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Face à l'essor de la «Chinafrique», les entreprises françaises cherchent la parade

En perte de vitesse face à la concurrence de la Chine, les entreprises françaises multiplient les offensives pour reprendre pied sur les marchés africains. En misant sur des approches groupées et en faisant jouer leurs relations historiques avec le continent.

Face à l'essor de la «Chinafrique», les entreprises  françaises cherchent la parade

Transport, agroalimentaire, BTP... «La compétition est de plus en plus rude», constate Étienne Giros, président délégué du Conseil français des investisseurs en Afrique (Cian), qui regroupe quelque 160 sociétés opérant sur le continent. «Cela oblige les entreprises à s'adapter». La France, avec 28,5 milliards d'euros d'exportations en 2015, reste certes l'un des premiers fournisseurs du continent africain. Mais sa position s'effrite : dans la zone franc, sa part de marché est passée de 34% en 1985 à 12% en 2015. La Chine, dans le même temps, a vu sa place bondir de 2% à 20%. «Depuis 2009, elle est le premier partenaire commercial de l'Afrique», rappelle Étienne Giros. «La Chine a une approche très volontaire. Elle est présente dans tous les pays, même si certains sont plus concernés que d'autres».

Au Gabon, la part de marché de la France est ainsi passée de 40% à 22% en l'espace de 10 ans. Au Bénin, de 22% à 7%. En Côte d'Ivoire, de 28% à 11%... Une érosion directement liée à l'essor de l'Empire du Milieu, qui dispose aujourd'hui de 2.500 entreprises sur le continent. «Dans les travaux publics notamment, les Chinois sont très forts. D'abord parce qu'ils amènent leurs matériaux de Chine, où c'est moins cher. Et puis parce qu'ils viennent avec leur propre main-d'œuvre, moins chère également», décrit Charles Paumier, responsable commercial de TVS, filiale sénégalaise du logisticien Necotrans.

C'est ainsi la Chine qui a construit et financé le tramway d'Addis Abeba, inauguré fin 2015. C'est elle également qui édifie la grande mosquée d'Alger. Et elle, encore, qui va bâtir le futur stade olympique d'Abidjan... «Avec les Chinois, on ne se bat pas à armes égales», estime un diplomate d'Afrique centrale, qui évoque par ailleurs l'existence de «pratiques opaques», comme le paiement de «pots-de-vin», lors des passations de marchés. Certaines entreprises françaises ne sont toutefois pas exemptes de soupçons à cet égard.

Interrogé lors d'un déplacement à Dakar, le ministre français des Finances Michel Sapin a invité «chacun» à «respecter les règles». «La Chine est un grand pays, qui a de grandes capacités d'investissement. Il est parfaitement légitime» que ses entreprises «fassent valoir leurs capacités», a-t-il dit. Mais «je souhaiterais que tous les intervenants soient aussi transparents que nous le sommes dans la conquête des marchés, dans le respect des entreprises et des populations locales», a-t-il mis en garde, insistant sur la nécessité pour les entreprises tricolores de se battre pour conserver leur place sur le continent.

Par quels moyens ? Avec quelle stratégie ?
Du côté du Medef (organisation du patronat français), on insiste sur la nécessité d'une approche «collective», avec des initiatives mêlant grandes entreprises et PME. La France doit apprendre à «chasser en meute», a souligné mercredi le patron de l'organisation, Pierre Gattaz. Fin avril, une délégation de 150 représentants d'entreprises se rendra ainsi en Côte d'Ivoire, à l'initiative du syndicat patronal. L'occasion «d'explorer les nouvelles opportunités d'affaires» dans ce pays considéré comme la locomotive économique de l'Afrique de l'Ouest. Les entreprises françaises misent également sur les liens tissés avec les entreprises et les autorités de ces pays. «On a une relation avec l'Afrique qui est historique. C'est un continent que l'on connaît bien, ce qui est un atout non négligeable», insiste Étienne Giros. «Nous avons des avantages culturels qu'il nous appartient de faire valoir», abonde Marc Rennard, directeur général adjoint du groupe de télécommunications Orange. Un groupe aujourd'hui présent dans 15 pays africains, dont des pays anglophones, où les entreprises tricolores sont moins présentes, mais cherchent désormais à se développer.

Au-delà des logiques de concurrence, certains défendent enfin la mise en place de partenariats avec les entreprises chinoises, sur des projets ponctuels. «Nous avons des qualités complémentaires. Ensemble, on peut faire des choses intéressantes», estime Étienne Giros, pour qui la Chine contribue au dynamisme du continent. «L'Afrique, c'est le relais de croissance de la planète pour les trente prochaines années», souligne l'homme d'affaires. «Il faut y aller maintenant. Après, les places seront prises».

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