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Rebbah pense que son parti est mal connu

Jeune dirigeant du PJD, chargé de l'encadrement, Abdelaziz Rebbah est parmi les figures du parti les plus médiatisées. Invité au Forum Le Matin, il n'a pas dérogé à sa prestance et son sens du débat. Durant 90 minutes, cet originaire de Kénitra qu'il représente au Parlement, n'a pas fait dans la dentelle pour exorciser les déments qui taraudent son parti et font le chou gras de la presse.

Rebbah pense que son parti est mal connu
D'entrée de jeu, il affirme que son parti est intraitable sur la moralisation qu'il considère une question de vie ou de mort pour le Maroc. Quant au discours moralisant que l'on appose au style politique de son parti, Rebbah lui oppose une mauvaise connaissance des changements que le PJD a connus depuis sa création. Au début, explique-t-il, il fallait bien marquer l'empreinte et le référentiel du parti, tactique aujourd'hui révolue. En atteste la nouvelle ligne de démarcation tracée avec le MUR. A ce sujet et tout en reconnaissant le rôle prépondérant du Mouvement en matière de formation des élites, Rebbah affirme que ses responsables ne peuvent se présenter aux élections au nom du parti.

S'agissant de la zone de turbulence par laquelle le PJD est récemment passé, il souligne que le nombre des démissionnaires dans tout le Maroc ne dépasse guère une soixantaine. Face au phénomène de la transhumance qui promet inéluctablement des rebondissements, le parti de la lampe estime que la sanction proposée par la loi est insuffisante et propose carrément de priver les transhumants de leurs sièges.
Mostafa Bentak
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Interview • Abdelaziz Rebbah, Parti de la Justice et du Développement (PJD)

Identification
Le Parti de la Justice et du Développement (PJD) est le prolongement du Mouvement populaire démocratique et constitutionnel (MPDC) qui avait été créé en 1967 d'une scission du Mouvement populaire de Mohand Laenser. Le PJD est donc à considérer comme une deuxième version du Mouvement populaire démocratique et constitutionnel. En effet, ce parti a été ouvert aux islamistes de l'association Al Islah Wa Tawhid après la tenue d'un congrès extraordinaire, en 1996, alors que le parti portait encore le nom de MPDC. Par ailleurs, le PJD avait expliqué le changement de son nom en raison de la multiplicité des partis qui s'appelaient « Mouvements ». En novembre 2000, le parti a tenu son 4e congrès qui a élu pour la 4e fois, Abdelkrim Khatib secrétaire général du parti et qui a gardé le titre de président fondateur. C'est Saâddine Othmani qui a dirigé le parti après Abdelkrim Khatib, à la suite du 5e congrès du PJD. Puis, c'est Abdelilah Benkirane qui a succédé à Saâddine Othmani lors du dernier congrès.

Le PJD était le premier parti islamiste à être légalisé au Maroc. Il a toujours été à l'opposition, à l'exception de deux années durant lesquels il avait préféré soutenir la majorité du gouvernement Abderrahmane Youssoufi de 1998 à septembre 2009.
Le PJD a, sur le plan organisationnel, une démocratie qui lui est propre, inspirée de principes islamiques. Dans la littérature du parti de la lampe, il n'est pas admis qu'un membre du parti se présente à un poste de responsabilité, mais ce sont « ses frères » qui doivent le proposer. Ainsi, le choix des responsables et des dirigeants du PJD passe par une étape de proposition des candidats puis une deuxième étape d'élection parmi les personnes proposées. Le parti a commencé à percer sur la scène politique depuis 2002 lorsqu'il avait pu décrocher 42 sièges à la deuxième chambre. En 2007, alors qu'on craignait un raz de marée de ce parti islamiste, le PJD a obtenu 46 sièges à la première chambre, devancé par le Parti de l'Istiqlal qui avait eu 52.

