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«Revoir les missions et les rôles dévolus aux collectivités territoriales dans le domaine sportif»

Docteur en management sportif des organisations et actuellement directeur de l’Institut Royal de la formation des cadres de la Jeunesse et des sports, Abderrazak El Akari a également soutenu une thèse de doctorat en 2015 sur la gouvernance territoriale des politiques sportives au Maroc. Dans cet entretien qu’il a accordé au «Matin», El Akari décortique la place du sport dans la loi organique des collectivités territoriales de 2015 en la comparant avec la charte communale de 2002.

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Le Matin : Quelle est la part du sport dans la loi organique des collectivités locales ?
Abderrazak El Akari : 
Avant de répondre à votre question, je veux revenir un peu en arrière et dire que la loi organique du 7 juillet 2015 est d’une grande importance, du fait qu’elle a encadré toutes les actions et les relations entre les acteurs intervenant au niveau territorial qui englobe les communes rurales et urbaines, les conseils préfectoraux et régionaux. Pour revenir à votre question, l’opinion publique s’attendait à ce que ladite loi organique accorde plus d’intérêt à la promotion du sport, d'autant plus qu’elle arrive après la Constitution de 2011, faisant référence au sport, qui est désormais partie intégrante des droits fondamentaux des citoyens. La Constitution a exhorté les autorités publiques et plus précisément les collectivités territoriales à accorder plus d’intérêt à la promotion du sport. Mais si on fait une étude critique de cette loi, on constate la disparition du sport dans les attributions propres des collectivités territoriales, alors qu’il figurait dans la charte abrogée de 2002.

Qu’est-ce qu'une attribution propre ?
C’est une attribution que le législateur octroie à la collectivité pour intervenir directement sans attendre l’apport d’un autre partenaire. Or maintenant, le sport est relégué au second plan, puisque maintenant, dans la nouvelle loi organique, il fait partie des attributions partagées.

Que voulez-vous dire par attributions partagées ?
Cela veut dire que la collectivité territoriale doit attendre d’autres acteurs, d’autres intervenants qui ont le même dénominateur commun, à savoir le sport, pour créer un projet sportif. Le sport est non seulement dans les attributions partagées, mais il fait aussi partie des attributions transférées, c’est-à-dire qu’on doit attendre que l’administration délègue certaines attributions à des collectivités territoriales. Actuellement, chaque collectivité, avant d’élaborer son plan de développement, doit effectuer un diagnostic territorial partagé avec la population concernée. La question qui se pose est que si le diagnostic fait monter des besoins pressants de la population en matière du sport (besoin de terrains, de piscines…), la collectivité ne peut pas les réaliser, parce qu’elle doit attendre d’autres partenaires.

On assisterait donc à une régression du sport dans la loi organique sur le développement de ce secteur ?
Juste pour clarifier une chose, je dis que nous attendions à une adaptation ou plutôt une concrétisation de ce qui a été mentionné en matière du sport dans la Constitution. Or cela n’a pas été pris en considération pour la simple raison que lors des discussions pour l’élaboration de la nouvelle loi organique, le mouvement sportif et olympique n’a pas été impliqué dans le débat pour montrer l’importance du sport dans l’attractivité et le développement du territoire. Il faut reconnaître que les premiers investisseurs dans le sport sont les collectivités territoriales. Si on veut aller dans le sens de l’esprit du temps, à savoir en finir avec la centralisation excessive et aller vers la régionalisation avancée et la déconcentration, il est impératif que les collectivités territoriales s’adaptent aux vrais besoins de la population. Quand on parle de population, on parle des besoins d’éducation, de santé, mais aussi des activités sportives qui ont une grande importance.

Est-ce que l’on peut dire tout simplement que cette loi est en déphasage avec l’esprit de la Constitution de 2011 ?
Je parle uniquement du volet sportif. Le sport est le maillon faible de cette loi organique. On a raté une occasion en or pour renforcer et consolider les acquis et les prérogatives accordés par les pouvoirs publics et par le mouvement olympique, surtout après les Assises du sport de 2008. Et c’est ça le paradoxe, parce que les Assises et la stratégie nationale pour la promotion du sport à l’horizon 2020 ont mis en avant dans l’axe 5 l’apport de la région en tant que levier de la promotion du sport. Malheureusement, tout cela n’a pas été pris en considération, alors que la promotion du sport se fait à partir du bas et non d’en haut. Et quand on parle d’en bas, cela veut dire qu'il faut tenir compte de la spécificité du territoire, c’est-à-dire la territorialisation des politiques publiques sportives. Par exemple, si Taza, Mohammedia ou Meknès excellent en matière de natation, elles auront donc besoin de piscines. Boujdour ou Laâyoune ont une autre spécificité. Je veux dire par là qu’il faut adapter le plan du schéma directeur élaboré au niveau communal et territorial aux vrais besoins et attentes du territoire.

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