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Quand nos «amortisseurs» ne fonctionnent plus

Le «mal du siècle», une expression commune pour désigner le mal de dos. La hernie discale en est l’une des causes. Cette affection des disques intervertébraux se caractérise le plus souvent par une lombalgie ou une sciatique et touche 30% de la population marocaine.

Quand nos «amortisseurs»  ne fonctionnent plus

Le «petit mal de dos» concerne 50 à 70% de la population. «C’est l’une des premières sources d’absentéisme au travail», affirme le professeur Najia H. Hassouni, rhumatologue, ancien doyen de la Faculté de médecine et de pharmacie de Rabat et actuelle présidente de l’AMAR (Association marocaine de rhumatologie et d’aide sociale aux rhumatisants).

Selon la spécialiste nous aurions mal au dos, parce que nous marchons sur deux «pattes». «Les animaux à quatre pattes ont la même répartition des pressions sur l’ensemble de leurs disques intervertébraux que nous. L’homme, en ayant acquis la station debout, a du coup une pression beaucoup plus élevée dans la région lombaire (bas du dos), d’où la fréquence des lombalgies et des statiques à ce niveau», explique-t-elle.
En effet, la colonne vertébrale est constituée de vertèbres séparées entre elles par des disques intervertébraux. Ces disques jouent le rôle d’«amortisseurs» de pression pour la colonne vertébrale et facilitent le mouvement. Chaque disque est constitué d’un anneau fibreux au milieu duquel existe un noyau gélatineux très souple. Ainsi, en station debout, les disques de la colonne s’usent plus facilement et se tassent. En effet, avec l’âge et certains facteurs favorisants, ces lamelles fibreuses peuvent se fissurer et atteindre le noyau gélatineux. Cette substance contenue dans le noyau glisse alors en arrière et fait saillie dans le canal rachidien. C’est ce que l’on appelle une hernie discale. Celle-ci peut aussi bien passer incognito, qu’être extrêmement douloureuse pour le patient. «Environ 15% des personnes âgées de 30 à 50 ans sont porteuses d’une hernie discale qui ne provoque absolument aucun signe», précise la spécialiste.

Pour que la douleur se réveille, il faut qu’il y ait compression du ligament intervertébral postérieur. «Selon l’étage, nous aurons affaire à une maladie différente. Au bas du dos, on parlera de lumbago mieux connu sous l’appellation “tour de rein”. Au niveau du cou, ce seront des cervicalgies aiguës et, entre les deux, des dorsalgies», explique-t-elle. Si le glissement se poursuit plus loin, cette hernie discale peut alors comprimer les racines d’un nerf, provoquant une réaction bien plus douloureuse. «La plus fréquente est la compression d’une des branches du nerf sciatique au niveau du rachis lombaire (bas du dos). Il peut aussi s’agir plus haut de cruralgies, ou encore au niveau du rachis cervical (cou) de névralgies cervico-brachiales», poursuit la même source. En ce qui concerne le traitement de la hernie discale, «la douleur pourra être soulagée par la prise de paracétamol ou d’un médicament opioïde faible ou fort, associé à une prise d’anti-inflammatoire non stéroïdien pour traiter l’inflammation». Et pas question de déroger à la prescription de votre médecin, le traitement doit être suivi à lettre. «Le traitement doit être pris régulièrement et pas seulement quand la douleur se réveille. Prendre la dose maximale d’emblée afin de lutter efficacement contre le processus de l’inflammation et contre la douleur». Bien suivi, ce traitement amène habituellement la guérison dans les trois mois pour 75% des malades. Mais parfois, il arrive que la douleur soit tenace. «Si, en ayant suivi ce traitement 2 à 3 semaines, la douleur n’est pas soulagée, des infiltrations de corticoïdes par voie épidurale, effectuées par le rhumatologue entre deux vertèbres, peuvent être réalisées», affirme la rhumatologue. Il est aussi possible que votre médecin préconise le port d’un corset pour soulager le dos.

Interrogée au sujet de la chirurgie pour éradiquer complètement le problème, notre spécialiste est catégorique : «Il faut rappeler que la chirurgie doit rester limitée à des situations précises. Actuellement, ce recours n’est nécessaire que dans environ 5% des cas.» De plus, rien n’empêche une nouvelle crise. C’est pourquoi elle conseille aux patients d’adopter de bonnes habitudes. À savoir, déjà, que «le repos strict est à réduire au minimum», avertit le médecin. Durant longtemps, rester alité était la recommandation principale des spécialistes. Aujourd’hui, des études ont montré qu’il valait mieux ne pas excéder un jour ou deux de repos. «En effet, une période de repos prolongée peut entraîner un déconditionnement progressif sur le plan musculaire et articulaire ainsi qu’au niveau cardio-respiratoire, ce qui signifie que le dos perd progressivement la capacité de répondre aux nécessités de la vie quotidienne», déclare la spécialiste.
Mieux vaut donc encourager la poursuite d’une activité la plus normale possible, dans la limite du supportable. «Marche à pied et natation sont des activités bénéfiques pour prévenir la hernie et ses complications», commente Najia H. Hassouni. En effet, la pratique d’une activité physique permet d’entretenir la musculature du dos et la condition physique, tout en procurant une sensation de bien-être liée à l’effort musculaire.

