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Le Medef lâche un peu de lest...mais refuse la contrainte

Le Medef lâche un peu de lest...mais refuse la contrainte
«Nous pensons que c'est au conseil d'administration», et non aux assemblées générales, «de prendre ses responsabilités», a déclaré vendredi lors d'une conférence de presse le patron du Medef, Pierre Gattaz, tout en se disant hostile à une loi sur le

Sous pression du gouvernement, les représentants des grands patrons ont lâché un peu de lest sur le salaire des dirigeants d'entreprise en annonçant une révision de leur code de bonne conduite, tout en refusant de rendre «contraignant» le vote des actionnaires sur ce sujet. «Nous pensons que c'est au conseil d'administration», et non aux assemblées générales, «de prendre ses responsabilités», a déclaré vendredi lors d'une conférence de presse le patron du Medef, Pierre Gattaz, tout en se disant hostile à une loi sur le sujet. «C'est important que le conseil d'administration garde la main (...) C'est lui qui représente les actionnaires», a-t-il poursuivi, tout en vantant les avancées de la révision du code de gouvernance des entreprises, dit code Afep-Medef, présenté comme l'un des «plus exigeants» d'Europe.

Jusqu'ici, les décisions des assemblées générales d'actionnaires sur les salaires et indemnités versées aux grands patrons étaient purement consultatives. Désormais, cette procédure dite de «say on pay» aura un caractère «impératif», et devra être prise en compte par les conseils d'administration, a assuré M. Gattaz. En cas de vote négatif, ces derniers auront ainsi l'obligation de formuler des contre-propositions dans un «délai raisonnable» de quelques semaines, a précisé Pierre Pringuet, président de l'Afep, organisation représentant les grandes entreprises privées.

Ces propositions devront par ailleurs être rendues publiques. Elles n'impliqueront toutefois pas la tenue d'une nouvelle assemblée générale d'actionnaires et donc un nouveau vote, le dernier mot étant laissé au conseil d'administration de l'entreprise.
«Une assemblée d'actionnaires, ce n'est pas un parlement, il n'y a pas de droit d'amendement», a argué M. Pringuet, jugeant néanmoins «pas envisageable qu'il y ait un divorce durable entre le conseil d'administration et l'assemblée générale d'une entreprise».
Cette prise de position vise à mettre fin à la polémique née de l'«affaire Renault». Fin avril, le conseil d'administration de la marque au losange a en effet validé la rémunération de 7,2 millions d'euros de son PDG, Carlos Ghosn, malgré l'avis contraire des actionnaires, qui avaient voté majoritairement contre (à 54,12%).
«Manœuvre» ?

Cette décision, très critiquée, a fragilisé la position du Medef et de l'Afep, favorable à l'auto-régulation. Jeudi, le Haut Comité de gouvernement d'entreprise, mis en place en 2013 pour veiller au respect du Code Afep-Medef, a ainsi encouragé Renault à revoir le mode de calcul du salaire de son PDG.
Pour Loïc Dessaint, directeur général de Proxinvest, cabinet de conseil aux actionnaires qui milite pour un meilleur encadrement de ces pratiques, la révision du code de bonne conduite annoncée vendredi ne changera pas grand-chose aux pratiques en vigueur en termes de rémunération.
«Ça va dans le bon sens, bien sûr, mais la porte reste ouverte à des situations ubuesques. Car même si l'examen du vote est impératif, le code est lui-même facultatif», juge ce spécialiste de l'actionnariat. «C'est une manoeuvre de l'Afep et du Medef pour éviter une loi», ajoute-t-il.

Mardi, le chef de l'État a, en effet, sommé le patronat de prendre les choses en main, sous peine de voir le gouvernement adopter des mesures législatives. Et jeudi, le Premier ministre Manuel Valls a déclaré qu'il fallait désormais «légiférer», le code de bonne conduite des entreprises ayant selon lui montré ses limites.
Un amendement, soutenu par le gouvernement, va ainsi être intégré au projet de loi sur la transparence économique, dit Sapin II, lors de l'examen du texte en commission le 25 mai. Objectif : rendre réellement «contraignant» le vote des actionnaires sur les salaires des patrons.

«C'est une très mauvaise décision», en raison des effets que cela pourrait avoir sur «l'attractivité» de la France, a commenté Pierre Gattaz. «Nous sommes dans une situation de mondialisation complexe. Si on continue à rajouter des contraintes, à légiférer dans tous les sens, nous aurons l'effet inverse», a-t-il ajouté.
Un message repris par le député LR (Les Républicains) Eric Woerth, pour qui la loi est «une mauvaise réponse». «Les gouvernements font cette menace depuis toujours, ça ne fonctionne pas et ça ne peut pas fonctionner, donc il faut arrêter de manier comme ça de vieilles lunes», a-t-il jugé sur RTL.

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