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«La porte est toujours grande ouverte devant un champion comme Mohamed Rabii»

En poste depuis 2013, le directeur technique national de la Fédération Royale marocaine de boxe, Mounir Barbouchi, a mené l’équipe nationale à Rio 2016, ramenant une médaille de bronze grâce à Mohamed Rabii. En 2020, il espère rééditer l’exploit, avec une jeune équipe assoiffée de consécrations et tout aussi décidée à atteindre le podium. Le DTN marocain compte, pour ce faire, sur le soutien des institutions partenaires, notamment le ministère de tutelle et la commission de haut niveau. Il évoque également la possibilité de voir Mohamed Rabii sous les couleurs marocaines aux JO 2020, les Jeux africains qui auront lieu à Rabat en août prochain et les jeunes Marocains qui seront les plus attendus sur le ring lors des prochaines années.

«La porte est toujours grande ouverte devant  un champion comme Mohamed Rabii»

Le Matin : Vous êtes en pleine préparation pour les JO de Tokyo 2020. Cependant, vous attendez toujours le soutien du ministère et de la commission du sport de haut niveau – qui n’a toujours pas vu le jour. Alors comment vivez-vous cette situation ?
Mounir Barbouchi :
C’est vrai qu’on est responsable de la performance et du haut niveau. J’ai l’habitude de mener ce genre ce double projet : sur le court terme, c’est-à-dire les résultats, et sur le long terme pour ce qui est de la structuration. Au lendemain des JO de Rio, où l’on avait réussi à signer une médaille olympique, nous nous sommes tout de suite orientés vers les JO de Tokyo 2020. On pensait qu’il y aurait des dispositifs nous aidant à performer, des séries d’apprentissage, du matériel structurant… Là, le temps passe très vite et Tokyo c’est déjà demain. En fin de compte, la fenêtre de tir commence à se refermer et il faudrait s’asseoir autour d’une table pour pouvoir partager le projet et savoir où on va et comment on va le faire. C’est vrai que dernièrement nous avons reçu un courrier nous demandant d’établir nos listes de haut niveau. Ça veut dire que les choses commencent à bouger au niveau de la commission de haut niveau, au niveau du ministère aussi. J’entretiens des contacts réguliers avec le Comité national olympique marocain, mais il faudrait quand même accélérer le pas…

Qu’attendez-vous exactement de cette commission de haut niveau ?
Nous disposons d’une équipe qui est très jeunes. C’est des jeunes loups, qui ont très faim ! Je suis un spécialiste de la performance, et je pense qu’il faut l’objectiver. Il faut la contractualiser. Je veux dire qu’il faut parler à l’athlète, lui dire : tu as le potentiel, voilà où on veut t’emmener, voilà comment on va t’aider, est-ce que tu as vraiment envie d’y aller ? Toutefois, pour pouvoir tenir ce discours, il faut déjà que j’obtienne ce que j’attends des institutions partenaires, de cette commission de haut niveau.

Quand vous dites les attentes, vous parlez de moyens financiers ?
Bien sûr, nous avons des dépenses relatives au transport de l’équipe et tout ce qui a trait à la logistique. Nous avons aussi besoin de matériel technologique évolué, d’accompagnement social, d’accompagnement matériel, de couvrir les dépenses des diffé rents staffs. Mais les moyens ce n’est pas tout, les objectifs sont plus importants. 

Qu’avez-vous tiré comme bénéfices 
du stage de Cuba ?

Cuba en boxe, c’est la meilleure équipe olympique du monde. L’histoire parle pour eux. C’est un petit pays qui a réussi à obtenir plus de médailles en boxe que les Etats-Unis ou la Russie. Cuba, c’est déjà un nom, donc au niveau mental cela aide déjà les joueurs. Le premier jour, ils découvrent qu’ils ne sont pas mauvais, le deuxième jour ils arrivent à tenir tête aux Cubains, le troisième jour ils arrivent à faire aussi bien qu’eux. C’est très important pour la confiance. La vitesse et le rythme sont très élevés là-bas. Quand ils apprennent face aux Cubains et qu’ils se retrouvent ensuite face à des Européens ou des Africains, ils gagnent.