L'on remarque que le PJD appelle à la moralisation de la vie publique. Mais votre réaction, suite à la suspension de Boubker Belkoura, a été démesurée malgré les dépassements recensés par le rapport de la Cour des comptes. On s'attendait à ce que le parti ouvre sa propre enquête pour connaître la vérité au lieu de défendre mordicus Belkoura ?

Pour nous, la moralisation est une affaire de vie ou de mort pour le Maroc. Notre pays a une histoire politique et bénéficie d'une stabilité et un consensus autour des constantes et à leur tête la Monarchie et l'unité territoriale. Mais il y a encore des défis qui se mettent au travers du développement du Maroc principalement la corruption. Pas simplement dans le sens de la décadence des valeurs, mais concernant la gestion de la chose publique. Nous ne sommes pas les seuls à le signaler. La plupart des rapports ont déduit la même chose dont celui du cinquantenaire qui a conclu que la vraie problématique du Maroc est celle de la gouvernance. Dans ce contexte spécial qui est celui des prochaines communales, j'estime que ce qui va différencier les partis c'est la manière dont chacun se comportera avec ce problème. C'est aussi le comportement de leurs militants et élus. Et là j'aimerai parler de l'affaire Belkoura. Nous avons tenu deux conférences de presse à ce sujet et réalisé un CD dans lequel nous avons expliqué toutes les remarques de l'inspection. Le PJD a même demandé à Transparency Maroc de se réunir avec nous pour expliquer un certain nombre de points en présence de Belkoura et de la presse. On a l'impression que le problème du pays aujourd'hui est l'ajout d'un étage. Admettons qu'il y a eu bel et bien infraction bien que je n'en sois pas convaincu, elle n'est pas de nature à provoquer une suspension. Notre parti a initié une expérience avec ses présidents de communes. Il se réunit chaque mois avec un président. Je tiens à signaler que nous contribuons dans la gestion de 60 communes et présidons 14 communes et arrondissements. Nous discutons avec les présidents de communes tout ce qui s'écrit dans la presse à leur propos et de ce que nous recevons comme rapports sur la base des remarques de nos militants. J'aurais vraiment aimé que tous les présidents de communes soient comme Belkoura. Ce dernier a pris le gouvernail à la commune de Meknès qui croulait sous des crédits de 300 millions de DH. Mais au bout de son mandat, il a réussi à payer tous ces crédits et à avoir un excédent de 50 millions de DH. De 170 millions de DH de ressources, il a pu porter ce chiffre à 300 millions de DH. Belkoura a lancé des projets d'aménagement et de développement à Meknès de 250 millions de DH. Ceci dit, lorsqu'on veut juger une expérience, il ne faut pas le faire selon une vision étriquée mais dans sa globalité. Dans ce contexte, le PJD a pris l'initiative de poursuivre le ministère de l'Intérieur en justice. Car au lieu de le démettre de ses fonctions, le ministère aurait dû lui adresser un avertissement comme il le fait avec plusieurs présidents de communes. Je réitère que les griefs mis en avant par l'inspection générale ne justifient en aucun cas une suspension, sinon un grand nombre de présidents doivent être en ce moment en prison. Il n'y a qu'à voir ce qui se fait à Fès ou à Marrakech. Je ne dis pas non plus que nous sommes des anges, mais pour juger une expérience il faut trouver autre chose qu'un étage supplémentaire dans une résidence.

Mais qu'en est-il de l'amnistie fiscale dont l'épouse de Belkoura aurait bénéficié ?

