Menu
Search
Mercredi 24 Avril 2024
S'abonner
close
Mercredi 24 Avril 2024
Menu
Search
Accueil next Société

Les violences facilitées par les nouvelles technologies aussi dangereuses que celles physiques

D’après les résultats d’un sondage en ligne visant à établir une base de connaissance sur les violences dues aux nouvelles technologies au Maroc, on constate que de nombreuses femmes en sont victimes et continuent de souffrir en silence.

Les violences facilitées par les nouvelles technologies aussi  dangereuses que celles physiques

Harcèlement, commentaires abusifs, menaces, propos injurieux, insultes, diffamation, chantage, partage non consensuel d’images ou de communications privées… sont autant de nouvelles formes de violences facilitées par les nouvelles technologies (VFTIC) et auxquelles sont exposées les femmes. Afin d’évaluer l’incidence de ce type de violence et sensibiliser les femmes marocaines à ce sujet, MRA Mobilising for Rights Associates avait lancé en 2019, en partenariat avec un groupe d’associations, un sondage en ligne. D’après les résultats de ce sondage présenté mardi dernier à Rabat, plus de la moitié des agresseurs sont inconnus de la victime ou agissent de manière anonyme. Les agresseurs connus des victimes représentent une grande diversité d’hommes issus de relations intimes, personnelles et professionnelles. Les mobiles les plus courants sont la pression ou la contrainte pour relations sexuelles, l’extorsion ou la fraude pour de l’argent, et le non-respect des obligations légales en matière familiale. «Les violences facilitées par les nouvelles technologies sont omniprésentes à travers un large éventail d’espaces en ligne, le plus souvent via des applications de messagerie, des appels téléphoniques, des messages texte et des plateformes de réseaux sociaux.
Ces violences se distinguent par leur caractère fréquent et répété, avec 35% des répondantes vivant plusieurs incidents par jour. Elles ont tendance à persister dans le temps : 57% des répondants ont signalé des actes de violence durant au moins un mois à plus d’un an», explique MRA Mobilising for Rights Associates. Et d’ajouter qu’«Il existe un lien étroit entre la violence “en ligne” et la violence “hors ligne” dans le “monde réel”, car ce nouveau type de violence dégénère souvent en violence physique, des incidents violents tels que des viols sont enregistrés et distribués en ligne, et les victimes sont souvent maltraitées par leur entourage pour avoir “causé” la violence».
À l’image des violences «hors ligne», les violences «en ligne» sont rarement dénoncées. Selon les résultats du sondage, seuls 10% des femmes ont signalé les VFTIC aux autorités publiques, surtout aux forces de l’ordre. «Les femmes ne signalent pas les VFTIC aux autorités en raison du manque de connaissance des lois et procédures, de crainte d’être blâmées, jugées ou même d’être poursuivies elles-mêmes, du pessimisme quant à l’utilité de signaler les violences, du scepticisme que ceci aurait un résultat quelconque, des procédures compliquées, le manque de confiance dans le système, et l’impossibilité d’obtenir les preuves demandées par les autorités», souligne la même source. «La majorité des femmes qui ont déclaré les VFTIC n’ont reçu aucun résultat ni suivi. Huit femmes sur 10 qui ont signalé ce type de violence ont exprimé leur insatisfaction avec la réponse des acteurs publics, déclarant qu’elles n’ont pas été prises au sérieux, qu’elles ont été accusées elles-mêmes d’être fautives, et ont eu le fardeau imposé d’emmener la preuve de l’identité de l’agresseur». 

Les compagnies téléphoniques rarement averties

Les femmes victimes d’une violence facilitée par les technologies ont souvent du mal à en parler à leurs connaissances et encore moins aux autorités ou aux compagnies téléphoniques. D’après les résultats du sondage, il était extrêmement rare que les femmes signalent ces violences à la compagnie téléphonique locale ou à la plateforme de réseaux sociaux concernée. Les femmes ne demandent pas de l’aide des compagnies téléphoniques et des plateformes de réseaux sociaux, faute de connaissances des mécanismes et procédures, et encore une fois par crainte d’être blâmées, et du sentiment que ceci serait inutile et que ces sociétés ne feraient rien pour elles. Dans les rares cas où des femmes ont demandé de l’aide, les compagnies téléphoniques leur ont dit qu’elles ne pouvaient ni aider ni intervenir pour mettre fin aux abus sans ordre du procureur.

Impact sur les victimes et leur entourage

D’après les résultats du sondage, les femmes victimes de VFTIC subissent de nombreux préjudices psychologiques, économiques, physiques, familiaux, sociaux, sexuels et professionnels. Plusieurs femmes ont fait des tentatives de suicide ; d’autres ont quitté l’école, quitté ou perdu leur emploi, ou ont été forcées de déménager. Ces femmes sont souvent obligées de faire des sacrifices dans leur propre vie, en réduisant ou en annulant la participation à des espaces en ligne et en modifiant des éléments clés de leur identité, tels que leurs numéros de téléphone ou leurs profils. Pis encore, ces femmes gardent souvent le silence par peur d’être considérées comme fautives ou responsables de la violence, privées de leur téléphone, ou contraintes de voir leurs mouvements et activités restreints. Quant aux réactions des familles, elles sont assez mitigées. Il s’agit généralement d’une réponse faible à nulle, suivie de réactions punissant la victime et, dans quelques cas, des actions contre l’agresseur.

 Recommandations

MRA Mobilising for Rights Associates a formulé quelques recommandations basées sur les résultats du sondage. L’association appelle tout d’abord à reconnaître que les violences facilitées par les nouvelles technologies sont une violence réelle qui cause des préjudices réels dans le monde réel et à comprendre comment ce type de violence empêche les femmes d’exercer une diversité d’autres droits humains et libertés fondamentales. MRA Mobilising for Rights Associates recommande également de tenir les agresseurs, et non les victimes, responsables des actes de VFTIC. «Il est urgent de mettre fin à la culture de l’impunité, mais aussi tenir les acteurs publics de l’État, et non les victimes, responsables de la recherche de solutions au VFTIC et d’assurer la prévention, la protection, les poursuites, les sanctions, et les remèdes. Il est également essentiel de développer des stratégies holistiques qui répondent à toutes les raisons pour lesquelles les femmes ne signalent pas une violence, abordant des problèmes de connaissance, de craintes, et de politiques, procédures et pratiques inadéquates encadrant les rôles et responsabilités des acteurs publics», indique MRA Mobilising for Rights Associates.

Lisez nos e-Papers