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Appréciation du régime applicable aux élections des membres de la Chambre des représentants du 7 octobre 2016 (2e partie)

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III. Le développementdes garanties juridiques pour la sincérité et la transparence des élections

Donnant suite aux dispositions constitutionnelles, le législateur s’est attaché à construire un véritable régime juridique dédié aux élections dont l’objectif est d’offrir l’ensemble des garanties juridiques pour assurer la transparence et la sincérité des élections. Diverses dispositions relèvent d’un tel régime, mais les plus importantes résultent de deux lois organiques :
• La loi organique n° 27-11 du 14 octobre 2011 relative à la Chambre des représentants,
• La loi organique n° 29-11 du 22 octobre 2011 relative aux partis politiques.
Le trait dominant du droit en question tient à sa nature protectrice des droits et libertés liés aux élections. Il s’attache à renforcer les garanties juridiques de l’expression des votes, conformément aux principes de démocratie et de l’État de droit. Le contenu de ce régime prend en compte la complexité qui marque le processus d’organisation des élections et, par conséquent, a tendance à s’appliquer durant toutes les étapes attachées aux élections.

1. Le découpage électoral
Partant de la conviction qu’il présente des liens étroits avec les résultats des élections, le droit a tenté de l’entourer de l’ensemble des garanties adaptées. Dans ce cadre, la fixation des circonscriptions électorales se fait par décret selon les critères imposés par la loi organique (art. 2 de la loi 27-11). Parmi ces critères, la LO cite l’équilibre démographique, la nature homogène et continue du territoire de la circonscription. Elle fonde par ailleurs un tel découpage sur la base provinciale pour une meilleure prise en considération des conditions nécessaires à la réussite de l’opération.
L’encadrement juridique de l’ensemble des opérations se rattachant au découpage des circonscriptions électorales présente une utilité extrême afin d’introduire une dose de rationalité dans l’opération. L’extension des garanties pour la délimitation des territoires des provinces et préfectures qui sont fixés sur des critères déterminés par le législateur est fondamentale (loi 131-12 du 27 juillet 2013 et son décret d’application du 20 février 2015 relatif au découpage régional).

2. Les règles de candidatures
Le droit de candidature est préservé sous condition du respect des exigences légales. Les procédures administratives en question sont marquées par une grande traçabilité laissant ainsi la porte ouverte pour toutes les contestations ou les refus d’accepter les candidatures. Les recours en question sont à la fois administratifs et judiciaires.

3. La conduite des compagnes électorales
Eu égard à la nature sensible de la période de campagne électorale, la LO 27-11 impose aux pouvoirs publics l’observation de la stricte neutralité entre candidats. Ils doivent en outre veiller au respect des règles consacrées à la campagne électorale (affichage, meetings, utilisation des médias publics, etc.).

4. Le financement des partis politiques
Le financement de la vie politique relève, en vertu du droit en vigueur, de la responsabilité de l’État. Par son moyen, l’action publique vise à assurer les conditions d’une compétition saine et transparente entre les différentes formations politiques.

5. Le déroulement des opérations de vote
Le droit offre à cette occasion une variété de droit à l’ensemble des électeurs, mettant de la sorte diverses charges sur le compte des pouvoirs publics. C’est le cas de :
• L’information des électeurs des lieux de vote,
• Le vote au moyen du bulletin unique,
• Permettre le vote des Marocains résidant à l'étranger au moyen des procurations,
• L’application de règles spécifiques au travail des bureaux de vote et bureau centralisateurs,
• Les règles propres aux opérations de vote,
• Les missions accordées aux pouvoirs publics au moment du dépouillement et recensement des votes par les bureaux de vote,
• Les règles de recensement des votes par les bureaux centralisateurs et les commissions de recensement,
• Les conditions de la proclamation des résultats,
• Les règles propres à l’acheminement des procès-verbaux,
• Les possibilités de consultation des procès-verbaux par les candidats.

6. L’observation indépendante des élections
L’ouverture des élections à l’observation indépendante est un gage pour assurer le respect des règles qu’impose le droit en la matière. Cette observation se manifeste de deux manières : une observation interne assurée par les ONG nationales et une observation internationale accordée à des acteurs externes disposant souvent de l’expertise en la matière.

