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Une nouvelle épreuve de force entre le ministère de la Justice et l’Association des barreaux du Maroc

L’Association des barreaux du Maroc s’élève contre l’avant-projet de loi relatif à la procédure civile. Un nouveau boycott des audiences est prévu aujourd’hui en signe de protestation. De son côté, le ministre de la Justice et des libertés, Mustapha Ramid, prend ses précautions. Dans une réunion à distance avec les responsables judiciaires dans les tribunaux, il les a incités à faire le nécessaire pour assurer le bon déroulement des audiences.

Une nouvelle épreuve de force entre le ministère  de la Justice et l’Association des barreaux du Maroc
La réforme de la justice nécessite la conjugaison des efforts de tous les intervenants.

Le torchon brûle à nouveau entre l’Association des barreaux du Maroc et le ministère de la Justice et des libertés. En effet, après un premier sit-in organisé jeudi dernier dans les différents tribunaux du Royaume, en protestation contre les avant-projets de loi relatifs à la procédure pénale et civile, les avocats récidivent aujourd’hui. Un boycott général des audiences au niveau national sera observé, apprend-on auprès de sources proches du dossier.
Pour contenir la situation, le ministre de la Justice et des libertés, Mustapha Ramid, s’est empressé de s’entretenir, en visioconférence, avec les responsables judiciaires au sein des Cours d'appel afin d’examiner les moyens à même de garantir le bon fonctionnement du service judiciaire au niveau des tribunaux. Cette réunion s’est soldée, selon un communiqué du ministère, par l’adoption d’une approche unifiée, prenant en considération le respect des pouvoirs des juges dans la gestion des audiences, conformément à la loi. Une approche qui permettra la tenue des audiences à l'heure, la possibilité de retarder les dossiers qui ne sont pas prêts et dont les avocats sont mandatés, ainsi que la mise en œuvre des mesures juridiques face à toute violation grave du fonctionnement normal des audiences, lit-on sur le communiqué.

À l’évidence, la réaction du ministère n’a pas été appréciée des avocats. Maitre Abdelkébir Tabih, avocat au Barreau de Casablanca, affirme qu’il s’agit là d’une ingérence du ministère dans le travail des magistrats. Selon lui, les instructions données par le ministre ne peuvent être adressées au parquet, mais plutôt aux juges, car c’est eux qui sont habilités à retarder les dossiers selon l’article 47 de la procédure civile. Dans ce sens, l’avocat s’interroge sur les bases juridiques et constitutionnelles d’une telle ingérence. L’origine du désaccord entre les avocats et le ministère de la Justice ne date pas d’aujourd’hui. Depuis l’élaboration de la nouvelle charte relative à la réforme de la justice en fin 2013, les avocats ont exprimé leur refus du projet en manifestant devant le Parlement. Le ministre de tutelle avait quant à lui qualifié le mouvement des avocats de «perturbateur».

Aujourd’hui, les projets de réforme des procédures pénale et civile aggravent la mésentente entre les deux parties. Dans un article publié dans la presse nationale, l’avocat Abdelkebir Tabih a tiré à boulets rouges sur l’avant-projet de loi du Code de procédure civile. Selon lui, ce projet qui réduit la mission des avocats dans plusieurs domaines constitue une violation de la Constitution, surtout en ce qui concerne son 44e article. «Ce projet risque de priver le citoyen de ses droits à la défense et de tuer, en même temps, le métier d’avocat qui est considéré comme le deuxième recruteur après l’État des lauréats des universités», lit-on dans un article de M. Tabih. L’avocat demande au ministre de la Justice de justifier clairement les raisons qui se cachent derrière la volonté de changer le Code actuel, supprimant ainsi tous les efforts judiciaires entrepris depuis des années pour le modifier.

Un désaccord profond

La réponse du ministère ne s’est pas fait attendre. L’un des proches conseillers du ministre de la Justice et des libertés s’est chargé de la rédaction d’un article qui a été repris par la presse nationale. Le texte énumère «sept sophismes» commis par Maitre Tabih dans son analyse de cet avant-projet. En effet, l’auteur de l’article, Jaouad Ghassal, défend la constitutionnalité des dispositions du texte qui «continue de faire l'objet de consultations et d'amendements permettant leur amélioration de façon à ce qu'elles soient en adéquation avec l'intérêt général».
S’agissant de la réduction des missions des avocats et de la protection des droits à la défense des citoyens, M. Ghassal estime que le nouveau texte laisse le choix ouvert aux citoyens de mandater, ou pas, un avocat dans certaines affaires, ce qui ne le prive pas de ces droits, mais lui en accorde de nouveaux, comme cela se fait dans d’autres pays.

La tension entre le ministère de la Justice et des libertés et les avocats risque de monter de quelques crans dans les prochains jours. En effet, les projets de loi relatifs à la procédure civile et pénale feront leur entrée dans le circuit législatif dans le courant de la session actuelle. Ce qui risque de ne pas trop plaire aux avocats. Affaire à suivre. 

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