Son épouse a acheté le terrain en question en 2002 bien avant que Belkoura accède à la présidence de la commune en 2003. De même, l'autorisation lui a été délivrée en 2002. Quant à l'amnistie d'un million de DH d'impôt dont vous parlez, elle a été obtenue grâce à une décision du gouverneur qui était aux commandes avant Hassan Aourid. Cette décision stipule que tous les projets immobiliers ayant trait au logement social sont exempts et puisque l'épouse de Belkoura est une promoteur comme les autres, elle en a bénéficié. Vous savez, il ne peut y avoir un président qui n'a jamais commis de faute pour la simple raison qu'il est appelé à prendre des centaines de décisions sans oublier qu'un président ne gère pas seul une commune. Cela se fait dans le cadre d'alliances avec d'autres partis politiques car le mode de scrutin ne permet pas hélas la gestion par une seule personne. Bref, nous restons accrochés au principe de moralisation même s'il doit y avoir des erreurs commises par un militant ou un élu appartenant à notre parti. Nous serons alors en mesure de prendre les démarches nécessaires à son encontre. A cette occasion, j'aimerais vous dire que nous avons des présidents qui gèrent et que nous avons suspendus à cause d'erreurs qu'ils ont commises. Ceci n'a jamais été repris par la presse et le ministère de l'Intérieur n'en a pas idée. Pour exemple, nous avons une personne qui est parmi les fondateurs du PJD et leader à Fès et estimant qu'il ne s'acquitte plus convenablement de ses responsabilités, il n'est plus avec nous. Au PJD, nous privilégions le principe de l'auto-contrôle et la vigilance. C'est ce qui nous différencie des autres partis et je vous dis clairement que si un jour le PJD devient comme les autres, il est fini.

Que dites-vous de rapports que vous avez reçus sur la gestion de certains membres du PJD de la chose locale à Kalâat Sraghna ?

Nous avons aussi établi un rapport sur le sujet mais nous avons conclu qu'il ne mérite autant d'intérêt. Je vous ai déjà dit que l'on ne ressent aucune gêne à démettre un membre dirigeant même au niveau du secrétariat général si l'on constate des dépassements de sa part. Nous avons écarté un président de commune qui ne fait plus partie du PJD. Il y a aussi un président d'un arrondissement à Fès qui est dans la même situation sans oublier d'autres élus. Et ce, bien que l'on ne soit pas nombreux. Encore une fois j'exprime ma fierté de l'expérience de Belkoura, de Khairoune et celle d'Oued Zem malgré les erreurs qui auraient pu être commises. Je vous invite à faire une lecture de l'expérience des collectivités locales. Vous savez, le système de tutelle est malheureusement très mauvais. Chaque décision concernant une affaire ou un projet doit avoir l'aval des autorités locales, ce qui limite drastiquement la liberté en matière de gestion locale. Et dans la plupart des cas, il faut attendre des mois pour avoir le cachet de la tutelle. Il est donc, dans la nature des choses, que ce système pousse à commettre des fautes. A ce propos, nous avons demandé à ce que le ministère de l'Intérieur fasse de même que dans plusieurs autres pays à savoir le contrôle à posteriori.

L'on vous reproche souvent d'évoquer des sujets ayant principalement trait aux valeurs. Pourquoi cette fixation, devenue un leitmotiv dans votre discours politique ?

Il y a huit ans, j'aurais pu accepter cette remarque parce qu'à l'époque, il fallait bien que l'on marque notre présence et notre empreinte du point de vue idéologique. Mais je vous confirme qu'aujourd'hui cela a changé. En tant que responsable dans la jeunesse du PJD, chargé de l'organisation des congrès et de l'encadrement notamment lorsqu'il s'agit de meeting, je réaffirme que ce n'est pas vrai. Nous avons des enregistrements de ces interventions qu'on vous invite à voir. Vous constaterez que nous parlons de tous les problèmes sociaux et économiques et, de temps à autre, nous évoquons des thématiques ayant trait aux valeurs. Je pense qu'une formation qui ne défend pas ces valeurs n'est pas un parti politique marocain. Nous avons organisé une caravane dans le monde rural qui nous a permis de visiter plusieurs régions et dans chaque meeting nous avons parlé des déficits en infrastructures et nombre d'autres problématiques.
J'aimerais que la presse suive de près ce que fait le PJD. C'est notre parti qui a demandé la formation d'une commission d'enquête au sujet du foncier, de lutte contre la corruption. Nous avons aussi appelé à ce que le ministre des Finances vienne au Parlement pour expliquer les mesures prises contre la crise financière. Notre parti a, également, voté contre la Loi de finances car il a constaté que ceux qui l'ont concoctée se sont basés sur des indicateurs qu'ils ne maîtrisent pas.

