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Cinéma international au Maroc: la lumière recherchée du septième art

L'histoire du cinéma au Maroc ne date pas d'aujourd'hui mais remonte aux origines du septième art. Pays de paix et de lumière, le Maroc révèle de plus en plus ses nombreux atouts pour le cinéma international.

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Le Maroc a toujours attiré le cinéma international par ses sites, sa lumière, l'une des plus belles du monde… L'histoire du cinéma avec notre pays commence avec le début du siècle dernier, et même avec les premières expériences cinématographiques qui ont suivi l'invention de l'image animée par les frères Lumière, à qui la lumière du Maroc n'a pas échappé. Ahmed Araib et Eric de Hullessen, co-auteurs de l'ouvrage de référence « Il était une fois… le cinéma au Maroc », y écrivent : « Sur les 1800 films enregistrés dans le monde entier et référencés dans le catalogue des frères, 60 titres sont consacrés à l'Afrique du Nord, parmi lesquels on trouve le singulier « Chevalier marocain »… ». Si durant les premières années 1900, ce sont plutôt les reporters cinématographiques qui tournent leurs caméras vers le Royaume chérifien et les événements qui s'y déroulent, il sera durant les années vingt la destination d'une ruée cinématographique, relate l'ouvrage. « Pas moins de quinze longs-métrages y sont tournés par des cinéastes venus d'Amérique ou d'Europe. Les lieux de tournage sont essentiellement Marrakech, Casablanca, Fès, Rabat, Meknès, Mogador, et bien sûr les régions montagneuses de l'Atlas. Des expéditions cinématographiques s'embarquent pour le désert. Les extérieurs réels exotiques acquièrent un prestige incomparable. Les producteurs et distributeurs de films ne rêvent que de films sahariens avec des caravanes de chameaux, des rangées de palmiers. Bref, c'est le pittoresque oriental qui se prête à toutes les fantaisies des metteurs en scène ».
Naissance d'une industrie du cinéma
Par la suite, le Maroc sera le théâtre d'importantes productions de plus en plus nombreuses, et de quelques chefs d'œuvres du septième art. Parmi le long répertoire de films internationaux tournés au Maroc, citons seulement « Othello » du géant de la caméra et de l'écran Orson Welles, Palme d'or à Cannes en 1952, ou encore « Lawrence d'Arabie » (1962) de David Lean, avec les prestigieuses stars Peter O'toole, Anthony Quinn et Omar Sharif. Les années 40 connurent en outre l'éclosion d'un cinéma national, « …un authentique cinéma marocain, l'accomplissement de structures professionnelles, ainsi que la création d'organismes privés et publics », lit-on dans « Il était une fois… le cinéma au Maroc ».
Pendant que le cinéma national se développait, les productions internationales n'ont cessé de se multiplier sur le territoire marocain, suscitant la création de studios et de sociétés de production, d'agences de casting…Sur le plan de la production marocaine, elle ne s'étend pas au financement mais prend en charge toute la logistique des tournages de films étrangers en fournissant le matériel, la figuration et leur gestion, en assurant le repérage des sites, etc. Tous les stades de la production sont préparés et menés à bien jusqu'à la commercialisation du film. Concernant les castings, la participation marocaine est représentée par des comédiens professionnels, de jeunes diplômés de l'école marocaine ISADAC (Institut Supérieur d'Art Dramatique et d'Animation Culturelle), ainsi que des figurants, quasi-professionnels du cinéma international. Les autres métiers artistiques ont tout autant proliféré, comme les costumières, les maquilleuses, les cascadeurs, etc…S'agissant des différents métiers de techniciens, ils se sont confirmés avec les années et l'expérience, si bien que nombre d'entre eux, sans être titulaires d'une carte professionnelle, sont connus et recherchés pour leur compétence.

Un pilier dans l'ombre

Tous les métiers du cinéma s'accomplissent avec un professionnalisme souvent acquis « sur le tas », dans ce pays où s'enracine une véritable culture du septième art. Il est un de ces métiers qui se trouve sans doute au sommet, artistique et complet, qui supervise tous les autres, animé par une grande passion, qui requiert une disponibilité infinie et une endurance soutenue, incontestable pilier du film, souvent exercé dans l'ombre : l'assistant-réalisateur. Mais il existe des assistants-réalisateurs de plusieurs « degrés » : le premier, le second, le troisième…
Personne ne peut mieux parler du cinéma international au Maroc qu'un de ces assistants-réalisateurs, parvenu au plus haut niveau (comme d'autres), par le truchement d'un travail acharné, d'une riche expérience auprès de géants de la mise en scène comme Zeffirelli, Rossellini, John Huston, Mustapha Akkad, Tony Scott, … Mais il n'est pas arrivé dans ce domaine par hasard, c'est une grande vocation qui l'y a mené. Titulaire d'un bac C (mathématiques) au milieu des années 60, Moustapha Sharif ne projette pas d'entreprendre des études supérieures mais prend le chemin à la fois le plus dur et le plus corsé, qui n'est pas tracé d'avance, qui devait se dessiner « sur le terrain », à travers l'aventure, le courage, les épreuves et l'expérience, la grande école de la vie, où il a forgé sa forte personnalité et sa propre école du cinéma. Il avait au-delà de tout la passion du cinéma, des voyages, du tourisme, et donna libre cours à sa vocation, déployant avec naturel et conviction ses potentialités. Il débute sa carrière en tant qu'assistant de production aux côtés de Michael Butler dans la comédie musicale «Hair». Il intègre par la suite le domaine de la mode américaine et anglaise, assistant de grands photographes tels que Tony Kent, Leonard Herman, etc…En même temps qu'il fera son entrée dans le septième art, il assiste la production et la réalisation de clips vidéo de grandes stars du show business comme les Rolling Stone, Paul Mc Cartney and the Wings, Joe Coker, Led Zepplin et d'autres… Il participe également à l'organisation de festivals artistiques internationaux tels que Asilah 1978. Il avait entamé sa carrière cinématographique internationale d'emblée avec des « monstres sacrés » ; en 1969 il assiste le réalisateur Gilles Pontecorvo pour « Quemada », avec Marlon Brando, tourné à Marrakech et à Ouarzazate. Suivra ensuite « Young Winston » de Richard AttlenBorough, puis « Two People », de Robert Wise, avec Peter Fonda (Marrakech et Paris). En 1973 Moustapha Sharif assiste Mustapha Akkad pour « Le Prophète Mohammed » avec une prestigieuse brochette d'acteurs occidentaux et orientaux tels Antony Quinn, Irène Papes, Hassan El Joundy, Mahmoud Saïd… Sa longue carrière qui continue toujours égrène près d'une centaine de films à ce jour en tant qu'assistant-réalisateur et directeur de casting auprès d'autres grands noms du cinéma, tels John Glen, Dick Richards, Warren Beaty, Martin Scorsese, Ridley Scott (« The gladiator's »), Tony Scott (« Spy game »), et la liste est encore longue.
La passion de Sharif pour le cinéma ne fait que s'attiser avec le temps et il livre de brillantes idées pour l'expansion du septième art au sein du Royaume.

