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Vaincre le désengagement professionnel, un défi pour les managers

Absences injustifiées, retards répétitifs, baisse du rendement…, le désengagement professionnel se manifeste sous plusieurs formes. Un phénomène qui doit être pris au sérieux par les managers d’équipes et les professionnels RH afin d'en limiter les répercussions sur la performance et la productivité au travail. Quelques astuces pour faire face au désengagement avec Afafe El Amrani El Hassani, docteur chercheuse en sciences de gestion et RSE, consultante en GRH, gestion et reconversion de carrière.

Vaincre le désengagement professionnel,  un défi pour les managers
Les comportements issus du désengagement professionnel pourraient affecter l’entreprise sur le plan financier, commercial et organisationnel.

Éco-Conseil : Quelles sont les causes d’un désengagement professionnel ?
Afafe El Amrani El Hassani :
Le désengagement professionnel, aussi inconnu et méconnu des managers, si bien délaissé et négligé par eux, est un phénomène qui ne se déclenche pas sans raison ! Il représente la manifestation des collaborateurs du sentiment de frustration, démotivation, mal-être et mécontentement qu’ils ressentent suite au comportement de l’entreprise à leur égard. Les causes de ce désengagement peuvent être externes et internes. Les causes externes sont notamment la nature de l’activité de l’entreprise et les tâches qui s’y exercent. Certains secteurs d’activité (à caractère polluant, moins éthique, offrant des conditions de travail très difficiles…) peuvent avoir une image assez péjorative dans l’esprit du grand public et donc les ressources humaines susceptibles d’intégrer l’entreprise et qui vont ramener avec eux assez de préjugés pour être désengagés et parfois même influencer les anciens collaborateurs. Également certaines considérations d’ordre idéologique et éthique relatives à l’image qu’a l’entreprise dans l’esprit de ses parties prenantes aussi bien internes qu’externes peuvent provoquer ce désengagement. Enfin, nous rappellerons l’inadéquation entre les attentes des jeunes diplômés et la réalité de la vie active du fait que la plupart d'entre eux développent une vision assez utopique et irréaliste du monde de travail et une fois en activité, ces jeunes diplômés vivent négativement l’expérience. Pour les causes internes, nous citerons essentiellement celles relatives au mode de management pratiqué au sein de l’entreprise, le style de leadership et enfin la politique sociale adoptée. Les causes liées au mode de management peuvent être relatives à une centralisation de l’information et de la décision au niveau supérieur sans impliquer les collaborateurs dans le processus décisionnel, l’instauration de normes et procédures restrictives et basées sur la sanction plutôt que sur l’encouragement, l’application de méthodes de travail inadéquates avec le niveau des collaborateurs, leurs attentes et leurs capacités, la mauvaise manière de constituer les équipes de travail et de répartir les tâches et les responsabilités et, enfin, l’imposition de conditions de travail difficiles, inadaptées et impropres aux dispositions ergonomiques, physiologiques, psychologiques et intellectuelles des collaborateurs. Le style de leadership peut aussi être une source du désengagement professionnel du fait que, souvent, les collaborateurs accordent une grande importance à la personnalité de leur manager, ses qualités humaines, la nature de la relation qui les unit, la manière avec laquelle il les traite, le degré de liberté qu’il leur accorde en matière de créativité, de prise d’initiatives, d'expression de leurs opinions et aussi de la manière dont il prend en considération, entre autres, leurs attentes, besoins, initiatives individuelles et ambitions au travail. Enfin, et pour la politique sociale, le désengagement professionnel est issu des choix pris par le manager en ce qui concerne le respect des principes de transparence et d’équité dans le traitement de l’ensemble des collaborateurs, le degré d’encouragement des initiatives individuelles, le système adopté de motivation et de promotion aussi bien hiérarchiques que salariales sans oublier les perspectives de gestion de carrière que le manager offre à ses ressources humaines en fonction de leur évolution professionnelle et leur histoire de vie. Soulignons que l’entreprise n’est pas un simple lieu de production de bien et de services, mais un endroit où se côtoient des individus dans l’espoir de créer ensemble une valeur ajoutée aussi bien pour tout un chacun que pour le groupe en entier. Il convient donc de prendre en considération les besoins de tous les acteurs et de veiller à leur assurer un climat favorable à la productivité.

