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Accueil next Une arme à double tranchant

«Les fondamentaux de Managem sont excellents sur le long terme»

L'invité de cette semaine est l'un des plus anciens collaborateurs du groupe ONA. Il a intégré la holding en 1979, plus précisément dans une mine de cuivre située dans la région d'Ouarzazate.

«Les fondamentaux de Managem sont excellents sur le long terme»
Grâce à ses compétences et à son caractère discret mais efficace, Abdelaziz Abarro a gravi plusieurs échelons avant de devenir responsable de l'activité minière du groupe en 1999. La même année, on fera appel à lui pour chapeauter, cette fois-ci, l'activité agroalimentaire. Cinq ans plus tard, retour aux sources, à la demande du groupe, A. Abarro regagne le pôle minier en tant que P-DG de Managem et de sa filiale Imiter. Ses objectifs sont clairs: diversifier au mieux le portefeuille des métaux, tout en assurant la pérennité des gisements, le tout dans une perspective de long terme.
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LE MATIN ÉCO : Quelle appréciation faites-vous des résultats de Managem au premier semestre ?
ABDELAZIZ ABARRO :
Nous avons enregistré une progression de 16% au niveau du chiffre d'affaires. Cela est dû essentiellement à l'amélioration du volume des ventes mais aussi de certains cours comme celui du cobalt. Le résultat courant a progressé certes de 4%, moins que l'évolution du chiffre d'affaires, mais cela s'explique par le renchérissement des consommables qui interviennent dans la production de nos produits. Globalement, je dois dire que l'évolution a été très positive et tout à fait conforme aux attentes.

Il y a eu aussi une baisse du RNPG (Résultat net part du groupe)…

Parce qu'il fallait comparer des choses comparables. Le RNPG de 2007 intégrait des éléments non courants à l'occasion de la mise en conformité de nos comptes, pour la première fois, aux normes IFRS. En 2007, il fallait tenir compte d'un ensemble d'écritures qu'on ne retrouve pas dans les résultats du premier semestre 2008. Voilà pourquoi il y a eu cette différence au niveau du RNPG.

Quels sont les métaux qui tirent l'activité de Managem vers le haut ?
C'est le cobalt qui a enregistré la hausse la plus sensible, suivi du cuivre. Nous avons enregistré par contre un retrait au niveau du zinc et du plomb.
Il y a eu aussi l'évolution défavorable du dollar qui nous a énormément impactés dans la mesure où toutes nos ventes sont réalisées en dollar. Mais globalement, tout cela s'est traduit par une évolution de 16% du chiffre d'affaires.

Comment votre groupe confronte-t-il la volatilité caractérisant les cours des matières minérales?

Managem accorde un intérêt particulier aux matières
premières. Ce sont des denrées qui restent soumises aux aléas des marchés et des places financières, provoquant parfois des augmentations incompréhensibles de cours. L'évolution des prix dépend des fondamentaux des marchés mais aussi de l'intérêt des opérateurs. Nous sommes ainsi contraints de gérer au mieux cette situation. Le fait d'avoir un panier de portefeuille diversifié (Managem opère dans six ou sept substances minières) permet de moduler l'évolution globale. En moyenne, nous arrivons à gérer les risques liés à cette situation. C'est un avantage important pour nous.

Y a-t-il aujourd'hui assez de visibilité sur l'évolution future des cours des métaux ?

Dans le contexte actuel, personne n'est capable de prévoir comment évolueront les choses à court terme. Ce qui est sûr, c'est que les fondamentaux des matières premières sur le long terme, en particulier les matières minérales, sont très bons. Je pense que la situation que nous vivons aujourd'hui sera dépassée assez rapidement.

Votre activité est confrontée aussi à la volatilité des marchés de change. Dans quelle mesure la question du change impacte-t-elle les performances de Managem ?

La baisse du cours du dollar lors du premier semestre a été défavorable. Mais depuis quelques semaines, on constate que le dollar commence à se consolider, chose qui permet d'atténuer la baisse momentanée que nous enregistrons sur les cours des métaux. Tout dépendra de l'évolution de ces cours en 2009.
Il est important de noter encore une fois la bonne tenue des fondamentaux des matières minérales sur le long terme.
La demande future n'aura rien à voir avec les niveaux enregistrés dans les années 90 ou au début des années 2000. De plus en plus de pays accèdent à la croissance économique et seront, de ce fait, de plus en plus demandeurs de matières minérales. A long terme, il y aura une forte pression sur la demande et, par conséquent, sur les prix.

