Par ailleurs, elle a une implication encore plus grave sur la fixation du salaire minimum garanti. On estime alors que pour survivre, c'est-à-dire manger à sa faim, il faut tant de Dirhams. Cela donne le SMIG actuel de 1600 DH. Si le ménage comporte 5 personnes on est forcément pauvre puisqu'on est en dessous du seuil fatidique de 1828 DH. C'est la pauvreté légalisée en quelque sorte. Si par contre nous tenons en compte l'ensemble des besoins humains, nourriture, habillement, logement, éducation, santé, formation, loisirs, on aura d'autres conclusions.
Le fond du problème
La politique sociale telle qu'elle est appliquée ne peut mener qu'à plus de pauvreté parce que les revenus évoluent en sens inverse de l'évolution du coût de la vie. A cinq par la famille on vit certainement moins bien qu'à quatre ou trois. Une véritable politique non pas des salaires mais des revenus, est nécessaire. Elle devrait conduire à la revalorisation des allocations familiales qui sont de 150 DH par mois actuellement, soit 5 DH par jour. Pourquoi faire ? la nourriture d'un enfant nécessite plus que ce montant dérisoire. Tout dépend en fait de ce qu'on veut faire du citoyen marocain.
Aujourd'hui on invite les jeunes à voter. Soit! Pendant longtemps, depuis leur naissance, les plus pauvres d'entre eux, et ils sont nombreux, ont vécu dans la frustration, l'oubli le plus total, sans éducation, sans encadrement et sans orientation politique. Qu'est ce qu'on peut attendre d'eux ? Pas grand-chose, hélas ! Il faut le reconnaître.
Si on s'était intéressé à leur sort depuis longtemps, ils seraient les premiers à demander l'ouverture des listes électorales pour s'inscrire et voter en connaissance de cause et défendre leurs intérêts. Or ils ne savent absolument rien de leur véritable intérêt. C'est pour cela que la politique sociale devrait impérativement changer. On n'arrivera à rien en lançant de temps en temps des opérations de charité. Il faut une véritable politique non pas seulement sociale mais de société, impliquant l'économique, le social, le politique et le culturel.
Y a-t-il une solution ?
La détermination du SMIG devrait être fondée sur les besoins sociaux et non pas strictement physiologiques des citoyens. Les allocations familiales devraient être revues à la hausse pour couvrir un certain nombre de besoins vitaux pour le corps et l'esprit des enfants. Bien entendu, pour arriver à ces résultats, il faut rompre avec cette mentalité qui sévit chez certains décideurs qui cherchent uniquement à s'en sortir sans plus. Le choix de société ne se pense pas dans ces échéances mais sur le long terme.
Il est vrai qu'une telle orientation aura des conséquences sur les entreprises qui verront leur masse salariale augmenter. C'est la réalité, mais réfléchissons bien. Les entreprises marocaines font face à la concurrence internationale et, elles le reconnaissent elles-mêmes, elles ne sont pas bien outillées. Il est tout à fait significatif que les seules qui s'en sortent à l'export ne sont pas connues par leurs largesses envers leurs salariés. Le problème vient en fait de la politique poursuivie depuis longtemps et qui encourage une industrialisation de sous-traitance, laquelle dépend, comme chacun sait du niveau des coûts de production. Par contre, question transfert de technologie, il n'y a pas de gain extraordinaire, le sous-traitant ne réalise qu'une partie d'un ensemble, il ne saura jamais comment cet ensemble est fabriqué. Même dans le textile, le sous-traitant ne saura jamais rien sur les circuits commerciaux qui sont dans la plupart des cas les secrets stratégiques les mieux gardés. Il est clair que si on continue sur cette voie, on arrivera un jour ou l'autre à une situation de blocage.
La compétitivité par les prix est extrêmement ruineuse. C'est elle qui aboutit à la dévaluation monétaire laquelle n'est pas forcément toujours une bonne chose pour le pays, surtout lorsqu'il est lourdement endetté. Bref donc l'entreprise marocaine est très coûteuse. Parce que sa stratégie est purement basée sur la réduction des coûts justement. Elle est coûteuse pour la communauté, pas pour elle-même. Pour mettre en œuvre la politique de société dont il est question ici, il est nécessaire que les entreprises se libèrent de cette spirale infernale dans laquelle elles se sont enfermées. Le seul moyen d'y parvenir c'est d'encourager la recherche-développement. La guerre économique se fait par les coûts, la guerre stratégique, elle, se fait par l'innovation.
