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«L’Art de la transmission» dans un esprit de défi et de renforcement des valeurs culturelles

Le Festival de Fès de la culture soufie revient, du 17 au 26 octobre, dans sa 13e édition sous la thématique «L’Art de la transmission». Mais cette fois-ci à travers un passage bien spécial, car il sera diffusé en digital sur la plateforme «Sufi Heritage», afin de prévenir la propagation du Covid-19.

«L’Art de la transmission» dans un esprit de défi et de renforcement des valeurs culturelles

Une édition 2020 exceptionnelle qui restera gravée dans les annales des festivals, dans la mesure où elle bravera la pandémie pour dire que la culture est une partie de nous-mêmes et qu’on ne peut s’en passer, même dans les pires moments. «Nous avons bien conscience que cela représente une série de défis extraordinaires. Mais nous souhaitons avec vous, amis festivaliers, transformer ces défis en un formidable levier d’humanité et de fraternité. Car c’est pour nous tous l’occasion, en pleine pandémie, d’affirmer non seulement la résilience, mais aussi la nourriture et l’énergie apportées par la culture et la spiritualité, face à cette épreuve», souligne Faouzi Skali, président du Festival, écrivain, docteur en anthropologie, ethnologie et sciences des religions. En effet, c’est un grand défi que de réaliser tout un festival en ligne, dans le seul but de servir les valeurs essentielles de l’art, de la culture et de la sagesse. Cette nouvelle stratégie, qui s’est imposée d’elle-même, permettra aussi une large diffusion et un partage plus vaste et interactif d’un programme riche en concerts, Samaâ, tables-rondes, conférences, expositions, avec l’implication d’une soixantaine d’intervenants. En plus des huit master class qui seront animées par de noms célèbres au niveau mondial, notamment Leili Anvar, Kudsi Ergüner, Françoise Atlan, Abderrazzak Benchaâbane, Faouzi Skali, Jean During, Aïcha Redouane et Denis Gril. «Ces Masterclass amorceront d’autres cycles de formation qui s’inscriront dans la suite du Festival sur la plateforme Sufi Heritage. Cet art de la transmission, nous pourrons aussi, grâce au numérique, le découvrir ensemble en allant à la rencontre de hauts lieux du soufisme. De Fès à Grenade, de Marrakech à Ajmer en Inde,  nous serons accueillis, dans leurs centres spirituels historiques, par celles et ceux qui transmettent et gardent vivante cette culture universelle, son patrimoine et ses valeurs», indique Faouzi Skali.
C’est pour cela, ajoute-t-il, qu’on a placé l’art de la transmission au cœur de la programmation de cette 13e édition du festival. «Car le soufisme est par tradition la voie de la transmission, celle du maître au disciple, des valeurs morales et du secret spirituel (sirr), permis par une chaîne de transmission initiatique (silsila) remontant au Prophète de l’islam. Il poursuit qu’à l’heure de la crise sanitaire majeure que nous traversons depuis le début du printemps 2020, la question de la transmission a surgi avec force. «Quelles valeurs, quelle éthique et quelle sagesse l’héritage culturel, philosophique et spirituel du soufisme peut-il nous offrir comme legs vivant pour les générations futures ?» Pour avoir des réponses à toutes ces questions, le festival part sur les routes soufies à la rencontre de celles et ceux qui transmettent et gardent vivante cette culture, son patrimoine et ses valeurs. «De Fès à Tivaouane au Sénégal, de Grenade à Ajmer en Inde, en passant par Marrakech ou Bejaâd, nous serons accueillis, dans les centres spirituels historiques, en compagnie de chercheurs, spécialistes, écrivains, comédiens, plasticiens, musiciens, guides spirituels…» Pour s’inscrire et en savoir davantage sur la programmation, les personnes intéressées sont invitées à visiter le site du festival : www.festivalculturesoufie.com. 


