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Pour un nouvel ordre de la communication

Ahmed KHAOUJA
Ingénieur télécom.

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Comment doit-on assurer une neutralité des médias à l'échelle planétaire, afin d'assurer une diffusion d'une communication juste et objective, à un moment où la terre est maillée de multiples réseaux de télécommunication dédiés aux médias.
Le terme « média » provient du mot latin, «medium -» désignant un ensemble de supports de communication. Le mot «information » provient du mot latin « informare» qui veut dire façonner. Même si les formes sous lesquelles l'information est diffusée par les différents médias évoluent, son rôle a toujours été d'une grande importance. Jusqu'à une date récente, le contenu véhiculé par les médias et qui constituait le principal canal d'information, était le plus souvent dicté par les Etats. Ce contenu était plutôt destiné pour une consommation locale contribuant ainsi un encadrement politique, social et économique des populations. Mais un grand changement s'est opéré vers la fin des années 80 avec l'apparition des médias privés qui diffusent à l'échelle internationale. Ces mass médias privés se sont mis à diffuser de l'information et des divertissements presque gratuitement, grâce à un modèle économique reposant principalement sur la publicité ou sur le soutien de certains Etats puissants notamment sur le plan financier.

Si certains affirment que ces mass médias modernes diffusant à grande échelle sont l'expression de la liberté, en s'engageant à l'instauration d'une culture transparente et pour tous, d'autres dénoncent leur neutralité et affirment que ces médias sont sans cesse à la quête de scoops et de thèmes nouveaux, parfois dramatiques sans se soucier des différents impacts sur les populations non préparées à recevoir ces quantités d'images.
En effet à titre d'illustration, l'absence de l'interactivité et d'un rapport de force entre les consommateurs de programmes audiovisuels et les producteurs, amène ces derniers à diffuser parfois des communications ne respectant pas l'éthique et la culture des autres ; et dans certains cas ils vont jusqu'à autoriser même la désinformation dans le but de faire de la manipulation médiatique. Ce qui a poussé certains experts de l'OCDE à désigner la médiatisation mondiale et la vitesse infinie de transport de mauvaises nouvelles comme l'une des causes responsables de la contagion mondiale de la sinistrose économique auquel on assiste. Pire parfois les médias sont au service du plus fort et ils deviennent ainsi l'expression de la domination économique et politique, comme l'affirmait M. Brezinski, ancien secrétaire d'Etat à la Maison Blanche (USA) qui avait soutenu « qu'après l'ère de la canonnière, et celle du commerce et des finances, les techniques et les réseaux de communication représentent la 3e génération de la domination du monde.” La méfiance de la neutralité des intermédiaires médiatiques n'est pas récente.

Elle remonte déjà au temps de la cité grecque, lorsque les philosophes se méfiaient de tout intermédiaire technique qui pouvait dénaturer le «logos », la raison.
Socrate refusait par exemple qu'on écrive ses pensées pour ne pas déformer ses propos. Les personnes méfiantes affirment aussi que le plus souvent les médias sont au service de l'Audimat. Le moment est venu pour inscrire l'évolution des médias dans une stratégie visant la réduction des conflits dans le globe et de contribuer à un vrai épanouissement social et culturel de l'humanité et en redonnant du vrai sens au mot information, car l'information n'a de sens que si elle est fiable et utile. Des mesures adéquates doivent être prises en amont pour réguler le contenu médiatique et en aval pour éduquer le public à mieux consommer le contenu diffusé par ces multiples médias. Il est ainsi question d'inculquer chez les humains récepteurs une éducation leur permettant d'avoir un regard critique sur le contenu qu'on leur présente.

Mais on peut envisager aussi des actions en amont par une prise de conscience, dans le cadre d'une concertation internationale, de l'importance de la mise en œuvre de règles et de normes de régulation. Car la régulation du contenu médiatique n'a de sens que si elle est conçue et appliquée à l'échelle planétaire. Tracer des lignes de conduite générales aux concepteurs de contenus, diffusés par les différents supports de communication, est devenu une nécessité impérieuse, car si le droit international consacre le principe de la liberté de l'information, cela ne signifie nullement d'en abuser pour porter atteinte aux droits des autres. On a vu ces dernières années comment on a utilisé la désinformation par les médias pour justifier des guerres ou des actions de grande ampleur et le plus souvent sans l'accord des opinions publiques.

Cette concertation internationale ne peut concevoir une régulation des contenus et ne peut aboutir à la mise en œuvre d'une société d'information équitable sans qu'on songe sérieusement à une réforme du système de démocratie internationale, et ce par l'institution de nouvelles règles pour les organisations, où les décisions stratégiques intéressant la communauté internationale, sont prises. Actuellement, les grandes nations démocratiques ne justifient leur présence au niveau des organisations internationales que par rapport à l'intérêt nourri par leur citoyen électeur ou par l'intérêt des différents lobbyings. Pire certaines de ces grandes nations n'hésitent pas à faire un usage abusif du droit de veto en s'appuyant sur la désinformation pour légitimer leurs objectifs le plus souvent à court terme et contre l'intérêt de la collectivité internationale.

Une réforme du système de démocratie internationale poussera nécessairement les pays puissants à s'occuper sérieusement pas uniquement de la mise en œuvre d'un nouvel ordre mondial de l'information, mais aussi des domaines qui semblent échapper aux décisions des politiques en local comme la protection de l'environnement contre les différentes pollutions ou l'instauration d'une bonne régulation financière à l'échelle internationale. Pour mener à bien ces réformes, il y a lieu d'imaginer, par exemple, un système de démocratie à l'échelle de la planète par des mécanismes appropriés où chaque citoyen aura son mot à dire dans l'élection des dirigeants des grandes puissances mondiales, étant donné que les décisions de ces dirigeants influent directement sur la vie des citoyens du monde.

En attendant, on peut envisager la création d'une sorte d'instance parlementaire mondiale en dehors de la structure des Nations unies. Le champ des attributions d'une telle structure serait limité aux problématiques qui concernent le global et non le local, c'est-à-dire les questions posées à plus d'un État comme celle des médias par exemple.
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