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Des milliers de livres et manuscrits partis en fumée, certains perdus à jamais

À Mossoul, les jihadistes, chassés au prix d’une guerre dévastatrice, ont détruit bibliothèques, librairies et autres repaires de lecteurs dans cette grande ville d’Irak.

Dans la cité connue depuis des siècles pour ses intellectuels et ses bibliothèques de recueils anciens, lire des ouvrages jugés non conformes aux visions rigoristes du groupe État islamique (EI) était interdit et même puni de châtiments pendant l’occupation de Mossoul par les jihadistes de 2014 à 2017. Entre autodafés et combats, des milliers de livres sont partis en fumée. «Certains n’ont jamais été numérisés et sont perdus à jamais», se lamente Roua, étudiante en science de l’alimentation. Près de deux ans après la libération de la ville, étudiants et chercheurs «ont le plus grand mal à trouver de la documentation», abonde Abdelmajid Mohammed, un doctorant en histoire âgé de 34 ans. «On y venait de tout l’Irak et du monde arabe. Aujourd’hui, les Mossouliotes sont forcés d’aller ailleurs pour trouver ouvrages et documents scientifiques», lâche-t-il, amer. Outre la Bibliothèque centrale, établissement public fondé en 1921, Mossoul, vieille ville de commerçants et d’aristocrates, s’enorgueillissait de compter des centaines de bibliothèques et de librairies. Générales ou religieuses, elles fleurissaient dans les facultés et lieux de cultes et servaient de lieux de rendez-vous pour les intellectuels. Entre les donations des grandes familles, la production locale, la première imprimerie d’Irak a vu le jour à Mossoul à la fin du 19e siècle, et les échanges culturels, ce carrefour commercial historique du Moyen-Orient conservait précieusement des milliers d’ouvrages rares et anciens, notamment liturgiques. Des plans vieux de plusieurs siècles d’astrolabes ou de sabliers se trouvaient aussi dans cette cité d’Irak, l’ancienne Mésopotamie où fut inventée l’écriture il y a plus de 5.000 ans. «Avant d’être pillée et vandalisée, la bibliothèque comptait 16.338 ouvrages en tous genres». Seuls 11.758 ont pu être sauvés. Et à cause de travaux de reconstruction, ils sont toujours inaccessibles au public. La bibliothèque du Waqf, l’instance publique qui gère les biens religieux musulmans, a perdu 10.000 de ses 58.000 livres, dont ses pièces maîtresses. «Les 4.361 manuscrits rares ont tous été volés par l’EI», selon Chamel Lazem, bibliothécaire en chef de 41 ans. Pour la bibliothèque de l’Université de Mossoul, l’une des plus en vue d’Irak, les pertes se montent à «90 à 95% du fonds documentaire», indique Omar Tawfiq, le responsable des lieux. «3.000 livres ont pu être sauvés et 4.000 ont été stockés dans les réserves, mais sont en très mauvais état et ne peuvent être consultés». 

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