Disposez-vous assez suffisamment de réserves, locales ou à l'international, pour pouvoir accompagner cette hausse de demande ?

Ces dernières années, nous avons mené des programmes importants de recherche sur nos sites. Les bilans sont très positifs. Concernant l'argent, nous avons enregistré des découvertes qui dépassent largement ce que nous produisons chaque année. Par exemple, la durée de vie d'Imiter a été largement augmentée, ce qui nous permet d'envisager par la suite une extension de nos capacités. C'est le cas aussi pour le cobalt à la mine de Bouazzer où nous avons eu un rendement de recherche tout à fait excellent. Le cuivre représente également un potentiel considérable compte tenu des découvertes réalisées, en particulier dans la région de la mine de Akka ou encore dans la mine de Ouarzazate. Le cuivre est un métal très porteur pour nous sur le long terme. Il viendra consolider notre portefeuille.

A l'international, nous avons mis en évidence un gisement cobalto-cuprifère important en République démocratique du Congo (RDC). Il fera l'objet d'un projet de cobalt dans les prochaines années. Au Gabon, nous travaillions sur un gisement d'or qui est aujourd'hui complètement délimité. L'étude de faisabilité est déjà faite. Ce projet qui va être lancé incessamment nécessitera un investissement de l'ordre de 30 millions de dollars. Nous allons démarrer d'abord par une production d'une tonne et demie par an tout en poursuivant la recherche dans l'objectif d'augmenter le potentiel des ressources de ce prospect.

A partir de quand ce projet aurifère devrait-il laisser des traces au niveau des résultats de Managem ?

Il impactera le résultat à partir de 2010. Cela dit, dans le domaine de l'or, nous travaillons sur d'autres sites, dans d'autres pays. C'est le cas du site du Gabon ou celui du Congo Brazzaville où nous avons aussi un prospect très prometteur. Notre objectif est d'arriver à dégager assez rapidement au moins deux ou trois projets importants dans le domaine de l'or au niveau international.

Qu'en est-il des programmes de couvertures sur lesquels le groupe s'était engagé il y a quelques années. Sont-ils arrivés à échéance ?

Pour l'or de Akka, les couvertures sont toujours en cours. Nous essayons d'optimiser au mieux la situation en fonction de la conjoncture internationale.
La mine de Akka qui produisait uniquement de l'or est devenue aujourd'hui une mine importante de cuivre. L'utilisation de la capacité totale de production de cette mine permet d'optimiser l'outil industriel aussi bien pour l'or que pour le cuivre.


Managem ne serait-il donc pas obligé d'acheter de l'or à l'international pour répondre à ces engagements de couvertures ?

Non, pour l'or, normalement avec les réserves que nous avons à la mine de Akka, nous devrons être au niveau des couvertures engagées. A priori, nous ne serons pas obligés d'acheter de l'or sur le marché. Il peut y avoir quelques moments passagers, mais structurellement, sur le moyen terme, nous devrons normalement y faire face avec les niveaux de réserves dont nous disposons.

Pour quand est prévue l'expiration des couvertures ?
En 2012

Le retrait des ventes observé au premier semestre à la mine de d'Akka ne remet-il pas en cause la situation ?

Il y a eu effectivement une baisse de la position du cuivre à la mine de Akka. Elle est due essentiellement aux essais de traitement qu'il a fallu faire dans la mesure où nous nous sommes lancés dans l'exploitation d'un autre gisement de cuivre. Ce dernier a nécessité une mise au point pour le traitement. C'est chose faite. Aujourd'hui, le cuivre est produit tout à fait normalement.

