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Afrique du Sud : Émergence, crise économique et contestations sociales

L'émergence n’affranchit pas des contestations sociales particulièrement vives dans le contexte économique plus difficile de ces quatre dernières années. Même en améliorant les conditions de vie des populations, l'émergence peut faire naître des aspirations plus fortes à de nouvelles formes de droits. En ce sens, les pays émergents seraient plus enclins à subir la contestation sociale que les autres pays en développement ou les pays développés.

C’est le cas de l’Afrique du Sud, qui traverse actuellement une crise économique. Le pays souffre d’un ralentissement économique, généré par la chute du cours des matières premières avec des conséquences très perceptibles au niveau de l’emploi, puisque le taux de chômage dépasse les 26%. À cela s’ajoute l’augmentation du prix des denrées alimentaires, conséquence d’une très forte sécheresse. Cette dernière pourra même affecter le rôle de grenier que joue l’Afrique du Sud au niveau du continent. Sur un autre plan, les émeutes d’avril 2015 ont démontré que l’Afrique du Sud n’en avait pas fini avec ses vieux démons. Bien au contraire, après avoir causé la mort d’une soixantaine de personnes en 2008, une crise avait contraint à la démission le Président et chef de l'ANC Thabo Mbeki.

Les émeutes xénophobes ont refait leur apparition en causant cette fois 6 morts et des centaines de déplacés. Une situation qui a fait naître des sentiments de haine et de frustration des populations autochtones. Le chômage touche notamment 40% des noirs avec des inégalités plus qu’évidentes puisque plusieurs zones sont toujours privées des services publics de base comme l’eau ou l’électricité. Une situation qui remet en cause le rôle qu’entend jouer l’Afrique du Sud au niveau africain.

L’Afrique du Sud traverse aussi une crise politique palpable à travers les manifestations anti-Zuma, les tensions au sein du gouvernement et la défaite électorale. Malgré les 54% des voix au niveau national, la perte de villes comme Johannesburg, Pretoria et Port Elizabeth (sud) lors des municipales d'août dernier a mis en lumière la fragilité du parti de Neslson Mandela, le Congrès national africain (ANC).

Depuis ce revers, les voix s’élèvent, faisant craindre la déconfiture du parti au pouvoir. À cela s’ajoutent les scandales au cœur desquels se trouve Jacob Zuma. Fin mars, la justice a inculpé Jacob Zuma d’avoir violé la Constitution en refusant de rembourser les frais de rénovation de sa propriété privée non liés à la sécurité et lui a demandé de rembourser à l’État la somme de 500.000 dollars dans un délai de 45 jours. Les puissances émergentes doivent donc encore répondre à de nombreux défis avant d’apparaître comme des nations développées et de pouvoir jouer dans la cour des pays occidentaux. Elles doivent être conscientes des enjeux et néanmoins prudentes dans la gestion des défis, s'inspirant en cela des exemples des erreurs passées de ceux qui ont trop vite cru pouvoir atteindre le sommet. 


L'Afrique du Sud, un membre du club des émergents

Forte de sa position économique plus qu’enviable et de son modèle de réconciliation nationale fondé sur la démocratie multiraciale, la nation arc-en-ciel de Desmond Tutu s’implique activement dans l’unification de l’Afrique. Elle a notamment participé à la création de l’Union africaine et est également intervenue dans la résolution des crises en Côte d’Ivoire, aux Comores, au Libéria, au Soudan ou encore en Sierra Leone.
Grâce au succès de sa politique de réconciliation post apartheid, l’Afrique du Sud a une influence très importante sur le continent où elle est également très bien implantée sur le plan économique : elle est en effet le premier investisseur africain sur le continent et privilégie les secteurs minier, bancaire, des télécoms et aérien. C’est certainement grâce à ses efforts politiques et à ses ressources importantes que l’Afrique du Sud a pu intégrer le club très fermé des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud). Elle y est aujourd’hui la seule puissance africaine et bénéficie d’une aura particulière auprès des autres pays, qui lui sont pourtant supérieurs économiquement.
Toutefois, le pays de Nelson Mandela se retrouve handicapé par un chômage important et des tensions sociales qui le pénalisent lourdement.

Bouchra Rahmouni Benhida
Professeur à l’Université Hassan Ier, elle est aussi visiting professor aux USA, en France et au Liban. Ses travaux de recherche lui ont permis d’intervenir dans des forums mondiaux et des special topics dans des institutions prestigieuses à Hong Kong, en France, au Liban, aux Emirats arabes unis et en Suisse. Elle compte à son actif plusieurs ouvrages : «L’Afrique des nouvelles convoitises», Editions Ellipses, Paris, octobre 2011, «Femme et entrepreneur, c’est possible», Editions Pearson, Paris, novembre 2012, «Géopolitique de la Méditerranée », Editions PUF, avril 2013, «Le basculement du monde : poids et diversité des nouveaux émergents», éditions l’Harmattan, novembre 2013 et de «Géopolitique de la condition féminine», Editions PUF, février 2014. Elle a dirigé, l’ouvrage «Maroc stratégique : Ruptures et permanence d’un Royaume», éditions Descartes, Paris, 2013.

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