Ambitions du Parti
«Le système électoral ne permet pas de raz-de-marée»

Le PJD va couvrir toutes les circonscriptions électorales ou va-t-il opter pour une participation limitée ?

Non, nous n'allons pas opter pour une couverture limitée. Nous allons nous présenter dans les circonscriptions où nous sommes présents. Là où nous avons des possibilités d'avoir des candidatures. Nous n'avons donc pas de taux préétablis pour dire que nous allons couvrir tant... Cela dépendra de nos moyens sur le terrain. En fait, le PJD ne pourra pas dépasser, lors des élections communales, une couverture d'environ 40 % des circonscriptions électorales. Car le nombre des candidats est de l'ordre de 25 mille. Alors que le nombre des membres du PJD est de l'ordre de 12 mille auxquels on peut ajouter quelques centaines de milliers de sympathisants. Sauf qu'on ne peut pas tabler sur les sympathisants lors des élections. Il y a environ 1.500 communes dont 1.300 qui sont rurales. Aucun parti politique ne pourra dépasser la couverture de 70%. Le premier parti sur le plan électoral est l'Istiqlal. Dans son histoire électorale, il n'est pas arrivé à dépasser les 70 % de couverture. L'USFP est restée dans les 50%.
Ceci montre qu'avec 25 mille sièges à couvrir, nous ne pourrons pas présenté plus de 10 mille à 12 mille candidats. C'est la réalité sur le terrain qui détermine le volume des candidats à présenter.

Et pourquoi vous parliez d'un raz-de-marée ?

Le PJD n'a jamais parlé de raz-de-marée, même pas lors des dernières élections législatives. On avait juste parlé de remporter entre 70 et 80 sièges, ce qui ne correspondait même pas au quart des sièges à la Chambre des représentants. D'ailleurs, le système électoral et le découpage adoptés ne permettent pas une telle chose pour aucun parti. Mais il faut, un jour, arriver à un équilibre réel. Puisque les partis sont conscients de ce qu'il y a actuellement: un équilibre artificiel. Je donne comme exemple la région de Kénitra où il y a 1.500 sièges à pourvoir. Cette ville bénéficie de 53 sièges alors qu'elle englobe le quart des habitants de la région. Une commune locale, pas loin de Kénitra, aura 50 sièges alors qu'elle n'a que peu d'habitants. Cela pour dire que le découpage électoral renforce les communes rurales et affaiblit les zones urbaines. Cette logique vise à affaiblir les partis, car leur force se trouve dans les villes.

Est-ce que vous réfléchissez à des coalitions pour faire face à cette problématique ?

Le problème c'est que la plupart des projets ne sont pas décidés sur le plan local mais plutôt sur le plan régional. Le problème se pose parce que la majorité des membres de la région du Gharb sont du milieu rural. Alors que Kénitra, la capitale du Gharb et la ville de Sidi Kacem ne disposent que de 10 sièges au sein du Conseil régional. Au sein du Parlement, plus de 100 députés représentent des circonscriptions rurales. Tout cela est le résultat du découpage électoral.

«Personne ne peut prouver l'existence de 100 démissionnaires du parti»

Le PJD est critiqué pour être constamment sous l'influence du Mouvement unicité et réforme. Des militants à Sefrou se sont érigés contre cet état de fait. Qu'en est-il au juste et pourrait-on s'attendre à ce que le parti se détache un jour de l'association ?

