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Angoisse croissante au troisième jour sans électricité

Privés de lumière, d’eau et de moyens de communication, les Vénézuéliens entamaient dimanche leur troisième jour d’une panne d’électricité générale qui a déjà tué au moins 15 malades dans les hôpitaux et accroît l’angoisse liée à la profonde crise politique et économique.

Angoisse croissante au troisième jour sans électricité

Ayant commencé jeudi vers 16 h 50 (20 h 50 GMT), cette coupure inédite dans ce pays de 30 millions d’habitants producteur de pétrole fournit un nouveau terrain à la lutte pour le pouvoir entre le président socialiste Nicolas Maduro et le chef de l’opposition Juan Guaido, autoproclamé en janvier président intérimaire et reconnu par une cinquantaine de pays. Tous deux ont organisé samedi des rassemblements rivaux à Caracas. M. Guaido a appelé à une marche nationale sur la capitale pour pousser vers la sortie M. Maduro et répété sa disposition à autoriser une intervention militaire étrangère. M. Maduro, qui effectuait sa première apparition publique depuis le début de la panne, a dénoncé une nouvelle «attaque cybernétique» dans la «guerre électrique» menée selon lui par les États-Unis. Le Venezuela est quasiment à l’arrêt, avec magasins et écoles fermés et transports paralysés. À Caracas et sa périphérie, où vivent six millions de personnes, le courant n’est que brièvement revenu samedi. Des dizaines de passagers aux vols annulés attendaient à l’aéroport international de Maiquetia. Dans un quartier de l’est de Caracas, Francisca Rohas, une retraitée de 62 ans, a passé «trois nuits de grande angoisse». «Je suis très nerveuse, car la situation n’évolue pas, le peu de nourriture que nous avons dans le frigo va être perdu. Jusqu’à quand allons-nous supporter cela ?», dit-elle à l’AFP. Au moins 15 patients atteints de maladies rénales sont morts en 48 heures faute de dialyse, alors que 95% des unités de dialyses sont paralysées par le manque d’électricité, selon l’ONG Coalition des organisations pour le droit à la santé et à la vie (Codevida). Aucun bilan officiel n’était disponible. «J’annonce une tournée, ma tournée et celle de tous les députés (à travers le pays) pour vous faire venir à Caracas de manière définitive», a lancé samedi Juan Guaido devant des milliers de partisans – les autorités ne fournissent pas de chiffres pour les manifestations. «Après la fin de cette tournée (...), nous annoncerons la date où tous ensemble nous marcherons sur Caracas».

M. Guaido a répété être prêt à autoriser une intervention militaire étrangère, se référant à la Constitution «l’article 187, lorsque viendra le moment», qui autorise «des missions militaires vénézuéliennes à l’extérieur ou étrangères dans le pays». «Intervention ! Intervention !» a entonné la foule. «Toutes les options sont sur la table et nous le disons de manière responsable», a assuré Juan Guaido. Simultanément, des milliers de partisans du régime, en rouge, écoutaient M. Maduro. «Aujourd’hui, 9 mars, nous avions avancé à près de 70% (dans le rétablissement de l’électricité) lorsque nous avons reçu à la mi-journée une autre attaque cybernétique visant une des sources d’énergie qui fonctionnait parfaitement. Cela a annulé tout ce que nous avions réalisé», a expliqué Nicolas Maduro. Selon le ministre de la Communication Jorge Rodriguez, la panne a été déclenchée jeudi par une première «attaque cybernétique contre le système de contrôle automatisé» de la centrale hydroélectrique de Guri (sud-est) qui fournit au Venezuela 80% de son électricité. M. Guaido et nombre d’experts attribuent la panne à un manque d’investissements du gouvernement dans l’entretien des infrastructures. La compagnie vénézuélienne d’électricité Corpoelec a dénoncé, sans précision, un «sabotage» à Guri. La panne vient s’ajouter aux pénuries subies par la population. Outre les hôpitaux et les télécommunications, elle affecte l’approvisionnement en eau et commence à menacer les aliments frais dans ce pays au climat tropical. «C’est pire chaque jour», confie à l’AFP Edward Cazano, 20 ans, qui vit avec sa mère et ses trois petits frères à Pinto Salinas, quartier populaire de Caracas. La plupart des supermarchés sont fermés. Alors que les transactions électroniques sont vitales faute d’argent liquide en raison de l’hyperinflation, il est impossible depuis jeudi soir d’utiliser des cartes de crédit. 

Samedi, des familles étaient garées le long de l’autoroute Francisco Fajardo à Caracas pour capter un peu de réseau téléphonique. «Mon fils et mon frère sont hors du Venezuela, et ils veulent avoir de nos nouvelles. Et je veux aussi avoir des informations, parce que nous ne savons pas ce qui se passe dans le pays», a expliqué Bernardette Ramirez, venue avec des voisins. Des centaines de personnes s’étaient auparavant rendues sur une place de Caracas disposant de panneaux solaires pour y recharger la batterie de leur téléphone portable. Le gouvernement a affirmé qu’il fournirait à l’ONU «des preuves» d’une responsabilité de Washington dans cette panne. Une délégation du Haut Commissariat de l’ONU aux droits de l’Homme est attendue dans quelques jours. Depuis le 23 janvier, le Venezuela compte deux dirigeants : Nicolas Maduro, 56 ans, qui a entamé le 10 janvier un deuxième mandat présidentiel contesté en raison d’accusations de fraude pesant sur sa réélection ; et Juan Guaido, 35 ans, président de l’Assemblée nationale, qui s’est proclamé président par intérim et est reconnu par une cinquantaine de pays. 

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