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Les jeunes et le jeûne

Beaucoup de familles encouragent leurs enfants à jeûner le 26e jour du Ramadan. Elles profitent de la Nuit du Destin pour les récompenser et en faire les stars de cette soirée à connotation religieuse.

Les jeunes et le jeûne
Les enfants qui jeûnent pour la première fois sont les stars de Laylat Al Qadr.

Le premier jeûne d’un enfant est une expérience marquante qui reste gravée dans sa mémoire durant toute sa vie. Et pour conférer à cet événement la dimension particulière qu’elle revêt, beaucoup de familles marocaines encouragent leurs enfants (vers l’âge de sept ans) à jeûner le 26e jour du mois de Ramadan. Le choix de cette date n’est pas fortuit. Car il permet de coïncider cet événement particulier dans la vie de l’enfant avec la célébration de Laylat Al-Qadr ou la Nuit du Destin. Après la rupture du jeûne, les enfants se parent de leurs plus beaux atours. Ainsi, les garçons se vêtent d’une djellaba ou d’un Jabador accompagnés d’un tarbouche tandis que les filles portent un caftan traditionnel ornementé de bijoux et des babouches. Parfois, on fait même appel à des negaffates, ces spécialistes de la mise en beauté des mariées, pour préparer les jeunes filles comme une mariée justement : elles sont alors coiffées, maquillées et peuvent même s’installer dans des «ammaria». Sans oublier que la cérémonie de henné est souvent de mise. Bref, les jeunes jeûneurs sont les stars incontestées de la soirée. C’est ce qui explique que tout le monde soit au petit soin pour eux. On sert à l’enfant ses plats préférés, une manière de le récompenser de sa patience.

Avant de jeûner une journée complète «comme un grand», certains enfants commencent à s’y préparer graduellement.
Ils font ainsi ce qu’on appelle «takhyat nhar» qui veut dire littéralement «coudre la journée», cela revient à jeûner deux demi-journées pour que ça compte au final comme une journée entière. Adil se souvient de ce que lui disait sa grand-mère quand il était jeune : «Le premier jour, tu jeûnes le matin, le deuxième, l’après-midi. Je les coudrai pour en faire une journée complète». La plupart des enfants considèrent le jeûne du Ramadan de la même façon qu’ils regardaient l’école quand ils étaient en maternelle : comme un monde réservé aux grands dont ils se sentent exclus et qu’ils s’impatientent de rejoindre.

Le jeûne du Ramadan marque pour ainsi dire l’entrée de l’enfant dans l’âge adulte qui lui permet d’apprendre à accepter les notions de contrainte et de privation. «La première fois que j’ai essayé de jeûner en entier fut un échec, raconte Brahim. J’avais douze ans. On m’avait envoyé chercher du pain quelques heures avant le coucher du soleil, mais je n’ai pas pu résister à la tentation et j’ai avalé une bouchée de pain sur le chemin du retour. Ce n’est que quand le concierge me rappela gentiment à l’ordre que je me rendis compte de ma faute. C’était à la fois une terrible blessure narcissique et une merveilleuse leçon. Je compris alors, inconsciemment sans doute, que ce n’était pas un jeu, que je ne pouvais pas arrêter dès que ça me semblait difficile. J’ai compris ce que voulait réellement dire le mot “engagement”. C’est une des valeurs clés du monde adulte : on la retrouve dans le milieu professionnel, dans le mariage… Il est intéressant de voir que le Ramadan permet de l’apprendre dès la puberté.»

Sur le plan médical, il faut être vigilant. Chaque chose doit néanmoins se faire en son temps. Les jeunes doivent attendre d’être physiquement aptes pour se mettre à jeûner une semaine ou un mois en entier.
Selon les spécialistes, il y a d’abord les risques de malaises dus au déséquilibre alimentaire. Le cœur et le cerveau de l’enfant nécessitent un approvisionnement soutenu en sucres, jeûner peut donc entraîner des cas d’hypoglycémie. L’enfant peut aussi souffrir de déshydratation. En effet, le pourcentage d’eau dans son corps est supérieur à celui de l’adulte, son organisme perd donc de l’eau plus rapidement. Un régime déséquilibré entraîne aussi des carences nutritionnelles en vitamines et en lipides, l’enfant risque donc de perdre ses capacités, et manquera de concentration s’il est en période scolaire. Il est évidemment exclu de jeûner pour tous les enfants malades.

Pour les enfants qui jeûnent, il est indispensable d’adapter les plats à leurs besoins nutritionnels. Ce dernier ne doit pas calquer son régime sur celui des adultes. Il a surtout un besoin en sucres lents (pâtes et riz), mais aussi en légumes, en protéines et en fruits. Or on sait que ce n’est pas ce qui est généralement servi sur la table du ftour.
Comme un enfant doit toujours prendre son petit-déjeuner, s’il lui arrive de jeûner, le s’hour est donc indispensable.

Il a besoin d’un ftour, d’un dîner et d’un s’hour, encore plus qu’un adulte. Les dépenses énergétiques sont aussi plus importantes à l’enfance : les jeunes ont besoin de calories, ce qui pose problème lorsqu’on concentre la nutrition sur une petite durée. Enfin, l’enfant a aussi besoin de beaucoup de sommeil.

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