Comment se déroule concrètement le processus d'intervention de Managem ? On peut imaginer qu'il s'agit d'un travail colossal…

C'est un travail qui demande effectivement de la persévérance et surtout des ressources humaines compétentes. C'est un processus que nous avons engagé il y a de cela une dizaine d'années. Nous sommes aujourd'hui présents sur cinq ou six pays africains (Gabon, RDC, Congo Brazzaville, Mauritanie, Soudan et aussi en Tunisie où nous détenons des permis). Notre intervention se décline de différentes manières. Soit à travers l'acquisition des permis de recherche dans les pays qui présentent un intérêt géologique pour telle ou telle substance. Puis, nous envoyons des équipes qui commencent à faire de la recherche et de la prospection dans l'objectif de mettre en évidence des ressources qui feront l'objet par la suite de projets miniers autonomes.

Une deuxième manière de faire consiste à passer vers une étape plus avancée. C'était le cas par exemple pour le projet aurifère au Gabon. Managem intervient de deux manières. Soit à un stade amont (prospection, recherche) soit à un stade plus avancé (acquisition de projets). Un projet minier peut prendre plusieurs années. Tout dépend des prospects. Il y a des projets qui peuvent aller plus vite parce que le chantier est favorable sur le plan géologique. Auquel cas il faudra trois à quatre ans pour le mettre en évidence. Cela nécessite la mobilisation de beaucoup de compétences, notamment en termes de gestion de ressources humaines. Les gens qui opèrent sur les sites sont obligés de se débrouiller avec leurs moyens et d'être efficaces et rapides sur le plan technique.

Qu'en est-il de la filiale SMI (Société métallurgique d'Imiter). A fin juin, elle arrive à peine à réduire les pertes de 2007. Comment expliquez-vous cette situation ?

La Société métallurgique d'Imiter est une société qui recèle un potentiel géologique très important. C'est certainement l'une des mines où nous avons le meilleur rendement en termes de recherche. D'ailleurs, depuis 2005, nous avons pu mettre en évidence chaque année pratiquement entre 500 et 600 tonnes de réserves supplémentaires, soit le double voire le triple de la production d'Imiter.

Le potentiel géologique des gisements d'imiter est donc très important. C'est pour cela que nous envisageons une augmentation de ses capacités dans l'avenir. Les résultats enregistrés ces dernières années ont été effectivement impactées dans une large mesure par les couvertures engagées (pratiquement plus de 90% de la production). C'est un manque à gagner pour la société. Mais à partir de 2010, il n y aura plus de couverture. De toutes les manières, avec des augmentations des capacités, il y aura un effet positif aussi bien en termes d'augmentation de tonnage qu'en terme de dégagement des couvertures. L'argent est un métal précieux et très porteur pour l'avenir.

Quels sont les principaux clients de Managem ?

Pour les engagements de couverture, nous avons des contrats avec les banques qui opèrent sur les bourses internationales des matières premières. Quant aux matières physiques que nous produisons, nous les vendons aux clients avec qui nous essayons d'entretenir des relations pérennes. Par exemple, pour les métaux précieux, nous travaillons depuis plus de vingt ans avec des clients suisses. Il faut savoir que la Suisse raffine, à elle seule, 70% des métaux précieux dans le monde. Pour le cobalt, nos principaux clients sont basés en Europe et, dans une moindre mesure, en Asie. Pour les métaux de base, nous travaillons avec de grands noms, essentiellement européens, Le choix de l'Europe répond au souci de la proximité qui nous permet d'éviter des frais de transport élevés.

Qu'en est-il du marché local, sachant que vous avez été derrière une initiative qui consiste à approvisionner en argent les artisans de la région du Sud ?

Nous avons signé effectivement une convention avec le ministère de l'Artisanat pour essayer d'approvisionner les artisans en argent. Pour le moment, cela concerne de petites quantités. Le Maroc n'est pas encore un grand consommateur de métaux. Puis, nos produits n'ont pas encore atteint le stade final.

Justement, qu'est-ce qui empêche Managem d'étendre la chaîne jusqu'à un stade avancé ?

