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La violence à l'égard des femmes a un coût !

Un rapport de l'organisation non-gouvernementale Global Rights a été présenté la semaine dernière au Comité contre la Torture des Nations unies, à Genève.

La violence à l'égard des femmes a un coût !
La femme continue de faire l'objet de nombreux actes de violence.
Le phénomène de la violence contre les femmes ne cesse de prendre de l'ampleur. Les résultats de la dernière enquête nationale réalisée par le Haut commissariat au plan (HCP) le prouvent. Quels que soient son niveau intellectuel ou son statut social, la femme continue à être l'objet de nombreux actes de violence dans notre société. Plusieurs voix appellent à y mettre fin. Seulement l'approche juridique est loin d'être suffisante pour contrer ce fléau, d'où la nécessité d'une loi qui incrimine cette violence. Dans le cadre de la promotion de cette loi, et pour convaincre le législateur de l'urgence de la situation, une alliance d'associations locales des droits des femmes, en collaboration avec l'ONG internationale Global Rights, a présenté, la semaine dernière, son rapport parallèle sur les violences faites aux femmes au Maroc au Comité contre la Torture des Nations unies, à Genève.

Les résultats de ce travail viennent avec de nouveaux arguments, surprenants certes, mais assez convaincants. En effet, selon le rapport élaboré par le bureau sur le terrain au Maroc de l'ONG internationale Global Rights, en collaboration avec Advocates for Human Rights et une alliance des ONG marocaines des droits des femmes, la violence à l'égard des femmes coûte cher, et ce à plusieurs niveaux. Lorsqu'il s'agit par exemple d'une femme démunie qui a été victime de violence et qui n'a pas les moyens pour se soigner, c'est l'hôpital qui prend en charge les frais médicaux. «Une fois, nous avons reçu une femme dans la trentaine qui souffrait de graves blessures au niveau de la tête et de l'épaule, suite à une violence conjugale dont elle a été victime. Son mari s'est enfui et elle était accompagnée d'une vieille voisine. L'hôpital a pris en charge tous les frais qui ont atteint 3 000 DH entre radiographie, analyses, médicaments…», rapporte une assistante sociale à l'hôpital Saniat Rmel à Tétouan, dont le témoignage figure dans le rapport.

Idem à l'hôpital Hassan II d'Agadir, où le coût des soins médicaux prodigués aux victimes de la violence, en majorité issues de familles démunies, varie entre 300 DH et 1 500 DH, selon les cas. «Si on suppose que cet hôpital accueille une moyenne de cinq cas de violence par jour, un simple calcul permet d'évaluer les pertes financières», renchérissent les auteurs du rapport.
Toujours dans le cadre des établissements sanitaires, les certificats médicaux délivrés aux femmes violentées coûtent chacun 100 DH au budget de la Santé à Khémisset, selon Global Rights.
Hormis ces pertes liées à la santé, la violence à l'égard des femmes coûte cher également aux ressources humaines et financières des entreprises. D'après le responsable des ressources humaines d'une usine de poisson à Agadir, une ouvrière qui s'absente à cause d'une violence peut couter à l'usine entre 300 et 700 DH par jour. Et puisque les cas d'absence sont presque quotidiens (en moyenne, trois à quatre femmes), l'usine perd chaque jour une moyenne de 2 500 DH.

A Ait Amira, un autre responsable des ressources humaines d'un champ agricole est obligé de faire chaque matin le trajet jusqu'à Ait Melloul, pour ramener entre 40 et 50 travailleuses journalières parce qu'il n'est jamais sûr de ses travailleuses habituelles. Et cela revient cher. Pour faire ce voyage, le responsable a besoin de quatre camionnettes et quatre chauffeurs dont le coût s'élève à 500 DH la camionette (entre frais du chauffeur et de carburant). Une facture salée. Enfin, la violence à l'égard des femmes serait également derrière des pertes au niveau de l'éducation nationale. «L'échec ou l'abandon scolaire sont l'une des conséquences de la violence conjugale. Tout élève ayant échoué et recommencé l'année scolaire coûte à l'Etat entre 5.000 et 7.000 DH par an», selon le rapport parallèle de Global Rights.

Le projet de loi, une priorité

Lors d'une réunion, la semaine dernière, entre des ONG et le Comité contre la torture des Nations unies, Halima Oulami de l'Association Amane pour le développement de la femme à Marrakech, a noté que le rapport de l'Etat marocain n'a fait aucune mention des violences faites aux femmes. Ceci malgré le fait qu'une étude récente ait démontré que 62,8% des femmes au Maroc avaient été victimes de violences et malgré les nombreuses déclarations gouvernementales depuis 2006 qu'une loi spécifique était imminente.
«Le manque de réponse efficace de la part des autorités empêche les femmes victimes à chercher de l'aide; le fait que dans 80% des cas reçus par notre association il n'y a pas eu de poursuites judiciaires montre bien des lacunes existantes», a expliqué Oulami. «Nous avons besoin d'une loi qui élimine le fardeau placé sur les victimes d'emmener des certificats médicaux et des témoins pour prouver la violence».
Lors de la session avec le gouvernement, les membres du Comité ont posé de nombreuses questions sollicitant des clarifications sur le calendrier de promulgation du projet de loi sur les violences faites aux femmes et des assurances que cette loi spécifique comportera des dispositions civiles et ne sera pas limitée à des simples réformes du Code pénal.
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