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La manne de la bourse du carbone, toujours en rade ?

Au moment où le prix des Unités de réductions d'émissions certifiées (URCE), ou encore plus communément de la tonne de carbone évitée, suit le trend haussier des quotas européens pour une livraison à la fin de l'année en cours, les projets MDP (Mécanisme pour un développement propre) se sont pas légion au Maroc.

La manne de la bourse du carbone, toujours en rade ?
Hormis quelques projets dans les énergies renouvelables (acheteur-France), concernant plus précisément le parc éolien d'Essaouira, d'une puissance de 60 MW (coût du projet 82,5 millions d'euros, mais revenu carbone 15,6 millions d'euros sur 10 ans), et deux autres de petite échelle, respectivement de kits photovoltaïques et de parc éolien de 10 MW, ils sont quasi inexistants. Doit-on imputer les causes à un manque de communication autour de ce concept, qui peut être financé par des investisseurs MDP venant de pays développés, ou à des lourdeurs des procédures ?

Pourtant, le principe du Mécanisme pour un développement propre (MDP) est des plus simples, et permet des économies d'échelle importantes. Un Etat ou une entreprise, dits gros pollueurs, investit dans un projet de réduction des émissions des GES (gaz à effet de serre) dans un pays en développement. En échange des réductions constatées, un égal volume d'URCE lui est délivré.

Libre à cet investisseur de les vendre sur le marché ou les déduire de ses obligations internationales de réduction. Dans tous les cas, on se dirige vers l'amorce d'un juteux marché du carbone. Les prévisions le confirment. Les analystes estiment justement que le prix moyen pour les projets les moins avancés se situe dans une fourchette entre 9 et 11 euros. Mieux, compte tenu de la surchauffe apportée par les quotas européens, il pourrait atteindre 16 à 17euros.

Les derniers chiffres, publiés par la Banque mondiale, faisaient état de transactions financières dépassant 2,26 milliards de $ US pour un volume de 214 millions crédits échangés, sur les neuf premiers mois de l'année 2006. Pour la petite histoire, rappelons qu'instauré par le Protocole de Kyoto, qui a été adopté en 1997 et entré en vigueur en février 2005, le MDP est le seul des deux autres mécanismes, dits de flexibilité, pour la réduction des émissions des GES, impliquant les pays en développement. C'est un excellent outil de coopération à même de permettre à ces pays d'accéder au développement durable. La démarche repose sur une judicieuse répartition des pollueurs de la planète. En effet, le Protocole de Kyoto répartit les pays en deux groupes. Le premier concerne les pays qui sont tenus de réduire leurs émissions de GES en moyenne de 5,5% par an, par rapport au niveau de 1990, sur une première période d'engagement située entre 2008 et 2012. L'autre groupe réunit les pays qui ne sont pas soumis à des engagements de réduction, mais qui doivent bénéficier de soutien financier pour faire face aux changements climatiques.

Qu'est-ce qui expliquerait donc ce relatif retard dans la réalisation de projets MDP ? Le cadre existe bel et bien. Le Royaume, qui a ratifié le Protocole de Kyoto en janvier 2002, a instauré depuis, par arrêté ministériel, une Autorité nationale désignée du MDP (AND) au sein du ministère de l'Environnement.

Aujourd'hui, un ensemble d'outils institutionnels et techniques, en termes de procédures nationales (sur www.cdmmoroco.ma), de bureaux d'études (une dizaine) pour accompagner les promoteurs de projets MDP, un fonds capital carbone Maroc avec Access Capital, filiale de la Caisse de dépôt et de gestion), un fonds d'équipement communal, un réseau national MDP, un portefeuille diversifié de 60 projets (énergies renouvelables, efficacité énergétique, gestion des déchets), une stratégie de coopération bilatérale avec des Etats du premier groupe… existent.

Pour accélérer le processus, les observateurs soutiennent qu'il reste à enrichir le portefeuille MDP, apporter plus de moyens à l'AND en la dotant d'autonomie financière, renforcer l'expertise nationale sur certains secteurs, tels que la foresterie, le transport, l'agriculture, ou encore préciser les aspects fiscaux relatifs aux produits URCE. Par ailleurs, un changement de comportement et de mentalité, à l'image de ce qui a été institué dernièrement en France, avec le principe du pollueur-payeur introduisant des malus pour l'achat de véhicules neufs émettant plus de 160 g de CO2/km, et au contraire des bonus, voire super bonus, dans le cas contraire avec des pollutions en deçà de 130 g de CO2/km, serait utile à adopter.

Dans le même sens, pas plus tard que la semaine dernière, la Commission européenne a laissé transparaître ses intentions d'envisager la fin de la gratuité des crédits de pollution à l'horizon 2012. En plus clair, il est question de mettre en place un système d'échanges de carbone bien plus strict que le système actuel. Pour rappel, la décision de l'Europe d'une réduction de 20% (base 1990) des émissions de GES à l'horizon 2020, avait mis en place un système qui expire en 2012. Il s'agit du système européen d'échanges de quotas d'émissions (système ETS) soutenu par 11 000 usines qui émettent 40% des émissions de CO2 et qui peuvent acheter et vendre des permis démissions.
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