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«Nous pensons que chaque effort déployé par chacun de nous contribue à réduire la détresse causée par cette crise»

Depuis le déclenchement de la pandémie du Covid-19 au Maroc, les acteurs de la société civile se sont montrés très actifs, menant diverses actions auprès des populations vulnérables. C’est justement le cas de l’Association Al Ikram-Fondation Valyans. Afaf Berrada, directrice de cette ONG, partage avec les lecteurs du «Matin» son expérience durant cette période.

«Nous pensons que chaque effort déployé par chacun de nous contribue à réduire la détresse causée par cette crise»
Afaf Berrada.

Le Matin : Comment vivez-vous cette crise sanitaire au niveau de l’association Al Ikram ?
Afaf Berrada : Comme tous les Marocains, cette crise sanitaire nous a surpris puisque nous n’étions absolument pas préparés à un tel bouleversement dans nos comportements de vie et de travail. Mais en même temps, elle a stimulé la créativité de l’équipe d’encadrement qui a trouvé de nouvelles voies pour maintenir le lien et l’encadrement des bénéficiaires. Nous sommes passés au télétravail, au suivi à distance avec le maintien d’échanges récurrents avec les bénéficiaires par téléphone. Par ailleurs, notre carré d’action s’est quelque peu élargi à de nouvelles problématiques dues au confinement comme la violence à l’égard des femmes. 

Comment avez-vous réagi à l’appel de solidarité nationale ?
L’appel de solidarité nationale a été salutaire puisqu’il a permis de répondre en partie à cette grande détresse des citoyens qui, du jour au lendemain, ont été privés de leurs moyens de subsistance. Je pense au secteur informel, mais également aux salariés qui ont été mis au chômage partiel. Le fonds créé à cet effet a permis de contribuer largement à satisfaire les besoins primaires des familles en situation précaire.
Pour notre part, nous nous sommes attelés à acheminer les donations financières reçues de nos généreux contributeurs aux familles les plus fragiles. Nous avons sélectionné et identifié 320 familles parmi les bénéficiaires de nos programmes Dar Al Ousra, Al Ikram Lil Amal et Ressourc’in (Koun). Tout comme nous avons soutenu les parents d’enfants trisomiques (association Assadaqa) et des populations nécessiteuses plus éloignées vivant dans des régions enclavées. Il s’agit de familles habitant dans la région de Boulemane et dans la région de Marrakech. D’autres familles mono-parentales ou avec des enfants en situation de handicap physique et/ou mental ont encore besoin de nous.

Comment parvenez-vous à financer ces opérations ?
En ce qui concerne Al Ikram-Fondation Valyans, nous avons lancé des appels auprès de groupes de réseaux sociaux et de donateurs privés, qui ont réagi favorablement à notre appel aux dons. Étant une association reconnue d’utilité publique, les dons sont déductibles des impôts. Nous avons distribué des dons financiers sous forme de mises à disposition auprès d’agences bancaires (entre 500 et 1.000 DH par famille).
Nous sommes conscients que la participation de l’association Al Ikram-Fondation Valyans à cet effort national reste minime devant l’ampleur du défi, mais nous pensons que chaque effort déployé par chacun de nous contribue à réduire la détresse causée par cette crise.

L’une de vos vocations est l’aide à l’insertion socioprofessionnelle. Quels seront vos principaux défis en temps de crise et notamment face à un taux de chômage qui ne cesse d’augmenter ?
La vocation d’Al Ikram-Fondation Valyans est principalement l’insertion professionnelle des jeunes issus de milieux défavorisés dans le marché du travail.  Cette période de confinement a été propice pour mener à bien les actions de préparation en amont de l’insertion. C’est ainsi que nous avons développé en distanciel les activités de prospection des jeunes et des entreprises, de diagnostic des besoins à renforcer chez les jeunes et des séances de formation (techniques d’employabilité, droit du travail, développement personnel...). Nous avons, par ailleurs, été confrontés durant cette crise, d’une part, à la perte d’emploi des jeunes que nous avions insérés et, d’autre part, au défi de trouver des entreprises capables de recruter. Cependant, certains secteurs ont maintenu, voire développé leur activité, tels que la grande distribution et les sociétés d’hygiène et de nettoyage, ce qui nous a permis de réaliser quelques insertions. L’après-confinement recèle à coup sûr des opportunités que nous prospectons déjà auprès des entreprises ciblées.  De manière ponctuelle, nous avons encadré nos jeunes ayant perdu leur emploi à bénéficier des aides de l’État. Le Comité de veille économique prévoit un impact négatif durable sur le marché de l’emploi. Nous pensons, dans les limites de nos budgets, soutenir financièrement des jeunes en formation de reconversion ou à la recherche d’emploi via notre guichet d’insertion pendant 3 mois. Cette période de 3 mois sera dédiée à la recherche active d’un emploi.

Concernant votre programme d’éducation non formelle, comment faites-vous pour continuer de soutenir vos bénéficiaires ?
Après la réalisation du programme d’éducation non formelle pendant 18 ans et la réinsertion de plus de 1.700 élèves en rupture scolaire issus de milieux défavorisés dans le système scolaire public, l’association Al Ikram-Fondation Valyans après évaluation des nouveaux besoins des familles et des jeunes, a réorienté en 2018 son programme d’ENF vers deux axes. Tout d’abord, l’orientation des jeunes issus de l’ENF vers des formations professionnelles à travers son guichet d’insertion (accueil, formation et insertion dans le marché du travail). Et la création de Dar Al Ousra, un programme ciblant les parents ayant des enfants en bas âge et habitant dans des quartiers défavorisés en leur proposant un programme complet d’une éducation non violente et bienveillante qui améliore le lien affectif parents-enfants. Ce lien essentiel est à la base de tout développement personnel harmonieux de l’enfant. Cela se fait à travers la participation à des ateliers de formation et de sensibilisation animés par des experts psychologues, médecins, juristes, etc. Ce programme innovant et complet proposé prend en compte les besoins des parents, des futurs parents, les aspects de santé et nutrition de la mère et de l’enfant ainsi que l’éveil sensoriel, cognitif et moteur des enfants. Les études scientifiques ont démontré que tout se joue avant 6 ans, d’où l’importance d’agir auprès de tous les acteurs du développement de l’enfant, soit les parents à la maison et les éducateurs en milieu scolaire. 
En aboutissement de ce vaste programme, il s’avère nécessaire de former, sur ces nouvelles méthodes éducatives, des éducatrices spécialisées. C’est le programme de formation que nous développerons à partir de la rentrée scolaire de 2020-2021. 

 

Propos recueillis par Hajjar El Haiti

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