Lundi 26 mai, la salle 1 du
cinéma Pathé a résonné de rires, d’émotion et d’applaudissements. Douze équipes de
collégiens issues des 12 régions du
Maroc ont présenté leurs
courts métrages lors de la grande finale du programme «
Cinéma en classe», programme artistique du projet «
Madrastna – Collèges Pionniers», initié par le ministère de l’Éducation nationale, du préscolaire et des sports, en partenariat avec la
Fondation Ali Zaoua. Une initiative qui révèle l’impact de l’
art à l’
école.
«Ce que nous avons vu aujourd’hui confirme que l’art à l’école est un levier puissant d’expression et de transformation. Ces jeunes sont la preuve vivante qu’avec les bons outils et l’accompagnement adéquat, l’école devient un espace de création et de citoyenneté», a souligné
Sophia Akhmisse, directrice exécutive de la Fondation Ali Zaoua.
Devant un grand public composé de jeunes venus de tout le Royaume, de professionnels de la culture et d’un jury prestigieux, les finalistes ont proposé un véritable tour d’horizon des maux et des espoirs de leur génération.
Harcèlement scolaire,
immigration clandestine,
pauvreté,
solitude,
rapports sociaux... autant de thématiques fortes explorées avec justesse et créativité.
L’ambiance dans la salle était bon enfant, conviviale, portée par l’énergie contagieuse des élèves. L’acteur
Malek Akhmiss et la journaliste
Fadoua Hirate ont animé cette matinée artistique, ouverte par la lecture de versets coraniques et l’hymne national, dans une atmosphère de fête et de fierté partagée.
Les 12 courts métrages présentés sont le fruit d’un travail intense mené pendant plusieurs mois dans près de 250 collèges pionniers. Ce module du projet «
Madrastna» permet aux élèves de développer leur regard critique, leur capacité de
narration et leur
expression artistique, tout en renforçant leur esprit d’équipe et leur confiance en soi.
Président du jury, le cinéaste
Nabil Ayouch a salué la créativité, la sincérité et la maturité des jeunes lauréats, et affirmé qu’il les soutiendrait dans la poursuite de leurs projets cinématographiques. Pour lui, les jeunes développent à travers ce genre d’initiatives leur pensée critique, leur sensibilité artistique et apprennent à raconter leur monde avec leurs propres mots.
Le jury rassemblait également l’actrice et réalisatrice
Samia Akariou, le réalisateur
Ismaïl Farroukhi, les critiques
Saïd Mezouari et
Majid Sadati, ainsi que
Mbarek Mezene, représentant du ministère. Tous ont souligné l’originalité des scénarios, la sincérité du jeu d’acteur et la force du message de ces jeunes cinéastes en herbe. «Ces jeunes lauréats ont su démontrer tout au long du processus une remarquable capacité à s’approprier les outils du langage cinématographique, à travailler en équipe et à exprimer des idées fortes à travers des œuvres originales, sincères et percutantes», a souligné
Wijdane Bekkare, chef de projet à la Fondation Ali Zaoua.
Parmi les
films ayant particulièrement marqué le public, celui présenté par les représentants de
Guelmim-Oued Noun s’est distingué par la force de son témoignage. Inspiré d’une histoire réelle, le court métrage retrace le parcours douloureux d’un jeune élève tenté par l’immigration clandestine, une aventure périlleuse qui s’est soldée par un échec. La professeure encadrante a fait le choix fort de mettre en lumière cette expérience afin de sensibiliser les adolescents aux dangers de la
migration illégale. À travers un récit poignant et réaliste, les élèves ont su transmettre un message de prévention et de réflexion, rappelant que le cinéma est aussi un outil puissant d’
éducation et de transformation sociale.
Le film de la région de
Fès-Meknès, intitulé «
Les Vacances», a lui aussi attiré l’attention par la pertinence de sa thématique. Les élèves y ont raconté l’histoire de jeunes qui, pendant les
vacances scolaires, travaillent pour soutenir leurs familles et économiser pour les fournitures et les vêtements de la rentrée. Ce choix scénaristique, empreint de réalisme, met en lumière une facette méconnue, mais bien réelle de la vie de nombreux collégiens marocains, entre responsabilités précoces et solidarité familiale.
Le film «
Lferda» du
lycée collégial Annahda de la région de
l’Oriental, lauréat du
Prix du Public, retrace, quant à lui, l’histoire d’un jeune garçon démuni, incapable d’acquérir de nouvelles chaussures, confronté au harcèlement de ses camarades. Refusant de se résigner, il fait preuve d’ingéniosité en confectionnant lui-même des chaussures à partir de ses vieux vêtements et souliers recyclés. Cette œuvre porte un regard sensible sur la résilience et la créativité face à la précarité. À travers le
recyclage ingénieux de matériaux modestes, elle illustre la capacité d’adaptation et la dignité d’un enfant qui refuse de se laisser abattre par les difficultés sociales et le harcèlement scolaire. Plus qu’un simple récit, ce film invite à réfléchir sur l’importance de l’entraide, de l’ingéniosité et du courage dans un contexte marqué par l’injustice et l’exclusion.
«L’ambiance est différente quand on voit un film qu’on a fait soi-même, ou dans lequel on reconnaît ses amis. On a vécu chaque moment de sa conception», confiait un élève finaliste, ému.
Avec «Madrastna», l’école devient non seulement un lieu d’apprentissage, mais aussi un espace d’expression, où les jeunes peuvent s’inventer un futur à leur image. La magie du cinéma opère... et peut-être que parmi ces collégiens se cachent déjà les grands noms du 7e art de demain.