Économie

Les intermédiaires d’assurance veulent doubler le taux de pénétration du marché d’ici 2030 (Entretien)

Farid Bensaid, Président de la Fédération Nationale des Agents et Courtiers d’Assurance du Maroc (FNACAM), revient sur les leviers à activer pour atteindre l’objectif ambitieux de doubler le taux de pénétration d’ici 2030. Une transformation qui repose sur un équilibre entre innovation technologique et intelligence humaine, au cœur du métier d’agent et de courtier.

10 Octobre 2025 À 09:57

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Comment envisagez-vous l’évolution du rôle de l’agent et du courtier d’assurance au Maroc à l’horizon 2030 ? Sera-t-il davantage axé sur la technologie, sur l’humain, ou sur un équilibre entre les deux ?

Farid Bensaid: En 2030, le Maroc accueillera la Coupe du Monde, un événement qui accélérera les investissements technologiques et en infrastructures. Le secteur de l’assurance devra accompagner cette dynamique, notamment en matière de prévention et de gestion des risques. Aujourd’hui, le taux de pénétration des assurances au Maroc est de 4,1%. C’est supérieur à la moyenne africaine, mais bien en deçà du potentiel réel. L’objectif est clair : doubler ce taux d’ici 2030.

Le développement passera par une double approche : technologique et sociale. Les deux dimensions devront avancer de concert pour permettre au secteur de pleinement jouer son rôle dans l’économie et la société marocaine.



Quels sont, à court terme, les enjeux majeurs auxquels la profession doit faire face ?

Le sujet majeur est la finalisation du Livre 4, une nouvelle réglementation qui doit définir le "code de la route” de la profession. Ce texte permettra d’intégrer des évolutions essentielles, comme la dématérialisation de l’attestation d’assurance, aujourd’hui freinée par un cadre réglementaire inadapté.

À cela s’ajoutent les assurances obligatoires, qui vont renforcer la solidité du marché et offrir davantage de sécurité aux assurés et aux entreprises. Mais, pour moi, l’entrée en vigueur du Livre 4 demeure la priorité absolue.

Avec la généralisation de l’AMO et le renforcement des assurances obligatoires, le marché de l’assurance au Maroc est en pleine mutation. Quels sont, selon vous, les principaux risques et opportunités que cette transformation représente pour les intermédiaires ?

La généralisation de l’AMO est avant tout une avancée sociétale majeure : elle permettra à l’ensemble des Marocains de bénéficier progressivement d’une couverture médicale. Mais cette transformation entraîne aussi des défis économiques et assuranciels. Les entreprises d’assurance et leurs intermédiaires verront une partie de leur chiffre d’affaires se réduire, notamment sur les segments actuellement couverts par les assurances privées. Cela impose une adaptation : développer des produits complémentaires qui viendront combler l’écart entre l’AMO et les avantages auxquels les salariés sont habitués. Dans ce contexte, le rôle de conseil des intermédiaires devient crucial pour anticiper, accompagner et sécuriser les entreprises face à ces changements.

Le slogan "L’IA face à l’IA” illustre la tension entre intelligence artificielle et intelligence humaine dans le métier d’intermédiaire. Comment la FNACAM compte-t-elle accompagner ses membres pour intégrer ces outils technologiques tout en préservant la dimension humaine du conseil et de la relation client ?

L’intelligence artificielle doit être perçue comme un allié, non comme une menace. Les tâches répétitives ou techniques, telles que la détection de fraudes ou l’analyse d’historiques, peuvent être efficacement prises en charge par la machine.

Mais l’essence du métier d’intermédiaire reste humaine : écouter, comprendre et conseiller. La FNACAM encourage donc ses membres à se doter d’outils d’IA, tout en valorisant la dimension relationnelle et de confiance, irremplaçable dans le lien avec l’assuré.
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