Menu
Search
Vendredi 29 Mars 2024
S'abonner
close
Vendredi 29 Mars 2024
Menu
Search
Accueil next Fête du Trône 2004

«Il faut un juge mondial»

● «La dégradation croissante de la biodiversité mondiale et l’exploitation excessive des ressources naturelles appellent plus que jamais à la mise en place de mesures effectives à l’échelle internationale»
● «Tous les dispositifs nationaux ont besoin d'être complétés par un véritable droit international de l'environnement et des institutions puissantes qui puissent les mettre en œuvre», Ahmed Alami, ancien ministre marocain de la Santé et membre-fondateur de l'AME-DIE et président du PEDD

«Il faut un juge mondial»
«La création d'une Cour pénal internationale de l'environnement parait être la voie à suivre dans ce sens», a souligné Ahmed Alami. Ph : Yannick Monget - www.symbiom.org

Des dirigeants internationaux, des juristes et des anciens ministres de l'environnement et de la santé ont appelé, jeudi à Bruxelles, à la création d'une Cour pénale internationale pour l'environnement et la santé (CPIE) qui aura pour but ultime de reconnaitre la catastrophe environnementale comme crime contre l'humanité.

Organisés dans le cadre de l'Association des anciens ministres de l'environnement et dirigeants internationaux pour l'environnement (AME-DIE) et soutenus par de nombreuses fondations et associations actives dans le domaine, ces responsables de différents pays et horizons ont souligné qu'au-delà de la reconnaissance du «crime environnemental», la création de la CPIE permettrait d'obtenir une protection effective internationale des écosystèmes.

Ils ont, ainsi, décidé de passer des paroles à l'action en adressant des correspondances au secrétaire général des Nations unies, Ban Ki Moon, au président de la Commission européenne, Manuel Barroso et au président du Conseil européen Herman Van Rompuy pour demander leur appui à cette initiative et pour entreprendre toute démarche utile pour répertorier les différentes urgences environnementales de la planète, avec une attention particulière pour la protection de la santé et pour les problèmes scientifiques et technologiques y afférents.

La rencontre de Bruxelles a été aussi l'occasion pour inviter la société civile à soutenir une initiative visant à reconnaitre par l'Onu et les Etats le principe pollueur-payeur comme un principe juridique de valeur universelle et sanctionnable, à réparer le préjudice écologique et à introduire une véritable protection juridique et juridictionnelle des ressources. 

Pour Ahmed Alami, ancien ministre marocain de la Santé et membre-fondateur de l'AME-DIE, «tous les dispositifs nationaux ont besoin d'être complétés par un véritable droit international de l'environnement et des institutions puissantes qui puissent les mettre en œuvre».

«La création d'une Cour pénal internationale de l'environnement parait être la voie à suivre dans ce sens», a souligné Ahmed Alami, qui est également président du Parti de l'environnement et du développement durable (PEDD), ajoutant qu'il est impératif, pour défendre un développement réellement soutenable, de disposer de tous les moyens juridiques nécessaires, qui doivent être à la mesure des problèmes environnementaux qui ne connaissent pas de frontières.

Pour défendre cette idée et démontrer la pertinence de la création d'une Cour pénale internationale pour l'environnement, il serait bien utile de se focaliser sur des thématiques environnementales bien précises et multiplier les actions notamment envers les puissances internationales et les 15 Etats membres du Conseil de sécurité, a-t-il dit.

Rebondissant sur ce point, l'eurodéputée Corinne Lepage, présidente de l'AME-DIE, a souligné que c'est pour que l'appel à la création de cette Cour ne restera pas lettre morte qu'un ensemble d'acteurs environnementaux, de fondations, d'académies et de juristes de différents continents sont impliqués dans cette initiative.

«L'idée est de rassembler les initiatives déjà existantes et d'utiliser le réseau d'une soixantaine d'anciens ministres de l'environnement, membres de l'association, pour mobiliser la société civile et les gouvernements derrière de projet», a-t-elle dit. 

Le choix d'une bonne méthodologie pour expliquer l'intérêt d'une telle institution juridique est crucial, a estimé de son côté l'Italien Jakob Tarfusser, de la Cour pénale internationale, pour qui la création d'une CPIE nécessite l'élaboration d'une véritable feuille de route.

«Il faut réfléchir entre autres à une définition précise de la notion de crime environnemental, aux différents aspects répressifs, aux règles procédurales, aux moyens d'exécution», a-t-il expliqué, ajoutant que la gestion des questions politiques doit aussi figurer parmi les axes d'action.

Un avis soutenu par l'ancien président de l'ex-Union soviétique et président de l'ONG environnementale «la Croix verte internationale», Mikhail Gorbachev, qui a souligné dans un message aux participants à cette conférence l'importance de mettre en place un cadre juridique fort régissant les questions liées l'environnement, notant que des institutions comme un tribunal pénal européen et une Cour pénale internationale de l'environnement et de la santé pourraient jouer un rôle capital dans lutte contre 'la délinquance environnementale».

«Il nous faut aussi une Pérestroïka pour l'environnement et une transformation de notre modèle de développement économique pour mettre fin à cette dégradation de l'écosystème planétaire et à la surexploitation des ressources naturelles», a-t-il ajouté. 

Le président de la Fondation supranationale pour la justice environnementale (SEJF) et de l'Académie internationale des sciences de l'environnement, Antonino Abrami, a également défendu l'idée de la mise en place d'institutions internationales capables de statuer sur les infractions environnementales, notant que la SEJF a toujours cru que des instances de ce genre constituent des outils essentiels pour parvenir à une justice environnementale effective.

Le représentant du Tribunal international de conscience de la nature et de l'environnement, Alfrédo Pena-vega, a dit également partager la nécessité de pouvoir créer à moyen ou à long termes une instance internationale qui puisse «pénaliser» les crimes environnementaux commis notamment par les organisations, les firmes multinationales et les Etats, dans le but de sauver la planète des désastres écologiques, relevant que le soutien qu'apporte tant d'ONG influentes à cette idée permettra à l'appel de Bruxelles d'avoir plus de résonnance et d'impact politique à l'échelle mondiale.

Enfin, Graham Watson, vice-président de Globe UE au Parlement européen, a indiqué que son organisation, qui regroupe des députés de plus de 70 pays, a mené une campagne dans le but de créer un tribunal pénal international pour l'environnement partant de sa conviction que l'environnement est une ressource très fragile et de la nécessité de disposer d'institutions de gouvernance mondiales pour garantir une meilleure protection de l'environnement.

«La création de ce tribunal n'est que la première étape en vue d'une plus grande prise de conscience mondiale de la responsabilité commune qui incombe à tout un chacun pour la protection de la planète», a-t-il conclu.

Créée en 2010, l'AME-DIE a vocation à réunir tous ceux qui ont occupé des fonctions ministérielles ou équivalentes dans le domaine de l'environnement, pour qu'ils mettent en commun leurs expériences pour défendre un développement réellement soutenable, valoriser les efforts de lutte contre le changement climatique, promouvoir une protection efficace de la biodiversité, et mener une politique de prévention des menaces pesant sur la santé publique. 

Lisez nos e-Papers