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Quelle alliance à l’heure des changements ?

● Bouchra RAHMOUNI BENHIDA
Professeur à l’Université Hassan Ier Auteure de plusieurs ouvrages de géopolitique

Quelle alliance à l’heure  des changements ?
Modernisme • Permettre aux Marocains de devenir des sujets actifs de l’Histoire. bPh.AFP

Contrairement aux idées reçues, les analyses géopolitiques peuvent être utilisées non seulement dans le cadre des relations interétatiques, mais aussi pour les besoins de l’analyse de l’inscription territoriale des rapports de force au sein d’un même pays. Et ce, même si certains experts refusent encore l’idée de l’adoption de l’approche géopolitique aux fins de l’exploration des processus sociaux, politiques, ethniques... ou autres prévalant à l’intérieur des mêmes frontières. La notion de géopolitique interne se plie à la définition de la géopolitique prise dans son sens large et le respect de la règle qui stipule l’analyse de la rivalité sur un territoire est bien fondé. Le territoire représentant dans ce cas le pays et les rivalités se faisant entre ethnies, genres, groupes sociaux ou entre partis politiques. La femme peut aussi se retrouver au centre des stratégies, des tactiques et de l’opportunisme politique visant à imposer un mouvement ou une idéologie sur un territoire infranational et sur sa population. L’enjeu étant dans ce cas le contrôle d’une ville ou d’un quartier. La jeunesse peut à son tour façonner le paysage géopolitique interne. Le cas du Sénégal est éloquent à cet égard. En 2000, Abdoulaye Wade avait fondé sa stratégie électorale sur le vote des jeunes. 65% des personnes âgées de 18 à 30 ans l’avaient d’ailleurs élu. Ces mêmes jeunes l’ont réélu en 2007, pour lui retirer leur confiance en 2012.
Il paraît dès lors évident que la stabilité politique, la cohésion sociale, l’égalité des genres, le dialogue interculturel soient en perpétuelle évolution de façon à être en phase avec les aspirations des citoyens et à réussir ainsi à mobiliser, dès que nécessaire, une énergie réformatrice, considérée comme la voie privilégiée vers une nation plus juste, plus équitable et plus performante.

Dès l’accession de S.M. le Roi Mohamed VI au Trône, le Maroc, de tous les pays de la région, a revisité son rapport au temps. Au temps tactique, il a substitué le temps stratégique, préférant construire l’avenir au lieu de se résigner au présent d’alors. Le monarque, en plus d’agir en homme d’État, agit en homme d’action et en homme de pensée en prenant en considération des enjeux stratégiques afin d’amorcer un processus de croissance durable et de développement, au cœur de la mondialisation qui perturbe les anciens repères et crée des tensions de tous ordres. Pour la première fois depuis sa création, le Conseil supérieur des Oulémas est inscrit dans la Constitution de 2011. Une instance dont les femmes et les hommes qui la composent devraient s’engager intellectuellement et pratiquement afin de proposer, entre autres, des moyens de consolidation des liens entre l’éthique et l’action publique, économique et culturelle pour accompagner le Royaume dans son choix, sans appel, d’emprunter la voie d’un Maroc plus juste, plus équitable et plus démocratique. Une contribution qui se voudrait active aux débats et aux défis de notre époque avec une même idée universelle de la liberté, de la démocratie et du savoir, sans avoir à s’agenouiller devant «l’idéal» occidental et sans avoir à subir une acculturation. Une façon de permettre aux Marocains de devenir des sujets actifs de l’Histoire. Le Code de la famille, réformé en 2004 et dont les acquis sont consolidés dans l’article 19 de la nouvelle Constitution, est considéré comme un cas exemplaire de législation fondée sur l’Islam et qui met en partie en œuvre les idées de justice sociale et d’égalité des genres défendues par l’universalisme démocratique. De nombreux chantiers restent, cependant, à engager, telles la révision du Code pénal, la politique de discrimination positive et l’évolution des mentalités pour une meilleure condition des femmes.

S’il est un critère qui semble toutefois compter, c’est la manière dont les réformes intervenues dans le contexte marocain ont semblé contenter une large partie de la population. Les dynamiques locales montrent que les changements sont en marche et que les responsables politiques sont conscients des défis. Des défis qui ne peuvent être relevés qu’avec une forte implication de la société civile, dont la reconnaissance du rôle a été jusqu’à faire, sur décision du Souverain, du 13 mars de chaque année une Journée nationale de la société civile. Il est à noter que c’est à l’initiative de cet acteur, incontournable dans les sociétés modernes que plusieurs sujets ont été inscrits dans l’agenda politique, tels la situation de la femme, l’interdiction de l’emploi des filles dans les foyers, le mariage des mineures et la liberté de la presse. Il convient à juste titre de rappeler que la dynamique de la société civile au Maroc s’est renforcée également via la mise en place de plusieurs instances spécialisées, ce qui traduit le renforcement de plus en plus du concept de la citoyenneté, notamment par l’adoption d’une loi relative aux associations et de la loi sur l’initiative législative.

Conforté et bien ancré par la nouvelle Constitution, le mouvement bottom-up, qui a démarré au Maroc au milieu des années 2000 avec la montée de l’action revendicatrice issue des médias et de la société civile, a contribué à un renforcement du chemin démocratique emprunté par le Maroc. Un chemin dont toute déviation compromettrait l’ensemble des réformes entreprises sur tous les plans social, économique, politique et institutionnel. Des réformes qui induisent en douceur des changements décisifs relativement à l’avenir du Royaume en tant que futur pôle régional de développement et de croissance durables et à son avenir sur l’échiquier régional et international. Rabat n’est-elle pas en train de s’ériger en pôle régulateur conforté par le soutien ferme des puissances occidentales et des monarchies arabes ? Le Maroc pense, innove et intègre de la cohérence grâce à l’élan modernisateur initié par S.M. le Roi Mohammed VI, élan dont dépendent la stabilité interne et la continuité de l’État. 

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