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«La transformation numérique de l’administration est un processus irréversible et un gage d’amélioration de la qualité du service»

Pour Ahmed Laamoumri, secrétaire général du département de la Réforme de l’administration, le chantier de la réforme et de la modernisation de l’administration puise sa force et sa philosophie dans les Hautes Directives de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, notamment le Discours du Trône de 2019. M. Laamoumri souligne en effet que les Orientations Royales sont «très opérationnelles et insistent sur l’impératif de mettre en place des actions concrètes» pour que le secteur public opère «un triple sursaut en termes de simplification, d’efficacité et de moralisation». À cet égard, le haut responsable gouvernemental affirme que la transformation numérique est un gage d’amélioration de la qualité du service offert aux usagers et un processus irréversible au sein de l’Administration marocaine.

«La transformation numérique de l’administration est un processus irréversible et un gage d’amélioration de la qualité du service»

Le Matin : La loi n°55-19 relative à la simplification des procédures et formalités administratives a été publiée au BO le 19 mars 2020. Que représente cette étape pour vous ?
Ahmed Laamoumri
: Je tiens tout d’abord à souligner que les nouvelles dispositions de la loi n°55.19 s’inscrivent dans le cadre de l’implémentation des Hautes Orientations Royales relatives à la réforme de l’administration. Cette loi vise à instaurer un changement radical au sein de l’administration marocaine et à créer une rupture avec les anciennes pratiques. L’objectif étant d’améliorer  les relations avec les usagers tant les citoyens que les entreprises et de restaurer leur confiance, conformément aux directives de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, notamment à l’occasion de l’ouverture de la première session de la première année législative de la dixième législature et lors des Fêtes du Trône des années 2018 et 2019 qui ont constitué un levier important du chantier de la réforme de l’administration publique.  Les Discours Royaux ont établi un  diagnostic sans complaisance de l’état de l’administration publique et son incapacité à accompagner les exigences de l’ère moderne en matière de satisfaction des attentes et aspirations des citoyens. Les Directives du Souverain, précisons-le, sont très opérationnelles et insistent sur l’impératif de mettre en place des actions concrètes pour changer le visage de l’administration. On peut citer, à ce titre, un extrait du discours du Trône de 2019 : «Le secteur public doit, sans tarder, opérer un triple sursaut en termes de simplification, d’efficacité et de moralisation».
Pour relever les défis fixés par les Hautes Orientations Royales, la loi n° 55.19 relative à la simplification des procédures et formalités administratives, qui a été portée par le ministre de l’Intérieur et le ministre de l’Économie, des finances et  la réforme de l’administration, vise à opérer une véritable rupture avec  un ensemble de pratiques négatives caractérisant les relations existant entre l’usager et l’administration. Ce texte tend à instaurer une nouvelle relation entre l’usager et l’administration, fondée sur la confiance et la transparence. Depuis la publication de la loi au Bulletin officiel le 19 mars 2020 et son entrée en vigueur le 28 septembre 2020, les administrations sont à pied d’œuvre pour mettre en œuvre les nouvelles dispositions qui permettront d’instituer une relation avec les citoyens fondée sur un référentiel bien défini, encadrant l’action des services publics sur la base de procédures claires, simples et transparentes et répondant aux attentes et besoins des usagers.

