte vérification (de ce démantèlement de l'arsenal) et réclame son application pleine et entière de la manière la plus rapide et la plus sûre».

- «décide que la RAS devra appliquer la décision du Conseil exécutif de l'OIAC dans tous ses aspects» et qu'elle devra coopérer avec l'OIAC et l'ONU, notamment en accordant un «accès immédiat et sans entrave» au personnel chargé de l'inspection et du démantèlement de l'arsenal. Le Conseil demande à «toutes les parties en Syrie», y compris donc l'opposition armée, de «coopérer pleinement à cet égard».

Des Etats membres pourront contribuer au démantèlement de l'arsenal syrien en «acquérant, inspectant, transportant et détruisant» des armes chimiques.

 ● Verification 

Le Conseil- vérifiera «régulièrement» le respect par Damas de ses engagements de désarmement. Le secrétaire général de l'Onu et le directeur général de l'OIAC feront rapport au Conseil «dans les 30 jours (suivant l'adoption de la résolution) et chaque mois par la suite», et signaleront également chaque violation.

- «décide, en cas de non-respect de cette résolution, notamment le transfert non autorisé d'armes chimiques ou toute utilisation d'armes chimiques par quiconque en Syrie, d'imposer des mesures sous chapitre 7 de la charte de l'Onu».

● Justice

Le Conseil- «exprime sa conviction profonde que les individus responsables de l'utilisation d'armes chimiques en Syrie devraient rendre des comptes».

● Non-proliferation

Le Conseil- demande que tous les Etats membres s'abstiennent d'aider des «acteurs non-étatiques» -c'est-à-dire des groupes armés d'opposition- à se procurer des armes chimiques ou biologiques et signalent «immédiatement» au Conseil toute tentative de ces groupes pour s'en procurer. Ce paragraphe concerne «en particulier les pays voisins» de la Syrie.

● Conférence de Genève

Le Conseil- «avalise pleinement le communiqué de Genève du 30 juin 2012 (sur la transition politique en Syrie) qui prévoit (..) l'instauration d'un gouvernement de transition exerçant tous les pouvoirs exécutifs». Ce gouvernement, composé de membres du gouvernement actuel et de l'opposition, devra être formé «par consentement mutuel». Le communiqué de Genève est annexé à la résolution.

- «appelle à convoquer dès que possible une conférence internationale sur la Syrie pour appliquer le communiqué de Genève» et invite pouvoir et opposition à y envoyer des représentants. Les participants devront être «pleinement représentatifs» et s'engager à appliquer le Communiqué de Genève». 

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