7. Le régime pénal des élections
La LO 27-11, afin de garantir le déroulement des élections dans les conditions optimales, prévoit un régime pénal particulier adapté aux spécificités des infractions pénales. Son chapitre 6 est intitulé «Détermination et sanction des infractions commises à l’occasion des élections» (art. 38-69). Son objectif est de prévoir les infractions pénales et de leur prévoir un régime répressif à l’encontre de toute personne qui entrave les opérations électorales. Le régime pénal des élections en vigueur met à la disposition des pouvoirs publics, particulièrement les juges, le fondement pour garantir aux élections la transparence nécessaire. Les grands traits d’un régime sont comme suit :
• Augmentation du nombre des infractions électorales,
• Durcissement des peines aux atteintes à la sincérité et la transparence des élections,
• Régime pénal spécial aux infractions électorales applicable en cas de récidive.

8. Élargissement des pouvoirs accordés au pouvoir judiciaire
Le rôle de la justice, en tant que corps dédié à la vérification et l’application du droit, est important à cet égard. Le nouveau Conseil supérieur du pouvoir judiciaire accorde les garanties nécessaires à l’indépendance de la justice et peut sanctionner tout manquement aux devoirs qu’implique l’exercice de ce pouvoir.
L’importance des droits et libertés en question lors des élections implique un contrôle juridictionnel adapté. Il en résulte la nécessité de prévoir la possibilité de recours aux tribunaux de la part des personnes concernées pour exiger le respect des principes et règles déjà évoqués. Plus les contrôles juridictionnels sont rigoureux et larges, plus s’étendent les possibilités de corriger les dérapages probables. L’importance de l’intervention du juge tient à la nature variée des contentieux passibles d’être engagés au titre des opérations électorales (contentieux du dépôt des candidatures, contentieux de contestation des opérations d’élection). La réduction des délais imposés à la justice pour résoudre ces litiges est une garantie contre les abus. Le même constat peut être dressé à propos de l’existence des possibilités des recours judiciaires devant les juridictions supérieures. Il est à noter que l’intervention de la justice a été renforcée depuis quelques années tant que les commissions de recensement chargées d’annoncer les résultats connaissent la présence de magistrats.

IV. La construction des garanties à l'occasion des élections législatives du 7 octobre 2016

Le scrutin du 7 octobre 2016 présente la particularité d’intervenir dans une étape cruciale pour la jeune démocratie marocaine. Ce qui s’est traduit par un renforcement des garanties, notamment du point de vue juridique, afin d’assurer aux élections la transparence nécessaire. En effet, le régime juridique en la matière a été revu dans certains de ses aspects pour favoriser les conditions optimales de son déroulement.

1. La préservation d’une certaine stabilité du découpage électoral
Prenant acte de l’importance de la délimitation des circonscriptions électorales, les pouvoirs publics n’ont pas touché un tel découpage. Le maintien de la stabilité du découpage électorale est un gage de neutralité des pouvoirs publics et un moyen pour ne pas perturber les partis ou orienter les résultats vers un sens donné (maintien des 92 circonscriptions électorales à bases provinciales avec des sièges à pourvoir dans chaque circonscription allant de 6 à 2 selon une moyenne de 5 sièges par circonscription électorale).

2. Les modes de scrutin
Le scrutin à la proportionnelle selon la règle du plus fort reste est maintenu tant qu’il relève d’un consensus de la classe politique depuis quelques années. Néanmoins, l’une des modifications majeures pour les élections de 2016 demeure la revue en baisse du seuil qui permet aux listes candidates de prétendre au partage des sièges. Une telle baisse concerne à la fois les deux circonscriptions nationales ainsi que les circonscriptions locales.
Le nouveau seuil est fixé par l’article 84 de la loi organique 20-16 du 10 août 2016 modifiant et complétant la LO 27-11 relative à la Chambre des représentants. Désormais, ce n’est plus 6%, mais 3% des voix que doivent satisfaire les listes pour prétendre au partage des sièges. Une telle disposition est la conséquence d’une position presque unanime des partis politiques.

