Saïd Naoumi
05 Décembre 2025
À 09:35
Le
secteur financier marocain vit une transformation substantielle. Cette mutation est portée par la digitalisation accélérée, l’essor des fintechs et la volonté affirmée de
Bank Al-Maghrib de bâtir un écosystème ouvert et inclusif, où l’information sur le crédit et la donnée deviennent des actifs stratégiques. Dans ce contexte en pleine mutation, la deuxième édition du
Forum «La bancassurance digitale à l’ère de l’IA», organisée par
Afric Interworld, le 4 décembre courant à Casablanca, s’impose comme un espace privilégié pour décrypter les mutations du marché, anticiper les tendances et poser les bases de nouveaux partenariats. Le fait est que la bancassurance change de paradigme :
intelligence artificielle, exploitation des données, insurtech, Cloud, nouveaux parcours clients... Bref, le Forum a réuni banques, assureurs, fintechs, insurtechs, régulateurs et experts pour aborder les ruptures technologiques qui redessinent la relation client et les modèles économiques.
Invité du Forum, Olivier Roche, directeur associé de FCB AI, rappelle l’ampleur du basculement technologique en cours. Selon lui, l’adoption de l’intelligence artificielle (IA) générative atteint des niveaux historiques. En effet, selon ses données, les IA généralistes affichent en 2024 quelque 365 milliards de requêtes, un seuil atteint en 10 ans par Google au moment de son lancement. De même, ajoute-t-il, 83% des institutions financières mondiales sont aujourd’hui engagées dans l’intégration de solutions d’IA, tandis que 72% des clients bancaires ont déjà utilisé un chatbot. Selon Roche, la révolution en cours est plus structurante encore que celle d’Internet.
Face à des produits financiers complexes, des parcours lourds et une information souvent difficile d’accès, l’IA apparaît comme une réponse directe aux nouveaux comportements des clients, eu égard à ses multiples avantages : disponibilité immédiate, information claire et personnalisée, multicanal fluide, réduction des délais et interactions sans effort. L’attente devient désormais l’une des plus grandes sources de frustration. Dans un univers où l’usage de WhatsApp, des messageries instantanées et des outils asynchrones s’impose, les marques financières ne peuvent plus tolérer des parcours de contact rigides ou des centres d’appels saturés.
Dans la vision d’Olivier Roche, l’IA générative représente une rupture comparable à l’arrivée de la calculatrice dans le calcul mental. Il s’agit d’un outil qui fait gagner du temps et lève les points de friction, et ce grâce à ses bénéfices clés : il rend simple ce qui est complexe, explique les garanties, exclusions, conditions ou démarches en langage naturel, fonctionne instantanément en multilingue et réengage automatiquement les prospects dans les parcours de souscription. L’intervenant relève par ailleurs que, lorsque l’enjeu devient critique – dans le cas d’un sinistre, un litige, une incompréhension, un besoin d’accompagnement – l’intervention humaine doit redevenir plus qualitative, plus empathique et plus efficace.
Dans un secteur financier marocain déjà engagé dans une transition stratégique – data, scoring, identification, inclusion financière – la montée en puissance de l’IA générative s’inscrit dans la même dynamique, en offrant, entre autres, une amélioration de l’accès à l’information, la fluidification des parcours clients, la réduction des charges opérationnelles et la montée en compétence des équipes. Le Maroc, avec ses initiatives sur les registres nationaux, la digitalisation du crédit, l’open banking et l’écosystème fintech en expansion, dispose d’un terrain fertile pour déployer ces solutions à grande échelle.