Enfin, il est également utile de respecter quelques conseils d’hygiène du dos comme : «Éviter de porter des objets lourds ou le faire avec un corset, toujours se baisser en fléchissant les genoux, contrôler sa posture assise, en évitant le dos rond et éviter aussi de croiser les jambes», conclut la spécialiste.

 

Explications :

professeure Najia Hajjaj-Hassouni, Présidente de l’AMRAR

«15% de personnes sont porteuses d’une hernie discale sans le savoir»

❶ Comment savoir que l’on a une hernie discale ?
Parfois, on ne le sait pas, justement. En effet, il a été démontré grâce à l’imagerie par IRM ou par scanner qu’environ 15% des personnes de 30-50 ans sont porteuses d’une hernie discale sans le savoir. Elle ne donne lieu à des symptômes que lorsqu’elle vient comprimer des structures anatomiques très riches en nerfs et dont la compression va provoquer des douleurs. Lorsque le patient se plaint d’une douleur dans le bas du dos, on parle de lombago ou lombalgie mieux connue sous l’appellation «tour de rein». La sciatique, elle, concerne une douleur allant du rachis lombaire jusque dans la jambe.

❷Justement, parlons des complications…
La douleur peut devenir intolérable et résistante aux antalgiques majeurs (opiacés). Parfois, la compression du nerf est importante et peut être à l’origine de paralysie qui peut être très grave lorsqu’elle réalise ce que l’on appelle «le syndrome de la queue de cheval». Ce syndrome se caractérise par l’apparition de signes sphinctériens (incontinence ou au contraire rétention), d’une diminution de la sensibilité (hypoesthésie) du périnée ou des organes génitaux externes. Devant toute situation clinique risquant de mener à une telle situation et qu’évaluera le médecin, le traitement chirurgical est une grande urgence.

❸ Quels sont les facteurs de risques, les causes ?
On considère que le fait d’avoir déjà fait une sciatique prédispose aux rechutes. De même l’excès de sollicitation de la colonne vertébrale (sports de haut niveau, ports de charges lourdes régulières, travaux pénibles, etc.) peut aussi prédisposer à tous les problèmes du rachis lombaire, dont la hernie discale. On parle aussi de facteurs environnementaux (le tabagisme ou l’athérosclérose). Sont incriminés également les gènes codant pour le récepteur de la vitamine D.

❹ Quand consulter  et qui ?
Devant toute douleur inexpliquée et persistante, il faut rapidement consulter. Le rhumatologue est le spécialiste à consulter en première intention. La collaboration entre le rhumatologue, le médecin généraliste, la médecine physique et la réadaptation fonctionnelle permettra un suivi efficace et une bonne prévention des rechutes.

❺ Quels traitements utiliser pour soulager ou faire disparaître  la sciatique ?
Le paracétamol ou un médicament opioïde faible ou fort pour soulager la douleur et l’anti-inflammatoire non stéroïdien pour lutter contre l’inflammation. Ce traitement, correctement suivi, amène la guérison dans les trois mois pour 75% des malades. Pour les 25% restants dont la douleur n’est pas calmée après 3 semaines de traitement, des infiltrations de corticoïdes par voie épidurale, effectuées par le rhumatologue entre deux vertèbres, peuvent être réalisées. On peut aussi soulager le dos par le port d’un corset. Il faut rappeler que la chirurgie doit rester limitée à des situations précises, d’autant que cet épisode de sciatique sera le plus souvent unique. Actuellement le recours à la chirurgie n’est nécessaire que dans environ 5% des cas.

❻ Y a-t-il des risques de récidive ?
La rechute est possible. Il n’existe aujourd’hui aucun traitement capable de «guérir» définitivement le disque intervertébral lésé. Quelques essais de prothèse discale existent aujourd’hui, mais leur effet et leurs dangers ne sont pas encore bien connus. Mieux vaut donc les éviter.

❼ Comment prévenir l’apparition  d’une hernie discale ?
Être actif et ne pas rester trop alité. Je conseille la marche à pied ou la natation. En effet, la pratique d’une activité physique permet d’entretenir la musculature du dos et la condition physique, tout en procurant une sensation de bien-être liée à l’effort musculaire. Il faut respecter les quelques conseils d’hygiène du dos, notamment éviter de porter les objets lourds (sans corset), fléchir les genoux pour se baisser, ou encore contrôler sa posture assise, en évitant le dos rond. La rééducation médicale joue ici un rôle majeur, en aidant le malade à corriger ses postures nocives pour la colonne vertébrale, et en lui permettant de passer en confiance à une phase active.

❽ Quelle population est la plus touchée et pourquoi ?
Les lombalgies et lombosciatiques, dues à une hernie discale surviennent le plus souvent dans la tranche d’âge 30 à 65 ans, même s’ils existent chez des sujets plus jeunes ou plus âgés. La fréquence est pratiquement égale chez les hommes et les femmes. Elle peut varier en fonction de la pénibilité du travail exercé. Elle tend à diminuer avec l’âge.

❾ Quelle est sa prévalence au Maroc ?
La prévalence au Maroc doit être exactement la même que partout ailleurs. Par ailleurs, une enquête que nous avions réalisée auprès des rhumatologues marocains en 2001 avec la Ligue internationale de rhumatologie, puis auprès des rhumatologues nord-africains en 2006 avec la Société française de rhumatologie avait montré qu’au Maroc, aussi bien qu’en Algérie et en Tunisie, les lombalgies et les lombosciatiques représentaient 30% des pathologies que traitaient les rhumatologues, ce qui représente un chiffre très élevé.

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