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Gordon Brown entre en scène

Après dix ans de «blairisme», les travaillistes optent pour un financier
Le rideau est tombé finalement mercredi sur dix ans de Tony Blair, auquel Gordon Brown, son ministre des Finances, va succéder à la tête du gouvernement en Grande-Bretagne.

Gordon Brown entre en scène
Après avoir dominé toutes ces années la vie politique britannique, M. Blair, 54 ans, devait se rendre au palais de Buckingham avec son épouse Cherie en tout début d'après-midi, pour y présenter au cours d'une audience privée sa démission à Elizabeth II.

La reine devait ensuite convoquer Gordon Brown,
56 ans, qui attendait ce moment depuis des années, pour lui demander d'être son onzième Premier ministre, et ouvrir ainsi un nouveau chapitre de l'histoire politique britannique.

Les conjectures continuaient d'aller bon train mercredi matin quant à la nomination imminente de M. Blair comme émissaire du Quartette pour le Proche-Orient (Union européenne, Russie, Nations unies, Etats-Unis), dès qu'il aura quitté Downing Street.
Des discussions du Quartette mardi à Al Qods sur
cette nomination n'ont pu aboutir, mais le Premier ministre irlandais Bertie Ahern a affirmé mercredi matin
que M. Blair se tenait prêt à assumer ces fonctions.

Ce dernier devrait dans cette perspective également démissionner mercredi de son poste de député de Sedgefield (nord-est), où il a prévu de se rendre en fin d'après-midi, une fois franchie pour la dernière fois la lourde porte noire du 10, Downing Street.
Bien qu'un énorme camion de déménagement fût garé devant Downing Street, l'hyperactif M. Blair a commencé
tranquillement sa journée, sans le moindre engagement.
Mais à midi précisément, cet orateur hors pair devait
se rendre à la Chambre des communes, y affronter pour la 318e et dernière fois pendant une demi-heure les questions hebdomadaires des parlementaires.

Il devait ensuite retourner à Downing Street, pour y faire ses adieux au personnel, avant de monter une dernière fois dans sa limousine de Premier ministre, pour son court voyage jusqu'au palais de Buckingham.

Ses adieux auront duré sept semaines, depuis qu'il a annoncé le 10 mai qu'il entendait démissionner le
27 juin, usé par dix ans au pouvoir, et poussé vers la sortie par l'impatience des "brownistes".
Gordon Brown qui lui succède sans élections, en tant
que nouveau chef du parti travailliste, majoritaire à
la Chambre, est son ministre des Finances depuis dix ans, allié devenu rival au fil des ans, après avoir été avec lui l'artisan du retour au pouvoir du Labour en 1997.

Moins charismatique que M. Blair, cet austère fils de pasteur écossais s'est présenté comme l'homme prêt à "relever le défi du changement", exercice difficile après avoir été pendant dix ans l'un des poids lourd du gouvernement Blair.

Il a promis un changement de style, plus sobre, moins "célébrité", mais il est resté discret sur ses projets précis, se fixant cependant comme priorités, la santé, l'éducation, le logement et promettant de donner plus de pouvoir au Parlement.
Les analystes n'attendent cependant pas d'inflexion majeure de la politique britannique.

M. Brown peaufinait mercredi matin la composition de son nouveau gouvernement, savourant un premier succès, la démission d'un député conservateur Quentin Davies passé chez les travaillistes mardi après avoir éreinté dans une lettre le chef du parti conservateur David Cameron, accusé
de "cynisme, superficialité, et manque apparent de
convictions".

Une très bonne nouvelle pour Gordon Brown, les conservateurs étant pour l'instant presque toujours donnés gagnants dans les sondages d'opinion, dans la perspective des prochaines législatives attendues
en 2009.
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Charismatique, infatigable…

Charismatique, infatigable, convaincu de faire « ce qui est bien», Tony Blair a dominé la scène politique britannique pendant dix ans et fut l'un des acteurs majeurs sur la scène internationale.
Prêt à devenir émissaire du Quartette pour le Proche-Orient, il restera comme l'homme des réformes et du renouveau du parti travailliste, mais aussi comme le Premier ministre au bilan terni par l'Irak.

Cet excellent orateur avait été porté au pouvoir le 2 mai 1997 par un raz-de-marée électoral, devenant à 43 ans le plus jeune Premier ministre britannique depuis 1812.

A présent fâché avec une bonne partie de l'opinion, il a subi l'usure du pouvoir, mais il est persuadé que le «blairisme» résistera à l'épreuve du temps, après son départ mercredi du 10, Downing Street.

Charmeur hyper-actif, député à 30 ans, Anthony Charles Lynton Blair, né le 6 mai 1953 à Edimbourg dans une famille bourgeoise et avocat de formation, était arrivé à la tête du Parti travailliste en 1994, après le décès soudain du leader John Smith.
Avec une énergie débordante, il va rapidement tout transformer dans son parti. De cette formation de gauche, appuyée sur les syndicats, il fait un parti centriste, europhile, moderne. Le Labour revient au pouvoir en 1997 après 18 ans dans l'opposition.

L'aile gauche renâcle. Mais Blair remporte encore largement les élections de 2001, puis, faute d'opposition crédible, celles de 2005, un triplé gagnant inédit pour les travaillistes.

Plus pragmatique qu'idéologue, Tony Blair, homme politique instinctif qui voit la mondialisation comme une chance, se veut l'incarnation d'une «troisième voie», cherchant à conjuguer libéralisme économique et meilleurs services publics. Il y investit massivement, y introduit le privé et des obligations de résultats. Le budget de l'éducation a doublé depuis 1997, celui de la santé a quasi-triplé.

Il utilise les médias comme personne, au risque d'être traité de manipulateur.

Ses dix années au pouvoir sont portées par une économie florissante.
Les années Blair sont celles de l'indépendance de la Banque d'Angleterre, de l'introduction du salaire minimum, de la régionalisation en Ecosse et au Pays de Galles, de la paix en Irlande du Nord, des unions homosexuelles et d'un durcissement des lois antiterroristes en parallèle avec la montée de la menace islamiste.
Des attentats le 7 juillet 2005 à Londres font 56 morts. Tony Blair se montre souvent aussi conservateur que ses adversaires politiques en matière d'immigration, de police ou de justice.

En politique étrangère, cet anglican pratiquant, père de quatre enfants, marié à Cherie, avocate des droits de l'Homme, défend un interventionnisme «fondé sur les valeurs».
Plus apprécié aux Etats-Unis que dans son propre pays, il se veut à la fois l'allié indéfectible de Washington, quitte à être traité de «caniche de George Bush», et un «partenaire fort» de l'Europe.

Au nom de ces valeurs, il a envoyé les soldats britanniques au front à cinq reprises : Irak en 1998, Kosovo en 1999, Sierra Leone en 2000, Afghanistan en 2001, Irak encore en 2003.

Deux ans après les attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis qui ont changé sa vision du monde, cette guerre, rejetée dès le départ
par son opinion, et qui a fait 152 morts chez les Britanniques, lui a fait perdre la confiance du pays. Il a toujours refusé de s'en excuser.
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