Ce n'est pas vrai. Il n'y a pas de mainmise du MUR sur le PJD. Ceux qui ont manifesté à Sefrou contre une prétendue influence du Mouvement sur le parti, sont ceux-là même qui, pendant 12 ans, géraient la chose locale au nom du PJD. Ce n'est que maintenant qu'ils le découvrent après qu'ils ne sont plus dans des postes de responsabilités au sein du parti ? Je tiens à vous informer que leur sortie est intervenue après le congrès du parti. Et c'est normal qu'ils ne soient pas réélus car le parti adopte le renouvellement de ses élites. La moitié du bureau de la jeunesse du parti a été renouvelée. Je suis heureux quand de nouvelles personnes sont élues au niveau des régions et des sections. C'est aussi normal qu'une telle option fasse des mécontents. Je tiens aussi à préciser que les militants du PJD ne sont pas venus de nulle part. Ce sont des personnes qui ont évolué au sein du MUR, dont je fais personnellement partie et dont j'en suis fier. Ces personnes ont bénéficié d'une éducation religieuse qu'elles considèrent convenable. Elles ne croyaient pas à la politique jusqu'aux années 1980. Plus que cela, la politique n'était pour nous que foutaise et interdit du point de vue de la religion. Ensuite, on s'est dit qu'il serait judicieux d'investir le monde de la politique et comme il y a une gauche et des libéraux pourquoi ne pas avoir des gens qui réclament une référence islamique.

Mais la référence islamique n'est pas de votre unique ressort, elle appartient à tous les Marocains…

La démocratie appartient également à tous les Marocains. Le parti qui se dit démocratique est celui de tous les Marocains. Idem pour celui qui se réclame de la Monarchie ou qui défend l'unité territoriale ou encore l'indépendance. Personne ne dit que l'Islam est le propre du PJD. Mais nous sommes contre l'idée que puisque l'Islam est celui de tous les Marocains, il faut par conséquent le laisser de côté. Au contraire, il faut en puiser. Vous savez, la nature même des Marocains est multiple. On y trouve le religieux, le culturel, le civilisationnel et l'historique et parmi ces composantes se trouve bien évidemment l'Islam. Personne ne peut le nier. Ces valeurs sont celles de tous les Marocains et nous les défendront car elles encadrent notre existence.

Peut-on alors s'attendre à ce qu'un jour le PJD coupe le cordon avec le MUR pour s'engager librement dans la politique ?

Pourquoi voulez-vous qu'on le coupe. Nous croyons fort à notre référence et nous garderons le cap. Le MUR se considère comme une ONG à dimension éducative, prédicatrice et innovante en matière de religion. Et ce, à l'image de la Boutchichia sous une logique et Al Adl Wal Ihssane sous une autre. L'histoire de l'Islam ne compte pas une seule mouvance religieuse. L'Afrique est également connue pour ses zaouias et même les Etats-Unis comptent de grandes et multiples mouvances religieuses ayant formé des présidents et des leaders politiques. Le MUR est une école qui forme un grand nombre de cadres parmi lesquels il y a ceux qui ont intégré le PJD, d'autres sont allés dans des syndicats, plusieurs ont préféré l'action associative et d'autres encore ont travaillé dans le prêche avec l'Etat. Car, lorsque l'Etat a voulu réformer le champs religieux, il a fait appel à des personnes d'horizons divers dont des cadres du MUR, des zaouias soufies. Vous savez, 75% des personnes formées au MUR n'intègrent pas la politique. Toutefois, dans les grands moments politiques, le Mouvement ne peut se donner le luxe de laisser un vide et prend, par conséquents, ses positions.

Que dites-vous alors de la propagande que certains imams de mosquées font au profit de votre parti ?