3. Les droits liés aux candidatures
Le fait de favoriser les droits de candidature présente une modalité d'élargissemnt de l'offre politique lors des élections de 2016. Deux nouveautés majeures sont à signaler à l’occasion de ces élections :
a. L’élargissement de la possibilité de candidature aux coalitions de partis conformément à l’article 24 de la loi organique 20-16 du 10 août 2016 modifiant et complétant la LO 27-11 relative à la Chambre des représentants.
b. L’élargissement du champ d’application de l’accès aux médias publics et aux listes électorales. Ces nouveautés résultent de la loi 02-16 modifiant et complétant la loi 57-11 relative aux listes électorales générales, aux opérations référendaires et l’utilisation des moyens de l’audiovisuel publics lors des campagnes électorales et référendaires. Il est question, plus particulièrement, des règles suivantes :
• Possibilité de contestation des décisions des commissions administratives relatives au refus d’inscription ou au transfert des inscriptions sur les listes électorales (recours devant le wali, gouverneur ou autorités locales, recours par la suite devant le tribunal de première instance qui doit statuer dans un délai de 5 jours,
art. 30).
• Possibilité pour les partis politiques d’obtenir copies des listes électorales (noms et prénoms des électeurs, leurs adresses, leurs dates de naissance et leurs circonscriptions d’inscription) (art. 30),
• Information écrite obligatoire de l’électeur du lieu de vote avec ses données personnelles (art. 30 bis).

4. La compagne électorale
En menant la campagne électorale, les candidats se voient élargir les possibilités d’agir en matière d’affichage. Cette disposition résulte de l’article 32 de la loi organique 20-16 du 10 août 2016 modifiant et complétant la LO 27-11 relative à la Chambre des représentants qui précise que l’ensemble des candidats dispose du droit de poser ses affiches électorales. Toutefois, ce même article, afin d’éviter les abus probables, instaure l’interdiction d’afficher dans les lieux fixés par décret pris sur proposition du ministère de l’Intérieur.

5. Le financement des partis politiques
La question du financement des élections a reçu à l’occasion des élections du 7 octobre 2016 une attention particulière. Cette logique procède de la volonté de faire correspondre le droit à la réalité économique d’une élection. C’est également une manière de combattre les financements occultes des campagnes électorales. Les nouveautés en question résultent des textes suivants :
• Loi organique 21-16 du 10 août 2016 modifiant et complétant la LO 29-11 relative aux partis politiques : Son article 32 instaure le droit pour les coalitions de partis politiques de bénéficier du financement accordé par l’État. Les sommes en question sont partagées d’une manière égalitaire entre les partis concernés. Son article 36 fixe les modalités du partage du financement entre les partis politiques. Ce partage se fait selon deux tranches : la première part est partagée d’une manière égalitaire entre les partis politiques concernés. La seconde part est partagée en prenant en compte le nombre des vois obtenues par chaque partis ou coalition de partis au niveau national et le nombre des sièges obtenus par chaque parti ou coalition de partis. L’ensemble des sommes concernées est fixé, en vertu de l’article 67, par décret pris sur proposition des autorités chargées de l’Intérieur, de la Justice et des Finances. L’article 43 de cette loi impose à chaque parti l’obligation de rembourser au Trésor les sommes des subventions qu’il n’a pas utilisées, sous peine de l’intervention du premier président de la Cour des comptes.
• Décret du 10 août 2016 relatif à la participation de l’État au financement des campagnes électorales. Il concerne surtout les modalités de cette participation et ses délais.
• Décret du 10 août 2016 fixant le plafond des dépenses des candidats à 500.000 dirhams.
• Décision du Chef du gouvernement du 6 septembre 2016 modifiant la décision du 10 août 2016 concernant la fixation de la somme globale de la participation de l’État au financement des campagnes électorales des partis politiques lors des élections des membres de la Chambre des représentants. Elle prévoit l’augmentation de la somme générale de la participation de l’État au financement des campagnes électorales pour les élections du 7 octobre 2016 de 200 à 250 millions de dirhams.

6. L’élargissement du champ des infractions pénales
Il s’agit de prendre en considération certains actes particuliers liés surtout au déroulement des campagnes électorales. Ainsi, l’article 40 de la loi organique 20-16 du 10 août 2016 modifiant et complétant la LO 27-11 relative à la Chambre des représentants précise que le non-respect de l’interdiction d’afficher dans les lieux fixés par décret pris sur proposition du ministère de l’Intérieur est puni d’une amende allant de 10.000 à 50.000 dirhams sans atteinte à l’application des peines les plus dures (régime pénal de droit commun). 

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