Entretien avec Faouzi Skali, président du Festival

«Il faut faire en sorte que la technologie soit au service de l’humanisme spirituel»

Le Matin : Qu’est-ce qui vous a poussé à maintenir cette édition du festival, malgré la situation actuelle de la pandémie de Covid-19 ?
Faouzi Skali
: La Culture dans le sens large du terme, et plus encore celle qui est porteuse d’une dimension spirituelle, constitue l’âme d’une société, c’est un lieu de ressourcement et de production d’une dynamique de mobilisation sociale. Dans un moment comme celui que nous traversons, ce ressourcement dans une énergie de pensée, de créativité ne ressort pas à une sorte de divertissement, mais constitue une réaction vitale, une réaction de survie face à cette crise. Il est toujours possible de reconstituer la perte de biens matériels, et souvent suite à des épreuves comme celle-ci, d’une façon encore plus riche et innovante. Mais que faire lorsque ce sont nos ressources psychiques, mentales et spirituelles qui s’effondrent ? Maintenir le Festival malgré toutes les difficultés que cela représente est pour nous un acte citoyen, mais c’est aussi un défi culturel en soi.

Quelles contraintes avez-vous rencontrées au cours de la préparation de cette édition virtuelle ?
L’écueil qu’il fallait à tout prix éviter est de penser que la solution digitale est une sorte de solution au rabais qui vient se substituer, faute de mieux, au déroulement du Festival dans les conditions habituelles d’une présence directe. Il s’agit d’un tout autre projet, même si la thématique est la même. Un projet qui nous incite à découvrir de nouvelles perspectives. Cette fois-ci, et à travers cet événement, c’est Fès qui voyage vers les hauts lieux du soufisme et de la spiritualité, vers des conférenciers, des artistes, des expositions, pour faire découvrir in vivo, si je puis dire, la fabuleuse richesse de cette culture spirituelle au Maroc et dans le monde. C’est une nouvelle possibilité qui ne nous était pas offerte ainsi auparavant. Un autre élément très important à mon sens, c’est le type de collaboration qui doit se déployer d’une façon très étroite entre cette conception et production digitales et les médias audiovisuels et de la presse écrite pour rendre compte d’un tel événement. De ce point de vue, ce sont encore de nouvelles perspectives qui s’ouvrent à nous et qui pourront continuer d’être approfondies à l’avenir. Nous sommes heureux des partenariats qui se sont établis avec nos médias pour tenter une telle aventure.

« L’Art de la transmission» est une appellation idéale pour la thématique de cette année, surtout à un moment où on en a le plus besoin. Croyez-vous que cette transmission pourra atteindre ses objectifs en ligne ?
Les nouvelles technologies sont des moyens comme d’autres et doivent justement rester en tant que tels. Je comprends la réticence que l’on peut avoir à se laisser envahir par une technologie qui devient une addiction au quotidien et crée un lien factice entre les gens, comme pour mieux les éloigner, les tenir à distance. Mais si nous faisons en sorte que cette technologie de transmission soit non pas un instrument d’asservissement, ce qu’elle peut être, mais au service d’un véritable contenu culturel, au service de ce que l’on pourrait appeler un humanisme spirituel, alors les signes sont inversés et elle peut se révéler particulièrement bénéfique et propice pour diffuser cette autre vision du monde. C’est ainsi que, par exemple, nous mettons cette technologie au service du développement de master class qui permettent de mettre en lien de grands maîtres de différents arts et patrimoines de la culture spirituelle du soufisme, tels que la poésie chantée du Samaâ, la calligraphie, les grandes œuvres telles celles de Rûmî ou d’Ibn Arabî, avec des disciples qui peuvent se trouver dans différents endroits du monde. C’est une façon de transmettre un patrimoine vivant et de le faire fructifier. Une transmission d’un patrimoine porteur de grandes leçons d’humanité, de spiritualité et d’art de vivre.

Est-ce que le choix de la programmation a été soumis à des critères bien précis en relation avec la plateforme digitale de la diffusion ?
Le choix du programme du Festival de cette année a été réalisé de manière à constituer une sorte de rampe de lancement et d’installation de la plateforme digitale «World Sufi Heritage» qui doit ensuite s’installer de façon permanente, notamment par les master class, la digitalisation du patrimoine culturel, et en particulier de manuscrits et de documents rares,  puis par l’aspect des échanges vivants et directs que l’on appelle streaming et dont le Festival est cette année un exemple. n
 

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