Nous le faisons déjà. Le développement de l'hydrométallurgie permet justement de répondre à l'extension de la chaîne de la valeur ajoutée. Dans le cobalt par exemple, nous sommes arrivés au stade du métal pur. Il est toujours possible d'aller vers des stades avancés. Mais, à ce moment là, on rentre dans des niches particulières. Pour reprendre le cas du cobalt, il faut faire des produits dérivés avant de fabriquer les batteries. Notre démarche est simple, tant que c'est économique de le faire, nous essayons d'aller le plus loin possible. Beaucoup de paramètres rentrent en ligne de compte. Dans certaines activités, si vous n'atteignez pas une taille relativement importante, la rentabilité économique est remise en cause. Le coût des paramètres (l'énergie dans certains cas) constitue un frein important. Puis, il y a la proximité des marchés. Mais ce n'est surtout pas un problème technique ou technologique. Les équipes de Managem ont démontré leurs capacités innovatrices à l'échelle internationale.

Managem ne serait-il pas touché par les répercussions de la crise internationale, ne serait-ce que parce que vous traitez avec des banques suisses (On a vu l'Etat suisse est en aide à la célèbre UBS) ?

Nous n'avons pas de problèmes à ce niveau parce que nous avons des contrats vis-à-vis de ces banques. C'est nous qui sommes redevables, notamment pour les contrats de couverture. Par contre, ce qui est important pour nous, ce sont les contrats que nous avons avec nos clients. Ce sont généralement des opérateurs industriels solides, parmi les premiers mondiaux. Donc, la crise financière ou bancaire ne nous impacte pas sur ce plan. Nous n'avons pas d'actifs avec une banque, auquel cas il y aurait un risque.

Quel commentaire pouvez-vous dresser face au repli de l'action Managem en Bourse ?

L'évolution de la valeur de Managem suit l'évolution générale de la Bourse de Casablanca. Je pense qu'il ne faut pas apprécier celle de l'action sur le court terme. Il y a beaucoup d'irrationnel compte tenu de ce qui se passe à l'international. Il faut éviter de réagir avec des décisions qui peuvent impacter le long terme en ne prenant en compte que des éléments à court terme. Encore une fois, les fondamentaux de managem sont excellents sur le long terme. Managem dispose de plus en plus de niches avec des ressources en nette évolution, ce qui permet d'avoir une visibilité sur le long terme. Managem dispose d'un portefeuille diversifié qui permet de gérer au mieux les risques issus de l'évolution des cours des matières premières. Managem est présent de plus en plus à l'international avec des perspectives de développement que ce soit dans le domaine des métaux précieux où celui du cobalt et de cuivre. Tout cela nous permet de dire que Managem a des fondamentaux solides.

N'y a-t-il pas lieu de lancer un programme de rachat de vos propres actions afin de réguler le cours de Managem ?

Nous ne voyons pas réellement la nécessité de ce programme. Les ressources, nous préférons les mettre dans le développement et lancer des projets. C'est comme ça qu'on accroît la valeur de l'action. Racheter pour répondre à une conjoncture passagère, je ne pense pas qu'il serait opportun de le faire.

A la veille de la présentation de la Loi de finances 2009, la Fédération de l'industrie minérale (FIM) sollicite le gouvernement, via la CGEM, de rétablir la Provision pour la reconstitution de gisements (PRG). Est-elle aussi importante pour vous ?

Pour l'activité minière, la PRG est un élément très important. Ce qui détermine la rentabilité d'un actif minier, c'est d'abord sa capacité à même de dégager des ressources ou des réserves importantes. De par son incidence fiscale, la PRG permet de financer cette recherche et donc de dégager de nouvelles ressources minières. Le fait de l'enlever constitue un handicap pour notre activité.

A combien estimez-vous l'enjeu financier de cette provision ?

La PRG peut aller de quelques dizaines de millions de DH jusqu'à 100 ou 150 millions de DH. Tout dépend des cours et des résultats des sociétés. C'est très important d'injecter des fonds dans la recherche, ne serait-ce que pour quelques dizaines de millions de DH.

Pensez-vous que le fisc pourrait revenir sur une décision prise il y a à peine un an ?

Nous insistons en tout cas à ce que le fisc revoit cette situation, quitte à inventer un autre outil susceptible d'encourager les entreprises minières à faire de la recherche. C'est à l'administration de voir ces aspects et de répondre favorablement à cette doléance qui impacte considérablement la pérennisation de l'activité minière dans ce pays.




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