Quelles sont les manifestations du désengagement professionnel ?
Il se manifeste sous plusieurs formes dont certaines sont mesurables, plus courantes et surtout facilement repérables comme l’absentéisme injustifié, les retards répétitifs, les départs inopinés et non motivés ce qui conduit à un turn-over trop rapide donc moins rassurant pour les collaborateurs actuels et futurs, le non-respect des normes et procédures mises en vigueur et, enfin, les négligences professionnelles ou comportementales, volontaires ou involontaires à l’égard des clients, des collègues ou encore de la hiérarchie. D’autres manifestations du désengagement professionnel peuvent être plus invisibles et moins palpables, mais dont les dégâts n’en sont pas moins coûteux ni facilement remédiables ! Nous citerons notamment les erreurs commises sciemment ou inconsciemment par les collaborateurs, la baisse de leur rendement individuel et collectif, la détérioration du climat social, l’endommagement du matériel et le gaspillage des ressources, la disparition des initiatives personnelles et collectives, le manque d’implication dans la vie de l’entreprise et dans son processus décisionnel, la non-remontée de l’information, des idées et des innovations et, enfin, l’image dévalorisante que les collaborateurs véhiculent sur leur entreprise suite à la dégradation, voire la disparition du sentiment d’appartenance à son égard.

Quelles sont les conséquences du désengagement professionnel ? 
Les conséquences du désengagement professionnel sont beaucoup plus graves que ce que peut voir et comprendre le simple manager. Elles peuvent être la source indirecte de la baisse de la compétitivité, du rendement et du développement de l’entreprise et peuvent même menacer sa pérennité tout entière. Dans le secteur des services par exemple, le manque de proactivité des collaborateurs face aux imprévus et leur comportement discourtois peuvent provoquer l’insatisfaction des clients et aller jusqu’à porter atteinte à l’image de l’entreprise, son professionnalisme et sa réputation sur le marché. En effet, l’ensemble des comportements issus du désengagement professionnel pourrait alors affecter l’entreprise sur le plan financier, commercial et organisationnel et constituer une entrave à son développement et sa performance sans oublier les coûts cachés qu’elle supportera et l’énorme manque à gagner qu’elle subira en termes de capitalisation et transfert du savoir, de développement d’une intelligence collective et une culture organisationnelle et de création d’une dynamique sociale pouvant lui éviter d’être bannie par ses propres collaborateurs et par son marché. 


Une réflexion sur le style de management s’impose 

Un manager conscient de ses responsabilités et de l’impact du désengagement professionnel sur la pérennité de son entreprise et l’implication de ses collaborateurs se doit d’entamer une profonde réflexion sur son style de management et sur les stratégies sociales à entreprendre pour désamorcer cette bombe qui, une fois activée, risque de détruire une expérience humaine riche et particulière. Il doit comprendre qu’un collaborateur valorisé est un client interne engagé pour fournir un travail bien fait, garant d’un produit et service de qualité et par là un client satisfait et fidélisé ! Le manager doit donc essayer de trouver les sources du désengagent professionnel et veiller à rétablir une dynamique interne basée sur l’équité, la transparence et la liberté d’expression. Il doit intégrer la dimension humaine dans l’ensemble de ses stratégies et aider ses collaborateurs à trouver le goût du travail et l’envie de fournir un effort reconnu dans un climat favorable à l’évolution, à la créativité et à la productivité sans entraves hiérarchiques ni blocages bureaucratiques. Le manager est également amené à instaurer un système d’évaluation, de promotion et de gestion de carrière stimulant et motivant pour ses collaborateurs. Il doit donner l’exemple et ne pas choisir de se cacher derrière les sanctions et les restrictions pour pallier son manque de communication et son incapacité à gérer des ressources humaines différentes et diversifiées !

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