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L’avenir est dans le tourisme interne

Le ministre MP du Tourisme nous livre ici les grandes orientations de son département ainsi que les changements qu’il compte apporter à la gestion des projets en cours. Il opte ainsi pour la réalisation en one shot des stations, pour un rôle plus prégnant de l’Etat pour donner de l’assurance et drainer les investissements et pour un tourisme interne qui ne doit plus être la cinquième roue du carrosse.

L’avenir est dans le tourisme interne
Lahcen Haddad.

Le Matin : Commençons par l’actualité et le plan d’action du ministère qui devait être bouclé fin février. Où en êtes-vous ?
Lahcen Haddad : Vous savez, l’année 2011 a connu une stagnation par rapport aux arrivées et une régression des nuitées malgré le fait que les recettes ont augmenté de 4%. Le printemps arabe, la crise des marchés émetteurs, les événements d’Argana n’ont pas arrangé les choses. Je pense que ce sont les principaux facteurs qui ont été à l’origine de la petite performance du tourisme en 2011. Quant à 2012, c’est une année également difficile et cela sur le plan mondial. Nous sommes en train d’effectuer un état des lieux pour établir un plan d’urgence afin de faire face à cette conjoncture. En même temps, nous nous positionnons sur l’avenir, car il ne faut pas laisser de côté notre vision de faire du Maroc une destination phare. Il y a plusieurs leviers qu’on a identifiés. Primo, nous allons faire de la promotion ciblée dans les marchés touristiques émergents, Europe de l’Est, la Chine, et traditionnels comme la France, l’Espagne, l’Allemagne, etc. L’idée que l’on veut véhiculer a trait à un Maroc ouvert, sécurisé, moderne et jouissant d’une stabilité politique. C’est un peu cette exception marocaine que l’on veut mettre en avant. Dans le sens où on a réussi la démocratisation et le changement dans la continuité. C’est une révolution pacifique et consensuelle.

Concrètement, vous allez commencer par quel marché émetteur ?
Nous commençons avec le marché polonais. Nous allons nous déplacer sur le marché russe pour vendre la destination Maroc. L’Europe de l’Est en général et les pays scandinaves nous intéressent également. Nous travaillons aussi sur les marchés anglais et allemand qui ne sont pas affectés par la crise. Nous allons aussi voir les possibilités pour travailler sur le marché latino-américain et peut-être les combiner avec l’Espagne et le Portugal.

Qui dit nouveaux marchés, dit nouvelles offres. Avez-vous en perspective des idées pour satisfaire des touristes que l’on ne connait pas beaucoup ?
Bien évidemment. Nous avons étudié les six segments qui rentrent dans la définition des besoins. Par exemple, les Russes et les Polonais veulent le balnéaire. Ceux qui veulent combiner entre le balnéaire et le culturel, nous avons Agadir et Marrakech qui répondent à ce besoin. Pour ceux qui aiment le balnéaire et le désert, nous leur proposons Agadir et Ouarzazate. Vous savez, l’offre marocaine est déjà diversifiée dans un sens, mais nous investirons pour la rendre encore plus riche en développant le culturel, le tourisme naturel, les niches, etc.

Le budget de la promotion a considérablement augmenté entre 2010 et 2011. Allez-vous demandé encore plus ?
Je pense qu’il faut continuer à investir davantage dans la promotion. C’est celle-ci qui nous a permis, quand même, de réaliser 60 MMDH de recettes. C’est la promotion qui nous a permis d’être le premier contributeur en devises et dans la balance des paiements. Mais la promotion n’est pas seulement d’aller vendre la destination marocaine, c’est aussi faire du co-marketing avec l’aérien. Les compagnies aériennes, il faut les engager et les motiver pour qu’elles soient là.  