Crise et reprise

Il s'émerveille pour les nouveaux créneaux, pour les jeunes talents qu'il soutient généreusement par ses conseils incessants. Sharif est un homme cultivé, d'une grande sympathie accompagnée d'humilité. « Les événements du 11 septembre 2001 avaient provoqué une grave crise au niveau de l'activité du cinéma étranger au Maroc, dit-il. Si bien que l'emploi dans ce secteur en a été durement touché pour plusieurs mois ». Il est à relever ici que tous ces métiers du cinéma qui gravitent autour de celui du cinéaste, et s'exercent épisodiquement au gré des tournages par recrutements ponctuels par les sociétés de production, font face à une précarité notoire en cas de crise et ne sont aucunement subventionnés par les organismes chargés de promouvoir et de soutenir le cinéma au Maroc. « Mais heureusement, la reprise a été évidente et salvatrice car le Maroc est indiscutablement un pays de paix, dit Sharif. Sur le plan des conditions de tournage, il ne faut pas nier qu'elles sont de plus en plus avantagées : des facilités administratives accrues en vertu d'une politique d'encouragement du secteur ; une diversité de techniciens avec des qualifications renforcées dans toutes les branches, …Au niveau des comédiens et de la figuration, notre pays offre un grand choix dont on peut être fiers, et une importante diversité de phénotypes». La classe d'un acteur né
Les acteurs marocains chevronnés ont démontré à plusieurs reprises qu'ils s'intègrent aisément dans les productions internationales. Quant aux jeunes générations, elles font preuve d'un talent certain et d'une adaptation spontanée. Sharif cite particulièrement le plus récent film d'envergure sur lequel il a travaillé, « Spy game » de Tony Scott, tourné à Casablanca, ou un jeune Marocain qui n'avait aucune expérience antérieure a eu une réelle présence aux côtés de l'illustre Robert Redford et de l'adulé Brad Pitt. Il s'agit de Mustapha Moulay, qui a joué le rôle d'un trafiquant d'armes libanais, qui a été remarqué pat Tony Scott lui-même dans un café-restaurant de la ville. Mustapha Moulay a immédiatement attiré l'attention du célèbre réalisateur, par sa puissance expressive, son regard vif aux reflets dorés d'où émane l'authenticité et une fierté naturelle. Il est révolté lorsque Tony Scott lui prend une photo sans lui demander son avis, ce qui ne fait que séduire davantage le metteur en scène.
« Au niveau de Marrakech, Ouarzazate et Erfoud, on peut commencer à parler d'une industrie du cinéma au Maroc, reprend Sharif. Il serait judicieux de créer des écoles de cinéma dans ces villes (pour l'instant il n'existe qu'une seule école, l'ISADAC à Rabat). La nouvelle génération marocaine recèle de fortes potentialités et demande à être prise en mains : revoir la situation économique des acteurs, leur offrir des possibilités de formation continue, notamment de cours de langues étrangères et de diction (en particulier pour l'anglais) ». Sharif étudie de nombreux projets dans ce sens, car il sait que le Maroc sera de plus en plus demandé. « Parmi les atouts de notre pays, nous pouvons tourner de nombreux autres pays : l'Afrique Noire, l'Afghanistan, le Liban, la Somalie, l'Inde, l'Amérique, l'Europe, l'Australie, …La grande variété des paysages et de sites extraordinaires est un des points forts. Nous avons aussi des artisans au fin doigté et pouvons réaliser les décors les plus somptueux. Tous les métiers du cinéma sont présents avec des avantages de coûts, de main d'œuvre, de transport (d'autant plus que les distances ne sont pas importantes), un choix de prestataires de services, en matière d'éclairage, de son, de machinerie, etc. ». Il faudrait mettre au point plus d'outils d'information et de travail tels qu'un guide de cinéma qui existe déjà et Sharif donne l'idée d'un film documentaire qui présenterait tous les sites repérés du Maroc afin de mieux promouvoir le pays à l'étranger. « Il faudrait par ailleurs développer les partenariats et la co-production, cibler également les pays arabophones pour réduire les périodes creuses… », recommande Sharif.
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