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«Le timing de la décision de faire appel aux arbitres étrangers pour diriger les matchs de la Botola pose problème»

Connu pour son franc-parler, Mohamed Moujah a assuré que le bilan de l’arbitrage marocain après 18 journées du championnat était catastrophique. Il fustige l’incapacité de la Direction nationale d’arbitrage (DNA) à augmenter le nombre d’arbitres et dénonce la mise à l’écart de certaines ligues. Moujah a, en outre, estimé que faire appel à l’arbitre étranger en cette période de polémique sur l’arbitrage pose problème.

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Le Matin : quel bilan faites-vous de l’arbitrage en Botola D1 après 18 journées de championnat ?
Mohamed Moujah
: Le bilan est catastrophique et les choses vont de mal en pis. Si les responsables du football marocain ne prennent pas les bonnes décisions pour rectifier le tir, l’arbitrage marocain ira droit au mur. Pour établir le bilan, on doit absolument parler de l’élément humain qui a dirigé les 18 journées de la Botola. On constate que 22 trios arbitraux ont été utilisés lors de la phase aller. Un chiffre auquel s’ajoute un seul autre trio lors de la phase retour. Au total, 23 trios arbitraux ont dirigé les matchs de la Botola jusqu’à la 18e journée. L’arbitre le plus utilisé a officié dix matchs, le moins utilisé a dirigé une seule rencontre. Concernant la répartition de ces arbitres par ligue, on remarque que les arbitres de la Ligue de Casablanca sont les plus utilisés avec un taux de plus de 27% des désignations. En revanche, les arbitres de la Ligue du Sahara sont désignés une fois par an. Ceux de la Ligue du Nord ont été mis au placard depuis deux ans. C’est une injustice.

À quoi attribuez-vous cette injustice vis-à-vis de certaines ligues en matière de désignation des arbitres ?
Elle vient du manque de stratégie au niveau de la Direction nationale de l’arbitrage. Depuis 2014, neuf arbitres sont partis à la retraite et la DNA n’a pas réussi à tous les remplacer. Elle a lancé dans le bain quatre nouveaux referees. Mais là où le bât blesse, c'est quand la DNA ne réussit pas à faire émerger de nouveaux arbitres dans l’ensemble des ligues. C’est ce qui explique le fait que la ligue du Nord et celle du Sahara n’ont pas bénéficié de la moindre désignation. Comment se fait-il qu’il n’y ait pas d’arbitres dans ces deux ligues ? C'est parce que la répartition des arbitres est mal faite. Trois ligues accaparent le plus grand nombre d’arbitres actifs en Botola D1. Il s’agit de la ligue de Casablanca qui dispose de 5 trios arbitraux, de la ligue de l’Est avec trois trios arbitraux, au même titre que la ligue du Souss. Ces trois ligues disposent de pratiquement la moitié des arbitres de la Botola.

Pourquoi cette forte concentration des arbitres dans ces trois ligues ?
Parce que ces Ligues sont représentées soit à la Direction nationale de l’arbitrage, soit à la Commission centrale d’arbitrage (CCA). Les ligues qui ne sont pas représentées au sein de ces instances sont écartées.

Comment se fait la désignation des arbitres ?
J’ai été présent lors de la journée d’étude sur l’arbitrage organisée récemment à Skhirate. J’ai entendu M. Hadka dire que la désignation se fait par concertation en affirmant que chaque membre de la direction propose deux trios arbitraux pour chaque match et, ensuite, ces propositions sont soumises aux membres de la Commission centrale d’arbitrage pour faire son choix. Si le choix se faisait de la sorte, on ne tomberait pas dans les problèmes actuels. Mais je reste convaincu que le choix des arbitres se fait par le directeur de la Direction nationale de l’arbitrage. C’est peut-être ce qui explique pourquoi la Commission centrale d’arbitrage a vu passer trois directeurs depuis 2014. Cela prouve en tout cas qu’il n’y a pas de véritable stratégie pour développer l’arbitrage au Maroc.

