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Quel est l’avenir de la Grèce ?

Depuis le référendum du 5 juillet, l’Europe et l’Occident sont suspendus à la Grèce. Et pour cause ! Le pays vient de dire non, lors du référendum du 5 juillet dernier, à l’austérité. Et même si ses dirigeants, avec Alexis Tsipras en tête, assurent qu’il ne s’agit pas d’une rupture avec l’Europe, des questions demeurent. Et la plus importante est sans doute : quel sera l’avenir de la Grèce ?

Quel est l’avenir de la Grèce ?

Nous vous le disions déjà la semaine dernière, la Grèce est aujourd’hui dans une situation plus que délicate. Une dette de 312,65 milliards d’euros, un taux de chômage de 25%, des salaires réduits, des retraites gelées ou encore des taxes toujours plus importantes… la coupe est pleine pour le peuple grec et il a tenu à le dire haut et fort dimanche dernier. Pourtant, ce n’est pas comme ne cesse de le répéter le premier ministre Alexis Tsipras un non à l’euro et à l’Europe.

Un non plus ou moins attendu

Il s’agit plutôt d’un refus de la politique d’austérité que le peuple subit depuis maintenant cinq ans et qui n’a jusque-là donné aucun résultat tangible. Si le non n’est donc pas une surprise pour la Grèce et pour l’ensemble des peuples européens qui ont soutenu son choix, à travers des marches et des messages sur les réseaux sociaux, il l’est en revanche pour la classe politique européenne qui avait espéré un oui aux réformes.
Car au-delà du cri du cœur du peuple, qui est somme toute compréhensible, il y a la dure réalité économique : la Grèce doit rembourser 312,65 milliards d’euros de dettes, dont une partie (52,9 milliards d’euros) a été prêtée directement par les États européens. Et pour ces derniers, le oui garantissait le remboursement de leurs créances sur la Grèce dans un avenir plus ou moins proche – il ne faut pas oublier que ces pays se sont eux-mêmes endettés pour prêter à la Grèce et qu’ils ne sont pas en très grande forme économiquement parlant –, mais également le maintien de la Grèce dans la zone euro, qui semble être pour elle la seule véritable voie de sortie. Dans ce cas, que peut-il se passer ?

Un non à l’austérité, mais pas à l’euro

Comme l’a dit le premier ministre grec, Alexis Tsipras, lors de son discours devant le Parlement européen mercredi 8 juillet, le peuple grec a dit non aux mesures d’austérité qui le mettent à genou, mais pas à l’euro qu’il souhaite garder. Pour le premier ministre, les discussions doivent donc continuer, mais avec des conditions plus souples : l’homme a notamment plaidé pour une restructuration de l’économie de son pays avec entre autres la lutte contre la corruption généralisée et une meilleure répartition de la dette entre les 10% de Grecs riches et les 90% de Grecs pauvres.

Un discours louable en pensée, mais qui reste difficilement applicable en pratique, du moins à court terme.
De l’aveu même du premier ministre, l’évasion fiscale est un phénomène difficile à combattre et cela malgré toute la bonne volonté des fonctionnaires grecs. Alors comment l’Europe pourrait-elle changer ce que même les Grecs n’arrivent pas à changer depuis plusieurs années ? Comment pourrait-elle réformer l’économie en profondeur à la place des Grecs eux-mêmes ? Cela n’est pas possible et en réalité, l’Europe a déjà fait tout ce qu’elle pouvait faire et si l’austérité n’a pas fonctionné, il faut d’abord y voir une profonde défaillance structurelle de l’économie grecque, mais aussi un climat de récession générale qui frappe l’ensemble du continent. Mais alors si l’ensemble des mesures économiques a été épuisé, la sortie de la Grèce de l’euro est-elle inévitable ? Pour le moment, nul ne peut l’affirmer avec certitude. Car derrière l’économie, il y a d’autres raisons stratégiques qui interviennent.

Vers de nouvelles négociations ?

La situation géographique de la Grèce tout d’abord, qui est l'une des portes d’entrée de l’Europe, fait d’elle un pays que l’Europe peut difficilement exclure sans s’attendre à de graves conséquences (immigration massive par exemple, risques sécuritaires…).
Ensuite, et c’est certainement le point le plus important, la Grèce n’est pas le seul pays à vivre des difficultés et d’autres pays comme l’Espagne, l’Italie et même la France sont dans des situations difficiles. Alors quel signal recevraient leurs populations si la Grèce devait sortir de l’euro ? Comment accepteraient-elles le fait de payer encore plus de taxes ou de voir leurs avantages réduits pour rembourser la dette grecque ? Quelles seraient les conséquences d’un tel choix sur l’équilibre social de ces nombreux pays où déjà l’extrême droite avance à grands pas ? Un nouveau round de négociations semble donc inévitable. 

Bouchra Rahmouni Benhida
Professeur à l’Université Hassan Ier, elle est aussi visiting professor aux USA, en France et au Liban. Ses travaux de recherche lui ont permis d’intervenir dans des forums mondiaux et des special topics dans des institutions prestigieuses à Hong Kong, en France, au Liban, aux Emirats arabes unis et en Suisse. Elle compte à son actif plusieurs ouvrages : «L’Afrique des nouvelles convoitises», Editions Ellipses, Paris, octobre 2011, « Femme et entrepreneur, c’est possible», Editions Pearson, Paris, novembre 2012, « Géopolitique de la Méditerranée », Editions PUF, avril 2013, «Le basculement du monde : poids et diversité des nouveaux émergents», éditions l’Harmattan, novembre 2013 et de « Géopolitique de la condition féminine », Editions PUF, février 2014. Elle a dirigé, l’ouvrage «Maroc stratégique : Ruptures et permanence d’un Royaume», éditions Descartes, Paris, 2013.

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