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«Les pays européens veulent un Maroc faible, peu développé et dépendant de leurs intérêts»

Dans cet entretien, le politologue Mustapha Shimi revient sur les allégations d’Amnesty International et du consortium de journalistes Forbidden Stories accusant les autorités marocains d’utiliser le logiciel Pegasus pour espionnage. Pour lui, les Européens ne veulent pas d’un Maroc souverain et maître de son destin, d’autant que la convergence entre Rabat et Washington est de nature à laisser peu de place aux intérêts des pays européens. Tout en relevant les motivations profondes des auteurs de ces calomnies, M. Shimi appelle à la mobilisation et l’unité du front national autour du leadership de Sa Majesté le Roi.

«Les pays européens veulent un Maroc faible, peu développé et dépendant de leurs intérêts»
Mustapha Shimi.

Le Matin : Amnesty International et le consortium de journalistes Forbidden Stories accusent les autorités du Royaume d’utiliser le logiciel Pegasus pour espionner des journalistes, des militants, mais aussi des personnalités de haut rang. Que pensez-vous de ces allégations ?
Mustapha Shimi :
C’est une nouvelle cabale contre le Maroc. Cette affaire de Pegasus traduit bien la persistance d’une politique d’hostilité à l’endroit du Royaume. «Ils» veulent impliquer le Maroc, mais ils oublient de mentionner qu’il y a plus de 20 pays qui sont mis en cause. Alors, la première observation à relever c’est de se demander quelles sont les raisons de ce tropisme particulier envers le Maroc. La deuxième observation, c’est l’absence de la moindre preuve étayant ces supputations. Il n’existe aucun élément objectif probant matériel mis sur la table. Nous sommes donc bien en présence d’une campagne d’hostilité généralisée qui a été étendue à plusieurs domaines et pose un problème qui touche les relations bilatérales entre la France et le Maroc. En effet, l’implication directe ou indirecte du centre de décision public en France, des médias financés par l’État français et d’autres organismes de presse ayant des relations étroites avec des institutions françaises au même temps, soulèvent nombre d’interrogations !

Quel seraient à votre avis les motivations de cet acharnement contre le Maroc ?
Je pense que cet acharnement trouve sa motivation dans le fait que le Maroc de 2021 dérange. C’est un Maroc qui est devenu une puissance régionale et qui est partie prenante dans un certain nombre de grands dossiers régionaux, notamment la Libye et le Sahel, dans leurs ses aspects diplomatiques et sécuritaires. Il est également une puissance régionale pour ce qui est de la politique de coopération avec l’Afrique de l’Ouest et l’ensemble de l’Afrique. Le Royaume dérange également parce qu’il prône une nouvelle approche des relations régionales, en particulier de la coopération Sud-Sud où il est le pionnier et je peux dire qu’à ce niveau les intérêts de certaines puissances européennes sont directement menacées. Je pense notamment aux intérêts français, espagnols et allemands. Il ne faut pas oublier qu’il existe des problèmes concernant la délimitation des eaux maritimes entre le Maroc et les iles Canaries. Ces eaux recèlent des minerais rares pouvant être utilisés dans l’industrie des voitures électriques. C’est un enjeu dont on ne parle pas, mais qui est extrêmement important.
Le Maroc dérange par ailleurs du fait que le Souverain incarne un leadership dans la région et même au-delà. Ce leadership moral et politique qui est salué par les grandes puissances du monde, notamment les États-Unis et la Russie, dérange parce qu’il représente l’affirmation d’une autonomie de décision du Maroc. Au fond, il faut reconnaître que les pays européens veulent un Maroc faible, peu développé et dépendant de leurs intérêts. Or sur le plan géostratégique, le Royaume s’affirme aujourd’hui, notamment après la reconnaissance américaine de sa souveraineté sur les provinces sahariennes, comme un État pivot au Maghreb et en Afrique. Cette convergence d’intérêts entre Rabat et Washington est de nature à laisser peu de place aux intérêts des pays européens.

À votre avis, quel serait donc le poids de ces allégations en l’absence de preuves ?
Je vous répondrai en citant le philosophe Francis Bacon : «Calomniez, calomniez, il restera toujours quelque chose». Le Maroc a réagi avec fermeté en demandant l’engagement de poursuites judiciaires et en mettant au défi les auteurs de ces calomnies de produire le moindre élément matériel d’implication du Maroc. Le Royaume n’est pas naïf. Il est conscient que les auteurs de ces calomnies poursuivront ces tentatives, comme ils l’ont fait il y a trois ans dans le cadre d’une politique plus générale de discrédit du Maroc dans un dessein secret, celui de la déstabilisation du Royaume aussi bien sur le plan externe que sur le front interne. Et pour ce faire, ils déploient d’autres éléments, notamment la jonction qu’ils font entre cette affaire de logiciel espion et la situation d’un certain nombre de condamnés qui ont été jugés par un certain nombre de juridictions marocaines, lesquelles disposent d’un pouvoir autonome, grâce à l’indépendance consacrée par la Constitution.

Quelle démarche le Maroc devrait-il adopter pour faire face à ce genre d’attaques ?
La justice est une institution constitutionnelle indépendante à laquelle il faudra se fier. Le Maroc est parmi les rares pays dans la région à avoir accueilli des observateurs internationaux pour suivre un certain nombre de procès et ces observateurs n’ont relevé aucune entrave dans leur travail. Le Royaume est donc tout à fait à l’aise quand il recourt à sa justice en toute transparence, et dans le respect des règles et de la législation marocaine. Je considère par ailleurs que l’état d’avancement de nos droits et libertés est la meilleure réponse à ces campagnes d’hostilité et de dénigrement. 
Le Maroc devra par ailleurs faire preuve à chaque fois de fermeté et de détermination et, sur ce point-là, nous avons une diplomatie à la hauteur de ces défis. Elle est capable de rendre coup pour coup et d’expliquer à la communauté internationale les tenants et les aboutissants de ces campagnes haineuses. Enfin, sur le plan interne, j’estime que le front intérieur marocain est un front pluraliste, même avec l’existence de certaines sensibilités, mais tous les partis politiques sont unis autour des fondamentaux, à savoir le renforcement de l’unité et la cohésion nationale et la défense de l’indépendance et la souveraineté du Royaume. 

Propos recueillis par Yousra Amrani

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