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Contentieux électoral : Voilà pourquoi les recours auprès de la Cour constitutionnelle ne cessent de baisser

Depuis 1997, le nombre de recours pour contentieux électoraux ne cesse de baisser. En effet, si le nombre des requêtes déposées auprès de la Cour constitutionnelle a été de l’ordre de 338 en 1997, il est passé à 205 en 2002, 214 en 2007, 170 en 2011, 136 en 2016 pour tomber à 62 en 2021. Adil Moussebbih, spécialiste du contentieux électoral et auteur d’une étude comparative, intitulée «Le contentieux électoral dans la jurisprudence du Conseil constitutionnel marocain» (éditions l’Harmattan), estime que cette tendance baissière serait en lien avec la nature de la pratique électorale qui a gagné en maturité au fil des années. Dans le passé, il y a eu des recours quasi systématiques traduisant un climat de contestation et de remise en question des résultats des suffrages, explique cet expert qui évoque «l’imperfection ou la mauvaise assimilation du droit électoral» à l’époque. Mais cette lecture seule n’expliquerait pas le faible nombre des contentieux électoraux en 2021. Décryptage.

Contentieux électoral : Voilà pourquoi les recours auprès de la Cour constitutionnelle ne cessent de baisser
L’une des principales attributions du juge constitutionnel est de garantir la sincérité du scrutin. Ph. Saouri

À travers un communiqué concis, la Cour constitutionnelle a informé l’opinion publique du dépôt de 62 requêtes contestant, dans 41 circonscriptions locales et 3 circonscriptions électorales régionales, les élections législatives du 8 septembre. Ces recours contestent l’élection de 68 députés. Un chiffre qui demeure faible par rapport aux élections précédentes. En effet, il n’y a pas de commune mesure entre les 62 recours déposés en 2021 et les 163 déposés au lendemain des élections de 2016, et qui ont concerné 75 circonscriptions électorales. Ces chiffres avancés par la Cour invitent, selon les spécialistes, à en déchiffrer la signification et en analyser la portée.
Une première lecture va dans le sens que le scrutin s’est déroulé dans de bonnes conditions, puisque le volume des contestations exprimées par les candidats et les formations politiques reste minime. Mais une autre lecture pourrait interpréter ces chiffres bas comme l’expression d’un manque de confiance dans les sentences de la Cour constitutionnelle. Dans ce sens, les défenseurs de cette lecture seraient tentés de rappeler le cas du Parti de la justice et du développement (PJD), qui avait déposé un recours pour inconstitutionnalité pour contester les amendements de la loi organique relative à la Chambre des représentants concernant la question du quotient électoral, un recours qui n’a pas eu une suite favorable de la part de la Cour constitutionnelle. Pour eux, le peu de recours portant sur des contentieux électoraux serait une position politique qui traduit un manque de confiance dans les institutions.

Selon Adil Moussebbih, spécialiste du contentieux électoral et auteur d’une étude comparative parue aux éditions L’Harmattan sous le titre «Le contentieux électoral dans la jurisprudence du Conseil constitutionnel marocain», certes, le chiffre (62 recours) est discutable, mais il faut savoir, explique-t-il, que le contentieux électoral est soumis à des règles précises, parfois complexes et qui sont souvent mal connues par les électeurs et même par les candidats aux élections. «Il faut dire que le nombre réduit des recours est dû d’abord à la défaite fracassante du PJD, face à trois partis qui ont obtenu une majorité écrasante. Ce revers cuisant a conduit à une sorte de réaction abstentionniste de la part des candidats qui ont préféré ne pas déposer de recours. C’est la première lecture», analyse-t-il. Adil Moussebbih avance toutefois une deuxième lecture qui serait en lien avec la nature de la pratique électorale qui était, avant 2011, en cours de construction et qui arrive à une certaine maturité de la part des candidats et des formations politiques. «On peut parler aujourd’hui d’une bonne assimilation du droit électoral, d’une culture démocratique et d’une maturité des acteurs politiques. Une prise de conscience positive qui stimule la promotion de la transparence, de la liberté et de la probité du processus électoral. C’est vrai, il y a eu des infractions, mais c’est la Cour qui va en déterminer la nature et la typologie. Il faut souligner aussi qu’il y a eu des infractions qui ont été commises, mais qui n’ont pas fait l’objet de saisine, parce qu’elles ont été jugées comme mineures...», explique-t-il.

Pour étayer ses propos, Adil Moussebbih retrace l’évolution du nombre de recours déposés dans le cadre du contentieux électoral depuis 1997 jusqu’à aujourd’hui. Puisant dans ses documents, il fait savoir à cet égard que le nombre des recours était de l’ordre de 338 en 1997, 205 en 2002, 214 en 2007, 170 en 2011, 136 en 2016 pour tomber à 62 recours en 2021. Pour ce spécialiste, la tendance à la baisse se confirme au fil des rendez-vous électoraux. Dans le passé, il y a eu des recours quasi systématiques, traduisant un climat de contestation et de remise en question des résultats des suffrages. Ceci s’explique, selon M. Moussebbih, par «la jeunesse de la pratique électorale, l’imperfection ou la mauvaise assimilation du droit électoral, les dysfonctionnements du pluralisme des courants, des idées et des opinions. De même, le nombre des candidats appartenant à des partis et des groupements politiques nouveaux, qui ne cessent de croître, y est également pour quelque chose». 


Contentieux électoral

L’une des principales attributions du juge constitutionnel est de garantir la sincérité du scrutin. En effet, ainsi que l’indiquent les constitutionnalistes, dans un État de droit, les contestations relatives aux élections relèvent d’un type de contentieux spécial que l’on qualifie de contentieux électoral et qui a pour objet de vérifier la régularité des actes et l’authentification des résultats de l’élection. L’objectif est d’éliminer tout acte ou tout comportement susceptible de porter atteinte à la liberté, à l’objectivité et à la sincérité du scrutin. «Le contentieux est donc consubstantiel aux élections tout comme l’élection le serait à la démocratie selon la célèbre formule de Jean Gicquel. Il purge, en effet, le scrutin de tous les vices susceptibles d’entacher la légitimité interne et internationale des élus. Ce contrôle est donc indispensable dans l’intérêt des candidats et des électeurs qui sont de plus en plus attachés à un contrôle rigoureux de ces opérations, afin que leur choix s’exerce dans des conditions suffisantes de liberté et de sincérité», écrit le spécialiste du contentieux électoral, Adil Moussebbih, auteur d’une étude comparative paru dans les éditions L’Harmattan sous le titre «Le contentieux électoral dans la jurisprudence du Conseil constitutionnel marocain» (NDLR, Conseil qui a été remplacé par la Cour constitutionnelle).

 

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