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La «chicha» de plus en plus prisée

Il est près de 19h30. La cité blanche change d'ambiance. Les artères calmes à l'heure du ftour retrouvent petit à petit leur agitation habituelle. Les cafés, restaurants, hôtels et espaces culturels de la métropole s'habillent de leurs plus belles parures pour accueillir les fidèles clients, après la rupture du jeûne.

La «chicha» de plus en plus prisée
Après la spiritualité, l'animation reprend et se poursuit tard dans la nuit. Du coucher au lever du soleil, la vie nocturne à Casablanca est très intense et offre un spectacle diversifié selon les quartiers et les espaces de divertissement. Que ce soit au centre-ville, en zones huppées ou aux quartiers populaires, les senteurs du mois de Ramadan se répandent dans tous les coins et les recoins de la métropole. Les cafés ne désemplissent pas jusqu'au petit matin.

Au boulevard Zerktouni, un petit café accueille des fidèles de la pipe à eau. Jeunes cadres, petits fonctionnaires et étudiants se retrouvent presque chaque soir après la rupture du jeûne dans cet endroit pour prolonger les plaisirs de l'esprit. C'est un rituel. «Après une journée sans fumée, on a besoin de faire le plein de nicotine. A partir de 50 DH le narguilé, ce café est le meilleur endroit pour y parvenir et s'éclater entre amis. Le cadre est idéal. On est loin du regard des gens. On est bien avec la sensation de détente procurée par le bruit des bulles et de la fumée», s'extasie un habitué des lieux. En effet, les soirées de certains Casablancais sont rythmées par la consommation du narguilé. Il faut dire que les cafés qui servent la chicha figurent parmi les endroits les plus prisés après le ftour.

Les habitués s'adonnent à cœur joie à cette pratique en dépit du danger que représente la pipe à eau sur leur santé. Certaines personnes y voient même une pratique conviviale, car le tuyau de la pipe à eau circule souvent entre plusieurs. Les patrons des cafés qui le servent se réjouissent à leur tour puisqu'ils voient leur chiffre d'affaires augmenter. Le fait de veiller pour fumer du narguilé sous les rythmes d'oriental et chaâbi, durant le mois de Ramadan, est devenu presque ancré dans les habitudes casablancaises, particulièrement chez les hommes dont beaucoup y trouvent, encore, leur passe temps favori loin des interminables séries ramadanesques.

Changement de décor, au quartier Ghandi, un peu plus loin de l'espace clos du boulevard Zerktouni. l'ambiance est plutôt décontractée dans ce café très animé durant le ramadan. Des djellabas courtes, tenues traditionnelles, robes et jean y défilent toute la soirée. Des familles, jeunes couples, garçons et filles laissent entendre les gargouillis de l'eau dans le réservoir vitré. Les effluves fruitées du narguilé se mélangent à d'autres fragrances, celles des clients qui n'hésitent pas à forcer sur le flacon de parfum pour les uns et le maquillage pour les autres. A 100 DH la séance de chicha, les clients de ce café «hype» peuvent se permettre un «concert» live de musique diversifiée. «Même si le prix de la consommation est plus élevé par rapport aux autres cafés, on vient ici pour la détente, le plaisir et surtout pour l'animation d'ailleurs on avale rarement la fumée de la chicha», nous confie une jeune habituée des lieux. «C'est l'un des rares espaces de la métropole où on peut boire un café et fumer le narguilé en famille», ajoute un père de famille.

Loin du boulevard Ghandi, à Hay Moulay Abdallah, il y a de plus en plus de cafés spécialisés dans la pipe orientale. Dans ces espaces de « détente », on trouve toujours un coin spécial réservé au narguilé. Les propriétaires de cafés ont compris que le ramadan, mois de jeûne et de prière, est aussi l'occasion de se gaver de tabac au moyen des cigarettes et du narguilé, façon de compenser l'abstinence observée le jour. Même constat aux quartiers populaires. A Hay Moulay Rachid, Bab Marrakech,… plusieurs gargotes accueillent chaque soir les fans du narguilé qui s'amusent parfois à le faire eux-mêmes. C'est l'exemple de ce «café», à hay Mohammadi, qui a aménagé son sous sol pour attirer les amateurs et «spécialistes» de la pipe à eau.

Sur place, les doigts tachés de nicotine, des groupes de jeunes étudiants et de chômeurs se partagent une seule chicha. Sous les regards admiratifs de leurs amis, les plus «expérimentés» saisissent goulument le long tuyau à même la bouche et demandent fièrement plus de taâssila. Peu de temps après, l'atmosphère devient irrespirable, mais les corps sont comme anesthésiés et les esprits complètement absorbés par le jeu de cartes qui connaît aussi un grand engouement durant le mois de ramadan. Une vive tension se laisse, toutefois, lire sur les visages, qui fument plus pour oublier que pour se détendre.
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Les dangers

Selon une étude réalisée par l'OMS, une heure de la chicha est l'équivalent de 100 à 200 cigarettes par jour. L'étude révèle également que le fumeur de narguilé est exposé à d'importantes quantités de nicotine, de monoxyde de carbone et d'autres toxines que le fumeur de cigarettes.
Elle dévoile aussi que la force nécessaire pour aspirer l'air à travers le tuyau permet à la fumée de pénétrer plus profondément dans les poumons.
Une séance de narguilé expose généralement les fumeurs à une quantité de fumée plus grande que pour ceux de cigarettes.

En effet, un fumeur consomme généralement une cigarette en 5 à 7 minutes, inhalant un volume de fumée compris entre 0,5 et 0,6 litre de fumée. En comparaison, un fumeur de narguilé fume pendant 20 à 80 minutes et inhale entre 50 et 200 bouffées de 0,15 à 1 litre chacune.

Une séance de narguilé expose donc le fumeur à un volume de fumée correspondant à 100 cigarettes ou plus. La concentration plus réduite de nicotine dans la fumée de la chicha peut amener les fumeurs dépendants au tabagisme à inhaler plus de fumée pour soulager leur manque. Ceci les expose à une quantité de produits chimiques cancérogènes et de gaz dangereux (tels le monoxyde de carbone) élevés, d'autant qu'une partie de la nicotine est absorbée par l'eau.

Selon une étude, une séance d'environ 45 minutes délivre 36 fois plus de goudron, 15 fois plus de monoxyde de carbone, et 70% plus de nicotine qu'une cigarette.
Selon une autre «si 30 à 50 bouffées sont prises dans la même soirée par chicha, cela signifie que le consommateur prend autant de fumée qu'avec 40 cigarettes. Des mesures montrent que l'augmentation du monoxyde de carbone expiré à la fin d'une chicha est équivalente à celle observée lors de la consommation de 30 à 40 cigarettes».
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