Ce n'est pas vrai. Il y a quatre ans, le PJD a pris la décision que les imams de mosquées n'ont pas le droit d'être membres du parti ou de se présenter aux élections en son nom. Je vous donne un exemple, Chbabou et Amin Boukhoubza étaient deux imams auxquels nous avons donné le choix entre la mosquée et le Parlement. Ils ont choisi de quitter leur fonction d'imam et de se présenter aux élections et les deux sont aujourd'hui au Parlement. En prenant une telle décision, le parti a voulu que l'imam soit celui de tous les Marocains. Nous sommes allés encore plus loin en décrétant qu'un imam n'a pas le droit d'assister aux meetings du parti même s'il est adhérent et aux responsables du MUR de se présenter candidats au nom du PJD.

Apparemment, le parti ne maîtrise plus ses militants dont plusieurs l'ont récemment quitté…

Ceux qui ont décidé de quitter le PJD ne dépassent pas 60 dans tout le Maroc.

Pourtant, ceux qui sont sortis de l'UNMT et ayant constitué un autre syndicat ont dépassé les 200 personnes ?

Quelle relation y a-t-il entre le syndicat et le parti? C'est un autre sujet. Les membres du syndicat de l'UNMT ne font pas forcément partie du PJD. Si les adhérents au syndicat étaient tous membres du parti, le nombre des Pjdistes auraient atteint les 100 mille. Alors que le nombre de nos adhérents ne dépasse pas les 14 mille membres. Des syndicalistes du secteur de la Conservation foncière ont rejoint l'UNMT. Parmi eux figurent des Istiqlaliens, des Ittihadis, des sans appartenance politique… Ils font partie du syndicat et non pas du parti. Je vais vous étonner en vous disant que nous avons des centaines de membres et de sympathisants qui sont à l'UMT, dans les secteurs où l'UNMT n'est pas présente. La même chose à la CDT. Tout cela pour vous dire que l'action partisane est une chose et l'action syndicale est une autre chose.

En ce qui concerne les différents départs enregistrés au sein du PJD, cela veut-il dire que Benkirane a échoué à maîtriser la situation au sein du parti ?

Comment peut-on juger les réalisations du secrétaire général, Abdelilah Benkirane, alors qu'il n'a pas encore terminé une année à la tête du parti? Par ailleurs, je crois que ceux qui parlent d'une vague de démissions cherchent seulement des titres sensationnels pour vendre leurs journaux. Je les défie de prouver l'existence de 100 membres du PJD qui auraient démissionné. Je suis prêt à démissionner si c'était le cas. Benkirane a assumé le titre de secrétaire général en juillet 2007. Les élections législatives ont été, pour lui, le premier examen. Après ces élections il était normal d'enregistrer des départs. C'est quelque chose de normal et de sain et qui ne m'a pas étonné. Par contre, j'aurais été malheureux si c'est le parti qui aurait chassé des militants. Il y a parmi les démissionnaires des personnes qui étaient au parti depuis plus de douze ans et d'autres qui y ont passé quelques mois. Le parti ne leur plaisait plus. Nous estimons que les démissionnaires constituent une perte pour le parti. Mais nous ne sommes pas une caserne militaire pour les contraindre à rester. Ce n'est pas la fin du monde. Ce qui serait grave, c'est une scission.

Plusieurs partis accusent le PAM de débaucher leurs militants. Etes-vous concernés par ce sujet ?

Non, car je crois que ce ne sont qu'un ou deux membres du parti qui ont rejoint le PAM. D'ailleurs, pour combattre le phénomène de la transhumance, nous avions fait une proposition de loi qui prévoit la perte de tout élu de son siège s'il change de couleur politique. La majorité des partis ont rejeté cette proposition. Car ceux qui discutent et qui décident ce sont les élus qui sont directement concernés par la transhumance. Dans l'état actuel, une amende d'une valeur de 100 mille dirhams, prévue pour sanctionner la transhumance, ne signifie rien pour ces nomades. C'est pourquoi nous avons proposé la ‘'privation de siège'' en cas de changement de couleur au cours du mandat. Ce qui se passe aujourd'hui est une reproduction de ce qui avait eu lieu durant les année 70. Nous craignons de voir la démocratie étranglée à sa naissance.