Les administrations avaient jusqu’au 28 mars pour publier l’ensemble des actes administratifs relevant de leurs champs de compétences sur le Portail national des procédures  administratives, après validation bien sûr de Commission nationale de simplification des procédures  administratives. Ont-elles toutes respecté cet impératif ?
La loi a fixé un délai de six mois aux administrations pour qu’elles recensent, documentent et transcrivent l’ensemble de leurs actes administratifs  dans des recueils et conformément à un modèle préétabli, qu’elles devaient soumettre à la Commission technique qui est chargée de les instruire et de vérifier leur conformité avec les nouvelles dispositions législatives, avant de  soumettre les actes administratifs, pour approbation, à la Commission nationale qui est présidée par le Chef du gouvernement pour validation. Le premier lot des actes administratifs a été publié au Portail national des procédures administratives «Idarati», qui a été lancé le 21 avril.
 Les administrations ont franchi des pas considérables en matière de transcription de leurs actes administratifs avec un nombre important d’administrations et d’établissements publics concernés par cette loi. Je tiens, à cet égard, à indiquer que cette étape a nécessité beaucoup de discussions, de va-et-vient avec ces administrations en raison particulièrement de la non-conformité de certains actes avec les principes et règles édictés par cette loi et  l’absence de soubassements juridiques pour d’autres actes et pièces exigées  qu’on a dû supprimer. Cette situation a été, parfois, dure à accepter par certaines administrations. Sur plus  3.000 actes étudiés et analysés,  plus de 1.400 ont été validés par la commission technique, dont environ 800 actes  sont  déjà publiés sur le Portail national «www. idarati.ma», et d’autres le seront sous peu. Je tiens à  souligner, dans ce sens, que la Commission nationale est la seule  instance habilitée à certifier et approuver les actes avant leur publication dans le Portail «Idarati».
Les actes validés par cette instance sont donc conformes aux dispositions de la loi. Les règles et principes de cette loi ont été respectés lors de la transcription de ces actes  tels que  l’interdiction de demander à l’usager de fournir plus d’un seul exemplaire de chaque dossier et de chaque pièce administrative objet de  la demande d’un acte administratif, l’interdiction de demander à l’usager de fournir des documents à caractère public ne le concernant pas personnellement, la suppression de la légalisation, de la certification des copies conformes des documents composant le dossier de demande de l’acte administratif, avec la possibilité de la substitution de certaines pièces ou informations requises pour l’accomplissement d’un acte administratif par une déclaration sur l’honneur produite par l’usager concerné, l’obligation de délivrer un récépissé lors du dépôt de la demande, la suppression des actes n’ayant pas de soubassements juridiques, etc.
Quelle est justement l’importance du Portail national des procédures administratives qui vient d’être lancé ? Quelles facilités offre-t-il concrètement aux usagers (citoyens et investisseurs) ?
La transformation numérique est un gage d’amélioration de la qualité du service offert aux usagers et un processus irréversible au sein de l’administration marocaine. C’est dans ce cadre que s’inscrit le lancement du Portail national «Idarati» qui vise à  renforcer la  transparence qui est la clé de la confiance. Ce principe est fondamental dans le chantier de la simplification des procédures administratives.  Le Portail national «Idarati», qui est la pierre angulaire de la réforme escomptée, est une plateforme numérique et une interface d’information unifiée, intégrée et multi-espaces, mettant à la disposition de l’usager les informations administratives relatives aux actes administratifs validés par la Commission nationale. Celle-ci est la seule instance habilitée à certifier les actes administratifs et, par conséquent, l’administration ne peut opérer aucun changement sur le Portail qui constitue, désormais, l’unique référence officielle nationale pour l’usager, lui permettant de consulter les procédures et formalités administratives qu’il doit effectuer auprès des administrations, des établissements et des entreprises publics ainsi que des collectivités territoriales et toute personne morale assujettie au droit public. Dorénavant, les administrations ne peuvent exiger  que les actes administratifs et les documents stipulés dans les textes législatifs ou réglementaires en vigueur et publiés sur ce Portail.
La loi prévoit, par ailleurs, des voies de recours pour le citoyen en cas de non-respect par l’administration des dispositions de cette loi. Le Portail «Idarati» repose sur trois socles fondamentaux, à commencer par l’espace informationnel qui est déjà activé. Il sera procédé, par la suite, à la digitalisation de l’ensemble des actes administratifs à travers le lancement de l’espace transactionnel qui s’inscrit dans le cadre du chantier de la digitalisation. Rappelons à cet égard que la loi a accordé aux administrations un délai de cinq ans, à partir de la date de son entrée en vigueur, pour la digitalisation de l’ensemble de leurs actes administratifs. Le troisième socle de ce portail est l’échange et l’interopérabilité entre administrations, conformément aux nouvelles dispositions de cette loi.

Beaucoup de citoyens affirment – à tort ou à raison – qu’ils ne perçoivent pas encore de changements majeurs en termes de simplification des procédures administratives. Qu’avez-vous à leur dire ?
Le chantier de la simplification des procédures administratives n’est qu’à ses débuts. Sa mise en œuvre permettra, à moyen terme,  d’opérer une révolution au sein de l’administration marocaine. Vous n’êtes pas sans savoir que la conduite du changement n’est pas une opération qui pourrait se faire du jour au lendemain, car l’enjeu consiste à changer les mentalités et à transformer une culture qui a été enracinée au sein de l’administration depuis de longues années. Ainsi, il est normal de ne pas percevoir le changement dans l’immédiat. Le processus qui vient d’être  enclenché permettra d’assoir progressivement la réforme souhaitée. Le lancement du Portail national «Idarati» n’est qu’une première étape dans la stratégie de réforme. Une deuxième phase de simplification sera lancée sous peu dans l’objectif de dématérialiser l’ensemble  des actes administratifs.
 Un système de suivi, de contrôle et de veille sera mis en place pour veiller à l’effectivité des dispositions de cette loi. L’administration est appelée à s’approprier les nouveaux principes de la loi de la simplification des procédures  pour mener à bien ce grand projet de société. En tout cas, les premiers indicateurs sont positifs car, d’une part, les perspectives de la mise en œuvre des nouvelles dispositions juridiques sont prometteuses et, d’autre part, les administrations adhèrent pleinement à ce chantier d’envergure. Tous les ingrédients sont en effet réunis pour restaurer la confiance dans l’administration.

Concernant beaucoup de réformes, les lois parfois ne suffisent pas (Code de la famille, par exemple). La culture et l’état d’esprit doivent changer. Avez-vous pensé à inclure cette dimension dans la réforme de l’administration marocaine ?
Pour relever les défis de la simplification des procédures administratives, la composante de la citoyenneté est déterminante. Un fonctionnaire est, en effet, d’abord un citoyen. Cette idée doit être présente en permanence dans nos esprits pour améliorer notre administration. Chacun de nous a le devoir de faire preuve de civisme et de civilité. C’est d’ailleurs dans ce cadre que s’inscrivent les actions de sensibilisation et de formation des fonctionnaires que nous avons lancées au niveau des services déconcentrés de toutes les régions du Royaume et d’autres actions de conduite du changement seront également organisés au niveau national. Nous sommes bien conscients que le changement sera progressif pour bâtir un projet de société qui nécessite l’adhésion et la mobilisation de l’ensemble des parties : administrations, citoyens et entreprises. 

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