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Les grands bouleversements qui guettent le marché

La cinquième édition du Rendez-vous de Casablanca de l'assurance, qui clôt aujourd’hui ses travaux, avec un millier de participants, a traité des grands bouleversements qui se profilent à l’horizon pour le secteur des assurances. Ils sont liés notamment à la révolution numérique qui a favorisé l’apparition de nouveaux acteurs appelés les Insurtechs. Mais, pour l’Afrique, la disruption à venir concerne notamment la distribution, la gestion des sinistres et de la relation client.

Les grands bouleversements qui guettent le marché
attirant un millier de participants, représentant 36 nationalités, dont 25 africaines. Ph. Saouri

Le Rendez-vous de Casablanca de l'assurance monte en puissance, permettant au secteur de continuer à explorer les défis futurs auxquels il fait face et à se préparer à les affronter. La cinquième édition de cette grand-messe de deux jours de la profession, qui clôt aujourd’hui ses travaux, a été encore plus mobilisatrice que les précédentes. Elle a attiré un millier de participants, représentant 36 nationalités, dont 25 africaines, qui ont débattu en long et en large des grands bouleversements qui guettent le secteur. Ces «phénomènes disruptifs» ont été résumés par Hassan Boubrik, président de l'Autorité de contrôle des assurances et de la prévoyance sociale (ACAPS), en changements climatiques, changements réglementaires et révolution numérique.
Mais c’est ce dernier défi qui a le plus retenu l’attention du patron de l’ACAPS. Ce dernier considère que l'assurance est l’un des secteurs où la disruption émanant du numérique serait la plus profonde. En effet, explique-t-il, ce n’est pas uniquement au niveau de la distribution, de la gestion de la relation client ou même de la nature des intervenants (notamment avec le risque d’entrée dans le secteur des services financiers des grands acteurs du digital) que les impacts se feront sentir, mais «c’est le modèle économique même de l’assurance qui risque d’être remis en cause». Ainsi, précise-t-il, avec le développement de la voiture sans conducteur, ce n’est plus la responsabilité civile du conducteur qui sera assurée, mais celle du constructeur ou des éditeurs de technologies embarquées. La taille du marché et le total des primes émises dans ce segment risquent d’ailleurs de baisser significativement, estime le régulateur. À ses yeux, la prolifération des objets connectés se traduira aussi par des «transformations profondes» sur tous les segments du marché, en particulier, celui de l’automobile ou de l’assurance santé, avec une offre de produits individualisée et une tarification au plus près «battant en brèche le principe sacro-saint de la mutualisation en assurances».
Pour faire face à cette mutation, relève Hassan Boubrik, les assureurs investissent énormément dans le numérique, rachètent, nouent des partenariats avec les Insurtechs (startups mettant à profit les nouvelles technologies pour révolutionner les modèles économiques en place de l'assurance) et créent leurs propres accélérateurs ou incubateurs. Ainsi, indique-t-il, selon une étude publiée par PwC en 2017, sur près d’un millier de dirigeants d’entreprises d’assurances dans le monde interrogés, 45% ont déclaré avoir déjà noué un partenariat avec une Insurtech. Ils étaient 28% seulement l’année précédente.
De leur côté, les Insurtech trouvent de plus en plus de capitaux disponibles (36% de plus investis en 2017 selon le dernier rapport trimestriel InsurTech de Willis Towers Watson) et se positionnent sur toute la chaine de valeur de l’assurance, en tant que fournisseurs de services techniques, d’intermédiaires et parfois même en tant qu’assureurs. Certaines Insurtech commencent à émerger en tant que nouveaux assureurs digitalisés de bout en bout, détaille le conférencier.
Ce qui constitue, pour le président de la Fédération marocaine des sociétés d'assurance et de réassurance (FMSAR), Mohamed Hassan Bensalah, plus une opportunité qu’une menace. «C’est l’occasion de se réinventer, de se transformer et de rester en phase avec les évolutions technologiques et les mutations de notre société». Sinon, prévient-il, d’autres acteurs peuvent faire leur apparition et, par l’utilisation des nouvelles technologies, «faire de l’assurance autrement, de façon plus ciblée et avec une meilleure tarification». Le patron de la FMSAR a indiqué que plus d’un tiers des 8.000 personnes interrogées au niveau mondial dans une enquête réalisée par Capgemini en septembre dernier, déclarent avoir recours aux InsurTech. De ce fait, Bensalah suggère de bâtir des partenariats gagnant-gagnant avec ces nouveaux entrants.
Certes, cette disruption concerne aussi les marchés moins matures des pays en développement, telle l’Afrique, concède le président de l'ACAPS. Néanmoins, nuance-t-il, il ne s’agira pas nécessairement des mêmes ruptures ou enjeux que dans les pays et les marchés les plus développés. «La voiture sans conducteur n’est pas pour demain chez nous et l’investissement dans les Insurtech, du moins de manière significative, nécessite des écosystèmes et la mobilisation de fonds que la plupart des pays africains ne peuvent s’offrir», estime Boubrik. Il notera que l’enjeu majeur en Afrique est l’augmentation du taux de pénétration des assurances. Le marché africain ne représente, en effet, que près de 1,6% du marché mondial au moment où le PIB pèse environ le double. Par conséquent, les ruptures induites devraient concerner en Afrique davantage la distribution, la gestion des sinistres et de la relation client de manière générale, que le modèle économique de l’industrie de l’assurance, affirme le président de l'ACAPS.
Qu'en est-il du volet régulation ? Pour Hassan Boubrik, «la révolution digitale et l’apparition de nouveaux acteurs amènent des défis considérables pour les superviseurs d’assurances». Pour l'heure, il s'agit plus d'interrogations. À titre d’exemple, comment, demain, un régulateur pourrait-il superviser comme il se doit un assureur digital localisé en dehors de sa juridiction ? Comment assurer une protection appropriée des clients ? Qu’en est-il de la protection des données personnelles (cas de Facebook) ? Qu’en est-il de la concurrence, face à des acteurs qui détiennent l’information à travers d’autres activités ? Ce sont ces questions et bien d'autres qui se posent avec acuité aux superviseurs d’assurances.

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