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«Nous gardons espoir de capter des commandes pour l’Automne-Hiver si l’activité redémarre au plus tard fin mai»

La crise sanitaire due au Covid-19 a fortement impacté le textile-habillement. Dans cet entretien, Mohammed Boubouh, président de l’Amith, nous dresse un tableau noir d’un secteur à l’arrêt, mais l’espoir est permis. Si la saison Printemps-Été est morte pour les sous-traitants marocains, celle de l’Automne-Hiver est aussi compromise, sauf si la pandémie s’avère de courte durée dans le pays. Auquel cas, l’activité pourrait redémarrer d’ici fin mai, dans le meilleur des scénarios. Si le secteur dispose de cette capacité de rebondir rapidement, il n’en demeure pas moins que les professionnels réclament l’aide de l’État et des banques pour la période post-crise.

«Nous gardons espoir de capter des commandes pour  l’Automne-Hiver si l’activité redémarre au plus tard fin mai»
Pour Mohammed Boubouh, la situation est catastrophique pour les textiliens marocains qui espèrent redémarrer leur activité, d’ici fin mai, afin de pouvoir capter les commandes de l’Automne-Hiver.

Le Matin : La pandémie Covid-19 a impacté plusieurs secteurs économiques au Maroc. Comment se présente aujourd’hui la situation chez les textiliens ?
Mohammed Boubouh :
L’activité est à l’arrêt. La majorité des usines, soit plus de 90%, ont fermé. Du jour au lendemain, nos donneurs d’ordre nous ont mis en mode pause, soit ils ont annulé leurs commandes, soit ils les ont suspendues jusqu’à nouvel ordre.

À combien estimez-vous les pertes d’emplois ?
Sur les 190.000 emplois que compte le secteur, plus de 170.000 sont aujourd’hui en arrêt et toutes les régions du Maroc sont concernées.

L’arrêt de production en Chine à cause de la pandémie n’a-t-il pas joué en faveur du Maroc en tant que récipiendaire des commandes des donneurs d’ordre européens en début d’année ?
Il y a eu un regain d’intérêt des donneurs d’ordre européens pour les sous-traitants marocains avant la pandémie, et non à cause des problèmes d’approvisionnement en Chine durant la crise sanitaire. Cet intérêt est justifié par la proximité du Maroc, puisque nos clients sont amenés à constituer des stocks assez suffisants et doivent être de plus en plus réactifs aux besoins du marché qui favorise le Fast Fashion. 

Et durant la pandémie ? 
Tout le monde s’est retrouvé à l’arrêt, que ce soit au Maroc ou en Chine.

Aujourd’hui, des usines chinoises ont redémarré leur production…
Effectivement. C’est pour cela que nous espérons redémarrer notre activité le plus tôt possible. La saison Printemps-Eté est désormais derrière nous, c’est mort ! Maintenant, tout notre espoir est mis sur la saison Automne-Hiver, même si elle est aujourd’hui compromise, car les donneurs d’ordre risquent de placer toutes leurs commandes en Asie, particulièrement en Chine.

Quel est le scénario le plus optimiste, selon vous, pour capter ces commandes ?
Pour le moment, nous ne disposons d’aucune visibilité. Ce que nous espérons, c’est que le passage de cette pandémie au Maroc soit le plus court possible. Si c’est le cas, les donneurs d’ordre pourraient revenir et nous pourrions redémarrer en pleine capacité au maximum fin mai.

Des opérateurs se sont reconvertis dans la production de masques. S’agit-il d’une bouffée d’oxygène pour eux ? 
De nombreux confrères se sont effectivement reconvertis dans la fabrication de masques. Un grand nombre d’entreprises a manifesté son intérêt à le faire à titre gracieux, en signe de solidarité. Plus d’une cinquantaine sur Tanger, le même nombre à Casablanca, à Marrakech, nous comptons 5 ou 6 opérateurs qui se sont manifestés, mais également au niveau de la région de l’Oriental ou encore à Fès. Il s’agit d’un acte citoyen que je ne peux que saluer.

L’objectif, selon le ministère de l’Industrie, est d’atteindre, d’ici le 15 avril, une capacité journalière de cinq millions de masques. Songez-vous déjà à exporter comme l’a révélé récemment le ministre de l’Industrie ?
Le premier et principal souci du ministère est de répondre au besoin national en termes de matériel sanitaire. Une fois que l’on atteindra cet objectif, on pourrait effectivement entamer une autre discussion autour d’une éventuelle exportation, mais ce que je peux vous dire, c’est que cette éventualité n’a pas encore été discutée avec les pouvoirs publics.

Comment les pouvoirs publics vous accompagnent-ils en cette période critique ?
 Nous établissons des contacts permanents avec le ministère de l’Industrie pour suivre de près la situation partout au Maroc. Par ailleurs, je ne peux que saluer les mesures prises par les pouvoirs publics en faveur des ouvriers ayant perdu leur emploi. Il s’agit d’un grand soulagement pour nous, puisque notre première préoccupation était le sort de cette masse salariale. 

Est-ce suffisant pour reprendre du poil de la bête une fois la crise passée ?
Une fois la crise sanitaire passée, il faudra, à mon sens, s’asseoir avec les pouvoirs publics et les banques et les sensibiliser par rapport à la gravité de la situation que nous traversons. Nous ne sommes pas contre les mesures transverses adoptées par le Comité de veille économique (CVE), mais j’estime que nous avons besoin de mesures sectorielles, car il y a des secteurs comme le textile et le tourisme qui ont été profondément touchés par cette crise. Vous savez, l’avantage du secteur du textile, c’est qu’il peut facilement redémarrer et d’une manière rapide. De même, il est un véritable importateur de devises pour le pays, surtout en cette période où les secteurs orientés vers l’extérieur sont très touchés, impactant considérablement notre balance des paiements.

Quelles sont, concrètement, 
vos propositions ?

Nous en avons deux pour le moment. Nous demandons aux banques de nous octroyer des crédits à taux réduits, non pas jusqu’à fin décembre, mais jusqu’à 2022 au minimum pour soutenir durablement les entreprises touchées. Il s’agira, ensuite, de discuter avec les pouvoirs publics pour nous aider en ce qui concerne les charges sociales en trouvant une formule adéquate, et non une suspension momentanée. 

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