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Ismail Akalay : Informel, fraude sur la TVA, ventes au noir... les sidérurgistes interpellent le gouvernement

Les opportunités de développement de l’industrie sidérurgique, les problématiques du secteur et les défis des sidérurgistes pour maintenir la performance… Ismail Akalay, directeur général de Sonasid et président de l’Association des sidérurgistes du Maroc, apporte son éclairage sur les enjeux de ce secteur clé pour l’industrie nationale.

Ismail Akalay : Informel, fraude sur la TVA, ventes au noir... les sidérurgistes interpellent le gouvernement
Ismail Akalay, directeur général de Sonasid et président de l’Association des sidérurgistes du Maroc.

Interrogé premièrement sur la conjoncture au niveau national avec la suspension des liaisons aériennes et maritimes, le directeur général de Sonasid et président de l’Association des sidérurgistes du Maroc, Ismail Akalay, a souligné que «le Maroc a géré assez parfaitement la pandémie. En tant que chef d’entreprise, j’appuie totalement les décisions prises par le gouvernement pour protéger la population. Car, quand on voit la cinquième vague en Europe, il n’y a aucune raison de croire qu’on ne sera pas touché. Je pense que la suspension des liaisons a été une décision très sage afin de prendre le temps de voir comment les choses vont évoluer».

S’agissant de la question logistique et l’augmentation des prix de fret, l’invité de «L’Info en Face» a expliqué que «cette situation est beaucoup plus due à la hausse des prix du pétrole et une demande très forte sur les matières premières partout dans le monde. Les flux ont augmenté de manière considérable, donc non seulement le prix est élevé, mais on n’en trouve pas sur le marché». Une situation qui impacte l’entreprise directement, à cause de l’import de ferraille, car le marché domestique n’est pas suffisant. «Aujourd’hui, 40% de nos besoins en ferraille sont satisfaits par le marché local et 60% sont importés», a-t-il rappelé. Et de noter que les prix de ferraille importée ont augmenté de 30% par rapport à 2020. Ces prix se répercutent sur le prix du produit fini pour le consommateur, car les prix de ces composantes représentent, à peu près, 70% des charges des sidérurgistes, alors que la marge de bénéfices varie entre 2 et 3%. En termes de compétitivité, cette situation impose de travailler sur l’excellence opérationnelle, chose que le spécialiste marocain de la sidérurgie a décidé de faire.

«Il y a un travail important qui se fait pour réduire les coûts de production. Mais pour l’énergie électrique, par exemple, on n’y peut rien, il faut payer le prix qu’il faut ce qui n’est pas le cas pour nos concurrents de la Turquie qui bénéficient de subventions de l’État. Aujourd’hui, ce que nous demandons au gouvernement, c’est de mettre de l’ordre dans le marché pour combattre l’informel, la fraude sur la TVA et les ventes au noir», a-t-il revendiqué. Et de noter que la décision d’exonérer la ferraille de la TVA, récemment adoptée au Parlement, va permettre de diminuer la fraude sur ce produit-là.

Par ailleurs, Ismail Akalay a révélé que les sidérurgistes ont demandé au ministère de l’Industrie une prolongation des mesures de protection dans le secteur, qui arrivent à échéance à la fin de cette année, pour 18 mois supplémentaires. «Nous avons fait la demande à notre ministère pour bénéficier de 18 mois supplémentaires, selon les règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Quand ça s’arrêtera, les produits européens ne seront plus taxés, par contre pour les produits turcs, l’accord entre nos deux pays va nous permettre de bénéficier de l’augmentation des taxes à l’importation de cinq ans renouvelables une fois», a-t-il affirmé.

L’invité de «L’Info en Face» reste toutefois optimiste par rapport aux évolutions attendues sur le marché international. «D’abord, il faut remarquer qu’on enregistre une inflation importante dans les pays du Nord. On attend aussi le comportement de la Chine dans ce domaine, puisqu’elle produit un peu plus d’un milliard de tonnes d’acier, soit à peu près 50% de la production mondiale. La Chine est en train de prendre des décisions intéressantes pour le futur, par exemple la réduction d’exportation de produits d’acier semi-finis, notamment en raison des questions environnementales. Cela va permettre de libérer des parts de marché importantes sur le plan international», a-t-il précisé.

Le directeur général de Sonasid a souligné, dans ce sens, que son entreprise a opté pour l’utilisation de l’énergie verte, ce qui a un impact positif auprès des clients à l’étranger. «Aujourd’hui, 80 à 85% de l’énergie électrique que nous utilisons est d’origine éolienne. Nous avons pris la décision d’investir, à partir de l’année prochaine, dans le photovoltaïque pour pouvoir dépasser les 90%. Sonasid est la seule sidérurgie au Maroc à produire de l’acier vert, nous sommes pratiquement les seuls au monde à avoir un acier à 85% produit à partir des énergies renouvelables. Nos clients européens, notamment allemands, ont exprimé leur appréciation de notre démarche et de la qualité de nos produits», a-t-il assuré. Et d’ajouter que la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf) constitue une opportunité pour exporter le rond à béton marocain, par exemple, vers les pays du continent.

«Cette zone franche va permettre à ces pays d’exporter également leurs produits vers le Maroc. Lorsque vous avez un échange de marchandises, vous réglez une bonne partie de la logistique. Un conteneur qui revient vide n’est pas comme un conteneur qui revient plein. Cela va certainement encourager les entreprises à se lancer dans la logistique et créer une certaine dynamique commerciale entre le Maroc et les pays africains, qui peut être très intéressante», a-t-il indiqué.

Le responsable a également affirmé qu’il y a la possibilité d’aller chercher des possibilités à forte valeur ajoutée en investissant dans des produits beaucoup plus élaborés. «Sonasid a décidé d’investir, en moyenne, 200 millions de DH par an sur les cinq prochaines années. L’entreprise a investi, entre autres, dans un produit à très haute valeur ajoutée, qui s’appelle la fibre d’acier, qui peut être utilisée dans le domaine de la construction. Ainsi, nous allons produire, dans un premier temps, 20.000 tonnes de fibre d’acier par an. Quelque 80% de cette production sera exportée vers l’Amérique du Nord, mais cela va nous permettre aussi de le promouvoir sur le marché local, parce qu’il n’est pas encore utilisé ici. C’est un produit plus économique que le rond à béton, plus sûr et plus facile à mettre en œuvre». Et de noter que d’autres produits, qui peuvent être utilisés dans d’autres secteurs tels que l’automobile, sont appelés à se développer : «Nous sommes en cours de discussion avec le ministère de l’Industrie et Stellantis pour pouvoir produire pour l’industrie automobile marocaine l’acier long».

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