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Hommage à un acteur majeur du Maroc post-indépendance

«Au-delà du devoir de mémoire, si je devais graver dans le marbre ces quelques impressions, c'est aussi pour garder Moulay Ahmed vivant parmi nous, pour le remercier aussi de nous avoir fait vivre, à ses enfants et à moi-même cette passion « Maroc » au quotidien. Espérons que nous serons à la hauteur de ce legs précieux ».

Hommage à un acteur majeur du Maroc post-indépendance
C'est dans ces termes très éloquents que Mme Assia Bensaleh Alaoui, très émue, les yeux embués de larmes, a conclu son allocution prononcée à l'occasion de la présentation de l'ouvrage « Moulay Ahmed Alaoui, la passion et le verbe » jeudi dernier à Rabat. Devant un parterre d'éminentes personnalités, elle s'est employée à reconstituer le parcours « riche et étonnant » d'un homme qui a marqué de son empreinte indélébile la seconde moitié du 20e siècle. Mme Bensaleh Alaoui a rendu ainsi un hommage posthume à son mari qui, à la faveur de son engagement pour le Maroc et de son abnégation pour son Roi, s'était imposé comme acteur majeur de la vie politique et comme personnalité incontournable dans les hautes sphères de prise de décision. «Il était l'incarnation de l'homme d'Etat, ce militant qu'il n'a jamais cessé d'être, d'abord pour l'Indépendance et puis au service du développement de son pays et de l'épanouissement des Marocains, consacrant sa vie sans répit ni ménagement à ce Maroc qui l'habitait», affirmait-elle.

Le livre qui comprend 57 témoignages de personnalités marocaines et étrangères explore les multiples facettes d'un homme qui était au cœur du pouvoir mais aussi, selon son épouse, si proche de toutes les composantes de la société marocaine dans sa diversité culturelle et géographique, à l'écoute de ses joies comme de ses souffrances.Mme Assia Bensaleh qui vouait à l'évidence un amour sans faille et une admiration sans bornes à son mari, a tenu à évoquer devant l'assistance, avec une nostalgie douce et un peu mélancolique, quelques traits de la personnalité de Moulay Ahmed, cet homme qui avait «une curiosité insatiable pour les choses, les gens et les idées». Elle dit se rappeler toujours de ses anecdotes et de son sens de la dérision, lui, qui répétait que « les gens qui ne rient pas ne sont pas des gens sérieux». A tel point qu'elle avoue «paradoxalement » avoir fait son deuil dans le rire, car, « ne pouvant pas s'empêcher de se remémorer un tel homme sans les éclats de rire».

« Et chaque moment j'avais l'impression qu'il allait débarquer pour me jouer un de ses tours pendables ou me raconter une de ses anecdotes. La dérision lui permettait de dédramatiser, de mieux analyser», se remémore-t-elle. La simplicité et la complexité à la fois de sa personnalité justifieraient amplement la publication de cet ouvrage. « Mais il y a plus que cela ! ». Pour elle, ce sont surtout les témoignages de sympathie exprimés par des compagnons de lutte et des observateurs marocains et étrangers lors des funérailles où chacun venait raconter « son » Moulay Ahmed qui ont déclenché la réalisation de livre. « La rumeur de cet ouvrage a suscité d'autres témoignages spontanés ou sollicités. Je les remercie tous d'avoir laissé parler la raison. Mais aussi leur cœur ».

La présentation de l'ouvrage a permis à ceux qui ont connu Moulay Ahmed de dire toute leur admiration à cet homme « hors pair ». Abderrahmane El Kohen, homme politique et secrétaire général du Parti de la réforme et du développement a tenu à évoquer, avec la même sincérité et la même émotion les grandes qualités de ce haut commis de l'Etat. « Je l'ai côtoyé pendant des années et c'est lui qui m'a initié à la gestion des affaires publiques au sein du ministère de l'Information et du Tourisme et de l'Artisanat. Il était mon ministre, mon professeur », raconte-t-il. Et de poursuivre : « C'est une personnalité aux multiples facettes, il fait partie de cette catégorie d'hommes politiques visionnaires et patriotiques dont on a vraiment besoin aujourd'hui alors qu'on planifie pour l'avenir de nos enfants ». Homme de culture par excellence aussi, le théâtre marocain a atteint, selon M.El Kohen l'apogée de sa gloire grâce à lui.

Le témoignage de Abdellatif Jabrou, journaliste émérite et militant de la première heure, a apporté un éclairage nouveau sur la vie professionnelle de Moulay Ahemd Alaoui, en tant que ministre de l'Information et en tant que chargé des relations avec la presse près du palais royal. « Il est difficile de parler d'une personne dont on ne partageait pas les idées politiques. Mais ce qui nous réunit, nous, Marocains, c'est le fait d'avoir fait partie du mouvement nationaliste », reconnaît-il, racontant par le menu détail les circonstances « spéciales » de leur première rencontre. Une rencontre qui allait être décisive pour la carrière de M. Jabrou. « Par pure coïncidence, j'ai rencontré Moulay Ahmed Alaoui et c'est cette coïncidence qui a fait que j'ai embrassé le métier de journaliste et que je m'y suis engagé pour toujours ». Car, pour ce chroniqueur arabophone, « deviser avec Moulay Ahmed avait un certain charme. Quand je faisais le déplacement avec lui dans le cadre des couvertures des activités royales, il discutait tout au long du trajet. A l'écouter je me rendais compte que je pouvais me passer de suivre des cours à l'université, tellement ses connaissances étaient immenses, il était une encyclopédie itinérante », témoigne M. Jabrou.

Témoignant à l'occasion, Moulay Abdelmalek Alaoui, le fils de Moulay Ahmed raconte qu'au fil des lectures qu'il lui a été donné de faire pour apporter son témoignage, il s'est rendu compte que son père « était un homme qui ignorait les procédures ». « Partisan de l'accélération, arpenteur infatigable des routes du Maroc, il visitait les villages les plus reculés et n'hésitait pas à aller sur le terrain pour voir ce qu'il était possible de faire », dit-il. « Beaucoup d'entre vous se rappellent de ses coups de fil intempestifs exigeant de trouver une solution à tel village ou tel village ». « Je crois qu'il est fondamental de se départir de certaines règles lorsque les intérêts supérieurs de la nation sont en jeu. Moulay Ahmed est une source d'inspiration pour beaucoup d'entre nous ».
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