Les erreurs arbitrales existent dans tous les championnats du monde, mais pourquoi les contestations sont-elles si vives au Maroc ?
C’est vrai que les erreurs d’arbitrage sont universelles. Mais pourquoi prennent-elles des proportions démesurées au Maroc ? Parce que tout simplement ces erreurs émanent des mauvais choix des arbitres pour officier certains matchs. On ne désigne pas l’arbitre qu’il faut pour les matchs sensibles. La deuxième raison émane du fait que les responsables de l’arbitrage ne protègent pas les arbitres quand il y a des polémiques. On ne les défend pas. La troisième raison est que les responsables de l’arbitrage ne communiquent pas avec la presse quand il y a des polémiques. Normalement, quand il y a un problème, ils doivent sortir dans les médias pour expliquer des choses et essayer d’apaiser l’atmosphère. Il y a quelques jours, lors d’une réunion sur l’arbitrage en Botola D2 qui s’est tenue récemment à Marrakech, le directeur de la DNA a dit aux arbitres que si l’un deux était au centre d’une polémique, il ne serait automatiquement pas retenu pour diriger les matchs de la journée suivante. C’est absurde de leur dire cela. Comment voulez-vous qu’un arbitre à qui on dit cela puisse diriger d'une main de fer un match ? Il aura toujours peur de faire l’objet d’une polémique et essayera donc de faire plaisir à tout le monde. Ce genre de déclarations ôte aux arbitres le courage d’être ferme et de prendre des décisions courageuses. L’autre point qui fragilise les arbitres est l’absence de fermeté envers les responsables des clubs qui fustigent les hommes en noir. On a vu comment le président du Youssoufia de Berrechid, Noureddine Bayedi, a clashé l’arbitre du match CAYB-WAC et pourtant il a été épargné. Idem pour le président du Wydad, Saïd Naciri, qui a violemment critiqué l’arbitrage dans une émission radio, mais il n’a subi aucune sanction. On a vu lors de la journée d’étude que c’est Faouzi Lekjaa qui a pris la défense des arbitres et non pas les responsables de l’arbitrage.

Il faut tout de même reconnaître que les responsables actuels de l’arbitrage ont donné la chance aux arbitres jeunes pour diriger des matchs de la Botola...
Je pense que c’est une fausse information qu’ils essayent de véhiculer. Il faut préciser ici que la plupart des jeunes arbitres nommés sont le produit du travail de l’ancienne Direction nationale d’arbitrage. C’est elle, dans le cadre du projet appelé le groupe Challenge, qui a lancé dans le bain plusieurs arbitres que nous voyons aujourd’hui. La nouvelle Direction a trouvé des arbitres déjà prêts à l’emploi. Mais elle n’a pas réussi à élargir la base, au point de faire appel aux arbitres étrangers pour officier dans notre championnat. C’est une première dans les annales du football marocain. Quand cette direction était arrivée, elle avait fait passer un concours pour choisir de nouveaux arbitres, mais on n’a encore vu aucun d’eux sur le terrain.

Faire appel aux arbitres étrangers n’est pas un aveu d’échec, mais entre dans le cadre de la mise en œuvre des accords de partenariat signés entre la FRMF et plusieurs autres fédérations continentales ?
Je ne le pense pas. Si on avait voulu effectivement mettre en œuvre ces accords de partenariat, on l’aurait fait il y a un an ou au début de la saison et non pas au moment où la crise de l’arbitrage a atteint son paroxysme. Le timing de cette décision pose problème. On a attendu la polémique et la réunion de Skhirate pour faire appel aux étrangers et dire que cela entre dans le cadre de la mise en œuvre des accords de partenariat. En plus, on se demande que va gagner l’arbitre marocain en contrepartie. On attend de voir tout ça.

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