L'Aïd Al-Adha, la plus importante fête des musulmans, qui rassemble les familles dans la joie, a tourné au carnage vendredi dans une mosquée de Charsadda, dans le nord-ouest du Pakistan, où un kamikaze a fait exploser une bombe, tuant au moins 54 personnes au moment le plus fort de la prière collective.
La police pakistanaise inspecter le site de l'attaque suicide à la mosquée de Charsadda. (Photos : AFP)
AFP
21 Décembre 2007
À 09:40
"J'ai perdu mes deux frères", se lamente Jehangir Khan, qui prend sa tête dans ses mains et s'agenouille au beau milieu de la cour au sol maculé de sang qui servait, pour l'occasion, de salle des prières. Le millier de fidèle venus se recueillir ne pouvaient pas tous se masser dans la petite salle de la mosquée.
Jehangir, malgré la douleur, a aidé les secouristes et retiré de la mosquée les corps mutilés de six enfants.
L'attentat suicide, le énième d'une vague sans précédent perpétrés dans le pays par les fondamentalistes proches d'Al-Qaïda et des talibans afghans, et qui a tué déjà près de 760 personnes en 2007, visait cette fois un notable local, Aftab Sherpao, qui était encore, il y a un peu plus d'un mois, le ministre de l'Intérieur du président Pervez Musharraf et, à ce titre, l'un des artisans et exécutants les plus acharnés de la lutte contre les terroristes islamistes.
Les femmes hurlent et de battent la poitrine en signe de douleur à mesure que les corps mutilés de leurs proches sont retirés de la mosquée, située au cœur des dépendance"s de la résidence familiale de M. Sherpao, légèrement blessé il y a huit mois dans ce même fief de Charsadda par un attentat suicide qui avait déjà tué 28 personnes.
L'explosion, qui n'a pas blessé M. Sherpao mais l'un de ses fils, était si violente qu'elle a soufflé les portes et les fenêtres de la mosquée alors que la bombe a explosé dans la cour en plein air. Des morceaux de chair et des membres jonchaient les alentours plusieurs heures après le drame, au beau milieu des chaussures laissées à l'extérieur par les fidèles.
"C'est comme si l'on avait aspergé les lieux avec des dizaines de litres de sang", souffle Ghuncha Gul, un officier de la police de Charsadda, encore abasourdi par l'ampleur du drame.
L'Aïd Al-Adha, la "Fête du sacrifice", n'a même pas donné lieu à l'abattage rituel des moutons ou des chèvres dans le village, qui devait avoir lieu après la grande prière. Au lieu d'en partager la viande avec la famille et les autres villageois, comme le veut la tradition, les habitants parcouraient chaque maison dans l'après-midi pour tenter de consoler ceux qui ont perdu un des leurs.
C'est au moment où les croyants s'inclinaient quand l'imam de la mosquée prononçait la formule rituelle "Allah u Akbar" ("Allah est le plus grand"), moment fort de la prière, que le kamikaze a déclenché la bombe qu'i portait sur lui, au milieu de centaines de fidèles, raconte l'un d'eux, Jangrez Khan.
Plusieurs heures après le drame, les ambulances continuaient leur va-et-vient, transportant les très nombreux blessés vers les hôpitaux de la région placés en état d'alerte.
"C'était une explosion extrêmement violente", se rappelle-t-il. AFP