En conclusion, il y a des tentatives de la création d'un grand parti avec tous les moyens. Pourquoi ? Est-ce pour combattre le PJD ?

Le PAM est un danger qui menace la démocratie.
Il faut assumer notre responsabilité et dire aux responsables que ce qui se passe ne sert pas le pays.

Avez-vous des preuves pour argumenter ce que vous dites?

Pensez-vous que ce qui se passe à besoin de preuves ? Par exemple, lors de la grève du transport, lorsque les syndicats ont été invités aux négociations au siège du ministère de l'Intérieur, ils ont trouvé à la porte un responsable qui les a informés que le dialogue se passera au siège du PAM. La presse a traité ce sujet et les syndicalistes ont protesté et publié des communiqués sur cette question. Il y a des choses qui sont tellement claires et qui n'ont pas besoin de preuves. Je pense que ce qui arrive est une confrontation politique, de parti contre parti. Fouad Ali Himma a dit lui-même qu'il est contre le PJD et a construit son projet pour contrarier notre parti. J'aurais souhaité qu'il soit venu pour assainir la vie politique et pour instaurer la démocratie, la bonne gouvernance… Or, ce projet a été créé pour combattre le PJD. Ceci est une réalité que nous avons dite et que nous disons clairement. Parce que cet homme, qui dirige le PAM, a échoué à combattre le PJD quand il était au ministère de l'Intérieure. Il veut aujourd'hui nous combattre sur le terrain. Alors que celui qui veut affronter le PJD doit compter sur lui-même et non pas sur ceux qui l'ont fait. Nous pensons que tous les partis politiques sont menacés. Je ne vous cacherais rien si je vous dis que plusieurs partis se plaignent mais sont incapables de réagir. Il y a même des partis qui suspectent de hauts responsables et des dirigeants qui sont avec eux mais qui les trahissent et collaborent avec d'autres entités. On ne pense donc pas que le PJD est le seul parti qui désapprouve Fouad Ali Himma. Il y a aussi Moulay Ismail Alaoui, secrétaire général du PPS, qui a été clair dans ses positions à ce sujet. C'est le cas également de l'USFP. Même les partis proches du PAM se sont mis à le désapprouver. Car il s'est mis à débaucher leurs membres. Quand aux Mouvement populaire et l'Union constitutionnelle, ils jouent le rôle de simples téléspectateurs.

Ces craintes se sont fait jour chez les partis depuis la constitution du Mouvement pour tous les démocrates, non ?

Je vais être clair. La crainte ne se justifiait pas par la création du parti. Car il est du droit de toute personne de constituer une organisation politique. L'on craignait plutôt l'utilisation de moyens illégaux pour combattre les partis politiques. C'est de cela que parlent les acteurs politiques. Des partis de droite et de gauche ont été constitués par des personnes qui ont du poids, mais ils n'ont pas fait tant de tapage. Nous parlons aujourd'hui d'un parti qui constitue une menace. Nous ne sommes donc pas les seuls à nous plaindre du PAM. Le PJD est un parti, dans sa nouvelle version, qui a à son actif plus de 12 ans d'expérience politique et électorale. Nous avons éprouvé plusieurs périls. Le plus important a été l'épreuve du 16 mai. Nous avions été combattus par les « exclusivistes » qui ont poussé vers la dissolution du PJD. Tout le monde sait ce qui est arrivé lors des communales de 2003 et les législatives de 2007. Nous ne craignons pas pour notre parti, qu'il existe ou pas, qu'on soit une force ou non, ce n'est pas important. Nous craignons plus pour l'avenir du pays qui payera le prix très cher. Aujourd'hui, le Maroc a besoin de confiance entre ses composantes, une véritable confiance, y compris dans le domaine social et économique.
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