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Mardi 19 Mars 2024
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IT & télécoms : La recette pour attirer et pérenniser les compétences

Former plus, former mieux, reconvertir les profils techniques et faire du Maroc un hub régional attractif pour les compétences internationales. Telles sont les recommandations des participants à une autre Matinale du Cycle de conférences du Groupe Le Matin, organisée vendredi à Casablanca, en partenariat avec Intelcia IT Solutions, pour combler le déficit en profils dans les IT & télécoms dont souffrent ces secteurs.

Ce n’est plus à démontrer. Il y a un cruel manque d’ingénieurs et d’autres profils dans les IT & télécoms au Maroc. Pour leur part, les entreprises veulent recruter et fidéliser leurs salariés, mais elles peinent à y arriver. Et pour cause, la formation ne produit pas assez de profils dont une bonne partie choisit de s’expatrier tandis qu’une autre croule sous les offres d’emplois. Le reste des diplômés souffre d’un déficit de soft skills que le pays gagnerait à combler. Ce sont-là les principales conclusions issues de la deuxième d’une série de 4 conférences autour des IT et télécoms, organisée vendredi à Casablanca, par le Groupe Le Matin en partenariat avec Intelcia IT Solutions. Cette rencontre s’inscrit dans le cadre des Matinales Le Matin et avait pour thème «Les profils IT & Télécoms au Maroc, quels effectifs et quelles compétences ?»

Les offres d’emplois supérieures aux demandes

Face à cette pénurie, Intelcia IT Solution a, par exemple, dédié une douzaine de ses effectifs pour dénicher et recruter des talents IT. «Nous constatons 50% de désistement sur les offres d’emploi. L’année dernière, nous avons lancé une initiative de stage de fin d’études avec possibilité d’embauche. Nous avons reçu 50 jeunes issus d’écoles d’ingénieurs. Sur ce nombre, nous en avons retenu 40. Mais seuls 25 se sont présentés le jour de l’intégration», révèle Saad Berrada, directeur des Ressources humaines du Groupe Intelcia. En conséquence, l’entreprise se trouve en difficulté d’atteindre son objectif de passer de 250 à 1.000 salariés dans les IT d’ici 2025. Selon ce professionnel, il y a plus d’opportunités que d’ingénieurs et un lauréat reçoit, en moyenne, 4 à 5 offres d’emplois à sa sortie d’école. Quelle est la cause de cette inadéquation ?

Un nombre insuffisant de lauréats chaque année

La première cause est qu’il n’y a pas assez de profils issus des écoles et établissements de formation dans ces spécialités. L’offre actuelle compte 147 filières, dont 55% dans les écoles privées. Les Bac+5 constituent 67% des diplômés, les Bac+3 eux comptent pour 27%. Au terme de l’année scolaire 2019-2020, le Maroc a enregistré 7.658 lauréats dans les IT & télécoms, dont 28% seulement issus du public et pas plus de 1.000 ingénieurs. «Pour augmenter ce nombre, il faudrait mettre à profit les facultés pour former Masters et des ingénieurs dans ces spécialités», préconise Mohamed Tahiri, directeur de l’enseignement supérieur au ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. En effet, ces structures disposent d’un important vivier d’étudiants qu’il serait intéressant de reconvertir.

Cette reconversion est également possible au sein même des entreprises. «Nous avons beaucoup de profils avec des formations techniques qui occupent des postes qui n’ont rien à voir avec leurs formations initiales. Il est tout à fait possible de les pousser à se reconvertir». Mais cette reconversion a un coût que l’État peut aider à atténuer à travers des initiatives fiscales ou autres, s’accordent à dire les intervenants de cette Matinale.

Par ailleurs, «les acteurs de formation doivent adopter des politiques agressives de recherche et développement (R&D) et anticiper le profil d’ingénieur de demain. Ils doivent également rester à l’écoute des besoins des entreprises afin de leur fournir les profils qu’elles recherchent. Enfin, il est important de se doter d’observatoire des métiers pour identifier ceux du futur dont la demande va augmenter dans les prochaines années», recommande Kamal Daissaoui, président de l'EMSI et de la fédération de l'enseignement privé.

Un service minimum au Maroc pour les ingénieurs : une mauvaise idée

La deuxième cause de cette inadéquation est que sur le nombre réduit de lauréats de chaque année, un bon nombre préfère poursuivre sa carrière à l’étranger. Faut-il obliger les lauréats à travailler au Maroc pour une durée minimale avant de leur permettre de quitter le pays ? Les réponses des participants divergent ! Pour Mohamed Tahiri, former des ingénieurs est un investissement qu’il faut rentabiliser. Instaurer un «service minimum» est donc une nécessité. Ilham Berrada, directeur de l'ENSIAS-UM5R, n’est pas de cet avis. Pour elle, l’expérience acquise à l’étranger est aussi importante que celle développée au Maroc. «Charge à nous d’encourager la diaspora marocaine à revenir au bercail en lui proposant des projets attractifs», explique-t-elle. Idem pour Amine Khayatei qui recommande de créer un écosystème attractif capable d’attirer à la fois les compétences marocaines dispersées un peu partout dans le monde et les compétences des autres pays, notamment africaines. «Il serait intéressant de créer une Moroccan Tech semblable à la French tech, avec des programmes de visas familiaux ou de regroupement familial pour séduire les profils pointus issus d’autres pays. Car il est plus intéressant de séduire des profils pointus plus tôt que de les obliger à rester au Maroc», fait remarquer Khayatei.

Des ingénieurs qui ne savent pas se vendre sur le marché du travail

La troisième cause est que 57% des profils qui choisissent de ne pas s’expatrier ont du mal à intégrer le marché du travail, car ils ont des déficits en «soft skills», révèle Amine Khayatei, CEO de la startup KWIKS FRC, qui propose une plateforme de chasseurs de têtes. Pour y remédier, il suffirait d’introduire de petits ajustements dans le cursus de formation de ces profils qui leur permettraient de mieux se vendre sur le marché du travail. Ilham Berrada abonde dans le même sens. «Nous sommes pour la mise en place d’un référentiel qui permet de décliner chaque métier en compétences. De cette façon, nous pourrons répondre au mieux aux besoins des entreprises», conclut-elle. Il faut croire que l’approche diplôme est obsolète et qu’elle se fait remplacer progressivement par l’approche compétences. En plus de se vendre par un diplôme reconnu, délivré par une institution de renom, les lauréats doivent dorénavant mettre en avant aussi leurs compétences.

Lire aussi : Matinale sur les métiers de l'IT & Télécoms : Voici les déclarations des intervenants

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