Rapprocher les échéances
Cela ne se fait pas dans le court terme, c'est pourquoi, il est impératif de commencer dès maintenant pour améliorer le sort des Marocains pauvres et moins pauvres d'ici une vingtaine d'année au moins. Chaque jour passé à ne rien faire éloigne cette échéance. On n'aura absolument rien fait. Les pauvres seront de plus en plus nombreux et les salaires de plus en plus insignifiants. Or, sans l'amélioration des conditions de vie des Marocains, il n'y a aucune solution à ce sous-développement chronique dans lequel le pays se dépêtre depuis toujours. Toutes les mentalités doivent changer, celles des entrepreneurs, celles des politiciens, celles des chefs de famille, celles des syndicalistes…Continuer sur la voie actuelle ne donnera aucun résultat. C'est absolument certain. Une rupture est nécessaire. Et pour commencer, le rythme de croissance doit impérativement s'accélérer.
Le gouvernement n'ignore certainement pas ces aspects, le problème est de savoir comment s'y prendre. Et c'est à ce niveau que commencent les divergences. Par exemple, posons la question suivante ? Faut-il encourager la consommation par des mesures fiscales ? On croit savoir que la consommation est un facteur de croissance dynamique et sûr. Ce n'est peut-être pas toujours aussi vrai. Car il faudra aussi se poser cette autre question : où ira la croissance ? Si la consommation porte plus sur les produits importés, il y a un grave problème.
Les importations augmenteront et il faudra, bien entendu, les financer. Comment ? C'est toute la question. Alors, peut-on au moins adopter une démarche sélective ? C'est-à-dire favoriser une certain consommation qui s'adresserait uniquement, ou du moins pour une grande part, aux produits locaux ? Si oui quelle catégorie de la population viser ? Les détenteurs de faibles revenus vont, dans le cas d'une amélioration de leurs revenus, augmenter leur consommation en produits de base dont la nouvelle demande augmentera les prix, surtout si les capacités et surtout la régularité de la production ne sont pas assurées. La sécheresse récurrente pousse plutôt à une vision très prudente.
Quant aux populations plus aisées, elles réserveront leur excédent de revenu à des produits de confort, au divertissement. Et aux voyages. Qui pourra les empêcher d'acheter des produits étrangers et de passer leurs vacances ailleurs ?
Personne. Sauf si le tourisme local est plus attractif, que les produits industriels sont compétitifs et si l'industrie du divertissement soit vraiment divertissante. Autrement dit, si la production locale n'arrive pas à accrocher les Marocains par l'innovation, le pays entier deviendra un consommateur à l'échelle de la planète. Il lui faudra trouver l'argent pour payer ses achats au reste du monde.
Est-ce qu'il pourra toujours compter sur les MRE, sur les phosphates et le tourisme ? Sur le court terme, peut-être, mais certainement pas sur le long terme. Finalement, la pauvreté (d'un pays, d'une population) est-elle une fatalité ? Elle doit sans doute l'être…Mais uniquement pour les fatalistes.
Le fond du problème
La politique sociale telle qu'elle est appliquée ne peut mener qu'à plus de pauvreté parce que les revenus évoluent en sens inverse de l'évolution du coût de la vie. A cinq par la famille on vit certainement moins bien qu'à quatre ou trois. Une véritable politique non pas des salaires mais des revenus, est nécessaire. Elle devrait conduire à la revalorisation des allocations familiales qui sont de 150 DH par mois actuellement, soit 5 DH par jour. Pourquoi faire ? la nourriture d'un enfant nécessite plus que ce montant dérisoire. Tout dépend en fait de ce qu'on veut faire du citoyen marocain.
Aujourd'hui on invite les jeunes à voter. Soit! Pendant longtemps, depuis leur naissance, les plus pauvres d'entre eux, et ils sont nombreux, ont vécu dans la frustration, l'oubli le plus total, sans éducation, sans encadrement et sans orientation politique. Qu'est ce qu'on peut attendre d'eux ? Pas grand-chose, hélas ! Il faut le reconnaître.
Si on s'était intéressé à leur sort depuis longtemps, ils seraient les premiers à demander l'ouverture des listes électorales pour s'inscrire et voter en connaissance de cause et défendre leurs intérêts. Or ils ne savent absolument rien de leur véritable intérêt. C'est pour cela que la politique sociale devrait impérativement changer. On n'arrivera à rien en lançant de temps en temps des opérations de charité. Il faut une véritable politique non pas seulement sociale mais de société, impliquant l'économique, le social, le politique et le culturel.
Y a-t-il une solution ?
La détermination du SMIG devrait être fondée sur les besoins sociaux et non pas strictement physiologiques des citoyens. Les allocations familiales devraient être revues à la hausse pour couvrir un certain nombre de besoins vitaux pour le corps et l'esprit des enfants. Bien entendu, pour arriver à ces résultats, il faut rompre avec cette mentalité qui sévit chez certains décideurs qui cherchent uniquement à s'en sortir sans plus. Le choix de société ne se pense pas dans ces échéances mais sur le long terme.
