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«Certains partis croient que le gouvernement est une rente qui leur appartient»

Dans cet entretien, Lahcen Haddad revient sur les fondements de la Coalition des Huit sous un angle nouveau où le pragmatisme d'une telle initiative est mis en relief.

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LE MATIN: Huit partis se sont mis ensemble dans le cadre d'une coalition dite démocratique. Comment se fait-il que plusieurs sensibilités se retrouvent dans un même cadre politique juste avant les élections ?
Lahcen Haddad:
Les huit partis se réunissent ensemble autour d'un projet politique. Leur action commune est le fruit d'une analyse politique de la situation actuelle, aussi bien au niveau national que régional et international. Le monde actuel passe par une crise financière, économique, sociétale et écologique de grande envergure. La région connait une mutation politique importante induite par les bouleversements et révolutions du « Printemps arabe ». Notre pays a pu être à l'abri des effets cataclysmiques des turbulences que traverse la région grâce aux réformes politiques et économiques mis en place depuis l'avènement du Roi Mohammed VI. Mais il ne peut pas rester imperméable aux idées et effets des grands changements que connaissent le monde et la région. Le mouvement du 20 Février et les protestations d'ordre politique et social qui l'ont accompagnées ont démontré les limites des réponses politiques et économiques introduites depuis l'avènement de l'Alternance et les coalitions à forte dominance des partis de la Koutla. Le Maroc a besoin d'une autre vision, d'une autre façon de faire, d'un programme politique et gouvernemental différents et qui riment avec les attentes des jeunes, de la rue, des mouvements sociaux et de la conjoncture régionale et mondiale. Les huit partis proposent de mettre leur diversité idéologique et historique au profit d'une vision commune, assortie d'un programme novateur et d'une approche nouvelle du Maroc de demain, du Maroc moderne et démocratique, d'un Maroc juste, créateur de richesses et assumant un rôle stratégique grandissant dans le monde actuel. Les problèmes du Maroc sont complexes et nécessitent une vision commune qui réunit des libéraux, des socialistes et des islamistes autour d'une même vision et d'un même programme pour apporter des réponses nouvelles aux attentes des Marocains. Le Maroc du 21 Février, du 10 Mars et du 2 Juillet est un Maroc nouveau qui a besoin d'une autre façon de faire. Nous sommes convaincus que nous pouvons assumer ce rôle avec abnégation et responsabilité.

Quel rôle le groupe des huit est-il sensé jouer au sein de l'échiquier politique ? Son offre programmatique et sa vision pour les réformes…
Les Huit proposent de jouer un rôle important sur la scène politique. Ce sont nos idées, notre volonté d'aller de l'avant et de couper avec une transition qui n'a que trop duré et notre ambition d'insuffler une forte dose de rigueur, d'innovation et de leadership dans l'action gouvernementale qui vont nous distinguer. Regardons autour de nous pour voir que l'injustice territoriale, l'accès inadéquat aux soins, l'absence d'une éducation de qualité, le chômage des jeunes, la pauvreté et la vulnérabilité, l'urbanisation galopante, la dilapidation des ressources naturelles ...sont des phénomènes omniprésents partout et ne riment ni avec la politique des grands chantiers, ni avec les avancées en matière d'infrastructures et des droits de l'homme, ni avec l'amélioration relative du climat des affaires, etc. Les réformes entamées il y a plus d'une décennie n'ont pas encore donné leurs fruits tant au niveau social qu'au niveau des régions. Nous proposons de faire la jonction entre les réformes et la réalité quotidienne des Marocains; nous proposons une articulation tant régionale que sociale de la vision du Maroc moderne, juste, démocratique et solidaire. Nous proposons de promouvoir l'économie du savoir, les nouvelles technologies, l'économie verte, l'économie sociale et un enseignement moderne et citoyen dans les régions afin de dépasser les clivages territoriaux et mettre à niveau les zones pauvres et délaissées. Nous proposons une action gouvernementale de proximité et de compassion. Nous voulons être réactifs, attentifs et à l'écoute de nos citoyens qui ne cherchent qu'un enseignement de qualité, un accès aux services amélioré, la dignité qu'offre un emploi décent et un Etat qui protège leurs droits et un espace public ou ils peuvent exprimer leur citoyenneté en toute liberté.

Certains grands partis comme l'USFP, l'Istiqlal ou encore le PJD ont jeté des boulets sur l'initiative. Dans quelle mesure peut-elle être dérangeante pour ces formations ?
Il y a certains partis qui croient que le gouvernement est une rente qui leur appartient de par leur positionnement historique. Les temps ont changé. Les nouvelles générations ne veulent pas qu'on gère le Maroc du 21e siècle à partir des visions nationalistes d'il y a soixante ans. En plus, ni l'indépendance du Maroc ni les avancées démocratiques ne sont le legs d'un seul parti ou un seul groupe. En fait, si on avait accepté quelques idées qui émanaient de certains partis dits nationalistes et s'il n'y avait pas des partis comme le Choura et le Mouvement populaire, on aurait sombré dans une ère de parti unique traumatisante du point de vue politique. Les partis de la Koutla ont eu leur chance depuis 1998; les résultats de leur action sont mi-figue mi-raisin; ils doivent faire l'évaluation de leur action, rénover leurs partis et leurs idées et dépasser cette idée caduque de légitimité historique s'ils veulent faire face aux attentes grandissantes et complexes des Marocains. Le PJD ne doit pas se sentir visé par notre action. Certains parmi nous ne partagent pas certaines de ses idées mais il ne faut pas qu'il se donne ce rôle de victime éternel des atermoiements que connait la scène politique.

Pouvez-vous nous parler des prémices de cette coalition et si elle est à l'initiative du RNI ou des quatre partis libéraux ?
C'est le travail de tous les partis qu'ils soient libéraux, socialistes ou islamiste. Tout le monde était d'accord pour fonder une alliance de raison, basée sur une vision, un programme et un mode d'action. Les leaders ont pris l'initiative et ont formulé l'idée; des commissions ont travaillé d'arrache-pieds pour arrêter une vision commune et les bureaux politiques ont débattu et donné leur aval. Bien sûr c'est aux parlements des partis d'approuver ou non cette initiative mais nous sommes confiants de pouvoir les convaincre de la justesse et la perspicacité de notre action.

Quelle valeur ajoutée les quatre nouveaux partis peuvent-ils apporter notamment aux prochaines législatives ?
Ce sont des partis qui auront leur poids aussi bien en termes de sièges que d'idées. Nous espérons travailler au niveau local pour coordonner nos actions électorales. Ce travail nous permettra d'augmenter les chances de toutes les composantes d'avoir des sièges et de renforcer les rangs de la coalition.

Peut-on imaginer un élargissement de l'initiative à d'autres formations politiques comme l'USFP ?
L'USFP est un parti que nous respectons et s'il rejoint l'initiative, il aura pas mal de choses à contribuer. Mais c'est à nos amis au sein de l'USFP de décider. Ce que je sais est que la Koutla, pour pas mal d'usfpeistes, n'est plus à l'ordre du jour. Et je ne crois pas qu'ils resteront insensibles aux altercations que connait la scène politique actuelle.
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