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Le ciblage n’est pas aussi facile qu’on le croirait

C’est une Arlésienne. La réforme de la caisse de compensation revient chaque année au fronton du débat public. Cette fois-ci, les circonstances sont différentes et le changement se fait au forceps : fortes hausses des prix du carburant et répercussion prévue de ceux du transport des personnes et des marchandises.

Le timing de ces hausses tombe très mal avec la descente du prix du baril en dessous de la barre de 100 dollars. Soit donc dit d’emblée, l’indexation des prix à la pompe sur ceux des cours mondiaux du baril n’est pas d’actualité. D’ailleurs, elle n’a jamais été considérée comme une option par les gouvernements successifs. Aujourd’hui, les raisons avancées par le Chef du gouvernement n’ont rien à voir avec ces calculs exogènes. Les temps sont durs. Presque 80% du budget de la compensation a été consommé en 5 mois, soit déjà plus de 32 MMDH, tandis que le gain estimé suite aux hausses des prix des carburants et fuel est d’à peine 10 MMDH.

Tous le monde doit mettre la main à la poche pour sortir de ce goulot d’étranglement qui se caractérise par une année agricole de vache maigre (-43% de récolte céréalière avec une valeur ajoutée agricole en baisse de presque 10%). Le HCP a porté un grand coup de rabot à la croissance qui doit se fixer, selon ses dernières estimations, à 2,4% en 2012.

Aussi impopulaire qu’elle soit, la décision d’Abdelilah Benkirane d’augmenter les prix du carburant, vient à la rescousse du Budget de l’Etat et surtout l’investissement public qui doit garder un rythme soutenu. La facture politique et électorale sera, certainement, lourde à payer pour le PJD. En contrepartie, Benkirane promet une réelle réforme de la compensation basée sur le ciblage. Jusqu’ici rien de nouveau par rapport à ce que ses prédécesseurs ne cessaient de promettre. Des missions ont été organisées dans certains pays ayant réussi la réforme de leurs systèmes de compensation des produits de base. Le Brésil, le Chili ou encore le Mexique sont des sucess stories qui auraient inspiré nos décideurs. Les transposer au cas marocain est une autre paire de manche. Car combien même la volonté politique puisse être réelle, intermédiaires, spéculateurs, industriels, grands agriculteurs représentent autant de pierres d’achoppement. Certes, la subvention des produits de base pèse lourd sur les finances de l’Etat (5 % du PIB en 2011). Mais, dans la réalité, et si l’on se réfère à la carte de la pauvreté établie par le HCP, les communes rurales et urbaines qui ont le plus besoin de la compensation n’en profitent que peu ou prou. Par contre, les grands agriculteurs, par exemple, trouvent bien leur compte dans une bonbonne de gaz à 40 DH, utilisée pour extraire l’eau d’irrigation.

Par ailleurs, en augmentant le prix du carburant et en gardant intact celui de la bombonne de gaz, ce sont surtout les ménages de la classe moyenne qui passent à la caisse. La consommation s’en ressentira et partant la dynamique de l’économie. Si, le gouvernement n’ose pas encore s’attaquer aux lobbies qui cassent la chaine de la distribution des produits alimentaires subventionnés comme la farine et le sucre, toute tentative de réforme de la caisse de compensation serait vaine. La révision de la structure des prix est un acte certes courageux, mais insuffisant. En février 2009, la révision appliquée aux produits pétroliers a permis à l’Etat de gagner plus de 1MMDH. La suppression du coefficient d’adéquation (2,5%) a joué le rôle de digue face aux marges supplémentaires dont bénéficiaient les sociétés importatrices. Mieux encore, cette réforme a rendu plus lisible le tableau des prix des produits pétroliers en réduisant le nombre des postes de 17 à 7 seulement. Autre opération liée directement au ciblage concerne le programme Tayssir.

Le nombre des bénéficiaires de ce programme, qui conditionne l’aide directe à la scolarisation, a atteint, en 2011, 660.000 enfants ou 270.000 familles. Sur la base des résultats cumulés dans 12 régions et 40 provinces, le taux d’abandon aurait baissé de 60%. Ce soutien financier d’une moyenne de 200 DH par famille, initialement destiné au primaire, a été étendu au collège. Toutefois, la solution du ciblage pourrait paraitre irréalisable si chaque catégorie de la population s’accroche à ce qui est devenu, avec le temps, un acquis. Le gouvernement Benkirane aura la lourde tâche de choisir entre une réforme du système ou d’opter pour d’autres programmes d’appoint comme l’aide directe conditionnée.

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