Le plan Azur a suscité plein de critiques. Aujourd’hui, on parle d’un recadrage du programme. Qu’en est-il ?
Le plan Azur a été conçu de façon à ce que le privé s’en charge. L’Etat fournit le foncier et c’est le privé qui se charge de la mise en place des stations. Ensuite, il y a le phasage qui consiste à morceler la réalisation des stations. Ce sont deux hypothèses qui n’ont pas marché. La première, parce qu’il y a eu un essoufflement du privé, surtout avec les crises qui ont commencé depuis 2008. Ensuite, le fait de construire par étape ne donne pas une capacité critique en termes de lits qui permet d’avoir le maximum de touristes et rentabiliser la phase en question. On a donc revu tout cela. Dans le tour de table des stations, le public sera présent aux côtés du privé. On a alors créé le Fonds marocain de développement touristique, doté de 1,6 milliard de DH pour rassurer et drainer plus d’investissements. En plus, on s’adosse plus sur des institutionnels marocains, comme la CDG, que sur des étrangers. La deuxième chose, on va désormais réaliser les stations en one shot. Lors de la réunion que j’ai tenue concernant la station de Taghazout, nous avons pris la décision de construire tous les hôtels en même temps au lieu que ce soit par phase. Nous sommes aussi en train de voir comment développer des stations qui sont proches à des destinations. Car Saïdia n’était pas proche d’une destination. En plus, elle souffre d’une grande saisonnalité. Aujourd’hui, l’on travaille sur cette station pour accroître la capacité. Quant à la station de Taghazout qui s’étend sur 615 hectares, nous avons déjà apuré tout le foncier et tout est prêt pour le démarrage. Nous travaillons aussi sur la station Mogador d’Essaouira où il y a déjà un golf et un hôtel pour disposer d’une meilleure capacité en 2014-2015. En ce qui concerne Taghazout nous prévoyons une bonne capacité hôtelière en 2016. Nous allons aussi travailler sur la station de Lixus, proche de Tanger, en one shot. Nous allons aussi passer à la deuxième phase de Mazagan qui s’adosse sur Casablanca. Ce sont là les stations prioritaires. Ce qui ne veut pas dire que l’on va oublier les autres. C’est une question de hiérarchisation basée sur des critères rationnels.

L’on se pose souvent la question sur le risque que les institutions de l’Etat prennent en allant à la rescousse de stations abandonnées en cour de route par certains investisseurs étrangers…
D’abord les interventions de l’Etat sont des actions rentables. Sauf que la rentabilité d’un produit touristique se fait dans le long terme. C’est la raison pour laquelle la CDG est intéressée. Elle ne va pas intervenir si elle ne dispose pas d’un business plan montrant une bonne profitabilité. Le tourisme est une entreprise hautement capitalistique. L’Etat, à travers le Fonds de développement touristique, est là pour accompagner. Mais une fois les projets se maintiennent sur les rails, il va automatiquement se retirer.


Comment vaincre la saisonnalité dans une station comme Saïdia pour la rendre profitable ?
C’est une bonne question. Pour lutter contre la saisonnalité, il faut créer autour de la station des activités et des animations. Aujourd’hui, il n’y a pratiquement rien. Nous voulons augmenter le temps d’ouverture de la station à 6 voire 7 mois et sur toute la côte méditerranéenne. Dans la vision 2020, nous avons développé toute sorte de produits pour y arriver. Notre rôle aujourd’hui c’est de développer une stratégie pour réaliser les orientations de la vision 2020 qui a fait l’objet d’un consensus national. Il y a tout un travail stratégique de priorisation, de mise en place des structures et des investissements et de préparation du foncier.

Où en êtes-vous en ce qui concerne les agences de développement touristiques ?
Le modèle de gouvernance est très important. Ainsi, l’activité touristique est transverse, elle dépend de plusieurs acteurs. Ces derniers interviennent directement ou indirectement dans les activités connexes ou dans le produit touristique. Donc, pour avoir une meilleure gouvernance, il faut créer des instances qui peuvent inclure tous ces intervenants publics et privés.
C’est pour cela qu’on a pensé à une haute autorité du tourisme. Dans chacun des huit territoires que l’on va développer il y a une agence de développement touristique. C’est une sorte de guichet unique pour le tourisme et veille aussi au développement des produits touristiques, les kasbahs, les ksours, les itinéraires, les musées, et il fait la promotion en même temps. Nous allons nous mettre à la tâche très bientôt pour mettre en place ce schéma de gouvernance.


Qu’en est-il du plan Biladi qui chaque fois reçoit des salves de critiques sur son inconsistance ?
J’ai récemment visité la station d’Imi Ouaddar à Agadir. Je pense qu’elle sera opérationnelle à l’été 2013. La station d’El Jadida a été déjà donnée à un investisseur. Il reste juste un problème de foncier qu’on est en train de régler. Il y a aussi la station de Mehdia où l’on a apuré le foncier pour commencer les travaux. Au niveau de Taza, nous disposerons aussi d’une station. Outre les stations, nous allons aussi développer les clubs Biladi surtout dans les grandes stations balnéaires et montagneuses. Il faut avoir une offre dans le nord, par rapport aussi à Saïdia, dans le Moyen Atlas et la région de Taza, à Agadir, etc. Là où vont les Marocains, il faut avoir une offre et bien la maîtriser. Les Marocains veulent un cadre familial avec des animations pour les enfants et à des prix abordables. Vous savez, le tourisme interne est le deuxième après celui des Français en termes de recettes. A long terme, le tourisme interne doit être le premier contributeur. Aujourd’hui, l’offre Biladi doit être diversifiée en tenant compte aussi des besoins d’une classe moyenne multiple. Nous allons segmenter la classe moyenne pour avoir des offres propres à chacune des populations cibles. Ce qui a sauvé Marrakech en 2011 ce sont les touristes marocains. Donc, il s’agit là d’une catégorie très importante qu’il faut développer et satisfaire.

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