Il est vrai qu'une telle orientation aura des conséquences sur les entreprises qui verront leur masse salariale augmenter. C'est la réalité, mais réfléchissons bien. Les entreprises marocaines font face à la concurrence internationale et, elles le reconnaissent elles-mêmes, elles ne sont pas bien outillées. Il est tout à fait significatif que les seules qui s'en sortent à l'export ne sont pas connues par leurs largesses envers leurs salariés. Le problème vient en fait de la politique poursuivie depuis longtemps et qui encourage une industrialisation de sous-traitance, laquelle dépend, comme chacun sait du niveau des coûts de production. Par contre, question transfert de technologie, il n'y a pas de gain extraordinaire, le sous-traitant ne réalise qu'une partie d'un ensemble, il ne saura jamais comment cet ensemble est fabriqué. Même dans le textile, le sous-traitant ne saura jamais rien sur les circuits commerciaux qui sont dans la plupart des cas les secrets stratégiques les mieux gardés. Il est clair que si on continue sur cette voie, on arrivera un jour ou l'autre à une situation de blocage.
La compétitivité par les prix est extrêmement ruineuse. C'est elle qui aboutit à la dévaluation monétaire laquelle n'est pas forcément toujours une bonne chose pour le pays, surtout lorsqu'il est lourdement endetté. Bref donc l'entreprise marocaine est très coûteuse. Parce que sa stratégie est purement basée sur la réduction des coûts justement. Elle est coûteuse pour la communauté, pas pour elle-même. Pour mettre en œuvre la politique de société dont il est question ici, il est nécessaire que les entreprises se libèrent de cette spirale infernale dans laquelle elles se sont enfermées. Le seul moyen d'y parvenir c'est d'encourager la recherche-développement. La guerre économique se fait par les coûts, la guerre stratégique, elle, se fait par l'innovation.
Rapprocher les échéances
Cela ne se fait pas dans le court terme, c'est pourquoi, il est impératif de commencer dès maintenant pour améliorer le sort des Marocains pauvres et moins pauvres d'ici une vingtaine d'année au moins. Chaque jour passé à ne rien faire éloigne cette échéance. On n'aura absolument rien fait. Les pauvres seront de plus en plus nombreux et les salaires de plus en plus insignifiants. Or, sans l'amélioration des conditions de vie des Marocains, il n'y a aucune solution à ce sous-développement chronique dans lequel le pays se dépêtre depuis toujours. Toutes les mentalités doivent changer, celles des entrepreneurs, celles des politiciens, celles des chefs de famille, celles des syndicalistes…Continuer sur la voie actuelle ne donnera aucun résultat. C'est absolument certain. Une rupture est nécessaire. Et pour commencer, le rythme de croissance doit impérativement s'accélérer.
Le gouvernement n'ignore certainement pas ces aspects, le problème est de savoir comment s'y prendre. Et c'est à ce niveau que commencent les divergences. Par exemple, posons la question suivante ? Faut-il encourager la consommation par des mesures fiscales ? On croit savoir que la consommation est un facteur de croissance dynamique et sûr. Ce n'est peut-être pas toujours aussi vrai. Car il faudra aussi se poser cette autre question : où ira la croissance ? Si la consommation porte plus sur les produits importés, il y a un grave problème.
Les importations augmenteront et il faudra, bien entendu, les financer. Comment ? C'est toute la question. Alors, peut-on au moins adopter une démarche sélective ? C'est-à-dire favoriser une certain consommation qui s'adresserait uniquement, ou du moins pour une grande part, aux produits locaux ? Si oui quelle catégorie de la population viser ? Les détenteurs de faibles revenus vont, dans le cas d'une amélioration de leurs revenus, augmenter leur consommation en produits de base dont la nouvelle demande augmentera les prix, surtout si les capacités et surtout la régularité de la production ne sont pas assurées. La sécheresse récurrente pousse plutôt à une vision très prudente.
Quant aux populations plus aisées, elles réserveront leur excédent de revenu à des produits de confort, au divertissement. Et aux voyages. Qui pourra les empêcher d'acheter des produits étrangers et de passer leurs vacances ailleurs ?
Personne. Sauf si le tourisme local est plus attractif, que les produits industriels sont compétitifs et si l'industrie du divertissement soit vraiment divertissante. Autrement dit, si la production locale n'arrive pas à accrocher les Marocains par l'innovation, le pays entier deviendra un consommateur à l'échelle de la planète. Il lui faudra trouver l'argent pour payer ses achats au reste du monde.
Est-ce qu'il pourra toujours compter sur les MRE, sur les phosphates et le tourisme ? Sur le court terme, peut-être, mais certainement pas sur le long terme. Finalement, la pauvreté (d'un pays, d'une population) est-elle une fatalité ? Elle doit sans doute l'être…Mais uniquement pour les fatalistes.