On a beaucoup parlé de Mohamed Rabii, mais là il y a une relève, notamment le jeune Yassine El Ouarz, qui a réussi une médaille aux JO de la jeunesse. Un mot sur ce jeune talent ?
Il s’était distingué dans les cadets lors des Gymnasiades de Marrakech en 2018, qui se sont déroulés sous le Haut Patronage de Sa Majesté le Roi Mohammed VI. Le Maroc a terminé premier en boxe et ça n’était jamais arrivé. Maintenant avec Yassine El Ouarz, ça se confirme chez les juniors, qui ont été élus meilleure équipe à Casablanca l’année dernière. Cela confirme qu’on est sur le bon chemin au niveau de la formation. Yassine El Ouarz a déjà réussi plusieurs excellentes prestations et vous le verrez encore à l’avenir, mais il n’est 
pas le seul. 

Quels sont donc ces autres jeunes espoirs de la boxe marocaine ?
On a Badr Berhili, qui est le fils d’un champion, Abdessamad Abbaz de Sidi Slimane, un jeune boxeur très puissant. On a plusieurs jeunes boxeurs qui sont là et qui tapent à la porte. On a aussi Yassine Bendada qui est maintenant senior et qui réussira de bons résultats je l’espère. On a Saïd Mortaji qui était champion d’Afrique en 2014… 

Vous avez évoqué Mohamed Rabii. Pensez-vous qu’il y a une chance de le voir à Tokyo en 2020 avec le Maroc ?
Du point de vue réglementaire, il a le droit. Tant qu’il n’a pas dépassé la barre des 13 combats professionnels, il peut évoluer aux JO. Mais il faut d’abord voir son plan de carrière, ce qu’il décidera. La porte est toujours grande ouverte devant un champion comme Mohamed. J’entretiens toujours des contacts avec lui. Il est toujours prêt à donner un coup de main à la sélection et au Maroc. Mais il y a d’autres boxeurs dans sa catégorie de poids, eux aussi ont des projets et espèrent briller au haut niveau. Que le meilleur gagne !

Revenons à la formation. Sans formateurs de qualité, on n’aura pas de champions de qualité. Quels sont vos actions sur ce volet ?
C’est vrai que sans formation de qualité, c’est difficile d’obtenir des boxeurs champions. Il faut un minimum de qualités physiques chez un jeune, mais même s’il est très bon en cadets, s’il est encadré par un mauvais coach, il sera un mauvais senior. Il faut savoir qu’au Maroc il y a 170 clubs et 367 entraîneurs qui sont référencés. Il a été proposé, grâce à la commission de formation, depuis 1 an et demi, que chaque entraîneur ait un plan de formation de 80 heures par an, pour que d’ici 4 ans, chaque entraîneur de club soit formé. La loi 30-09 stipule d’ailleurs que chaque coach doit être formé et diplômé. Donc on a décidé une mise à jour de la formation des entraîneurs, pour développer leurs compétences. L’objectif est d’aboutir, d’ici 4, 5 ou 10 ans, à une véritable école marocaine avec des entraîneurs de haut niveau et des boxeurs bien formés. 

Vous avez côtoyé les boxeurs marocains depuis plusieurs années. Quelles sont les véritables lacunes qui entravent leur développement ?
Ce qui manque au boxeur marocain c’est cette notion de l’objectif. Travailler sur le long terme, comprendre que le travail commence dès le plus jeune âge et ne s’arrête pas. Il faut savoir se tracer des objectifs et jalonner ce parcours-là. Nous avons plusieurs boxeurs issus de milieux défavorisés, et la majorité d’entre eux ne pensent qu’au court terme. Ils pensent d’abord à leur survie. Mais quand on veut faire carrière en boxe ou décrocher une médaille olympique, il faut penser à construire, et cette question demande à être posé. Je crois que c’est ça la véritable difficulté.

Quelle est la nature de la relation qui vous lie au coach cubain Dagoberto ?
C’est une bonne relation, basée sur la performance. On n’est pas là pour être de bons amis, on est là pour mener l’équipe vers des résultats. Il a déjà coaché une équipe marocaine aux JO et maintenant il s’apprête à remettre le couvert. Il est assisté dans sa tâche par plusieurs coachs marocains. Je pense notamment à Mohamed Mesbahi, qui a une grande expérience aux JO. Il a fait les Jeux olympiques 3 fois comme boxeurs et autant de fois comme entraîneur et il fait un excellent travail avec la sélection.  

Entretien réalisé par Abderrahman Ichi

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